FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 74867  de  M.   Bartolone Claude ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Seine-Saint-Denis ) QE
Ministère interrogé :  Défense et anciens combattants
Ministère attributaire :  Défense et anciens combattants
Question publiée au JO le :  30/03/2010  page :  3529
Réponse publiée au JO le :  14/09/2010  page :  9998
Rubrique :  anciens combattants et victimes de guerre
Tête d'analyse :  mention : mort en déportation
Analyse :  réglementation. application
Texte de la QUESTION : M. Claude Bartolone attire l'attention de M. le secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants sur l'application de la loi n° 85-528 du 15 mai 1985. Cette loi stipule que les personnes déportées de France et non revenues durant la Seconde Guerre mondiale ont droit, même en l'absence de sépulture, à un acte de décès officiel dans les registres de l'état civil. À ce jour, moins de la moitié des 115 500 personnes officiellement déportées, que ce soit pour des raisons dites « raciales » ou « de répression », ont fait l'objet d'un acte de décès rédigé selon les dispositions de la loi et publié au Journal officiel, ce qui signifie qu'elles ne sont toujours pas officiellement décédées. Les retards démesurés pris dans l'établissement des actes de décès ont d'ailleurs été soulignés par le M. le Médiateur de la République dans son rapport annuel 2009, au chapitre intitulé « Une mise en oeuvre tardive des dispositions législatives ». La loi n° 85-528 du 15 mai 1985, votée à l'unanimité du Parlement, impose pourtant au secrétaire d'État des anciens combattants d'intervenir soit d'office, soit à la demande d'un ayant cause du défunt, pour l'apposition de la mention « Mort en déportation » sur l'acte de décès des déportés non rentrés des camps nazis. La loi dispose, en effet, que « lorsqu'il est établi qu'une personne a fait partie d'un convoi de déportation sans qu'aucune nouvelle ait été reçue d'elle postérieurement à la date du départ de ce convoi, son décès est présumé survenu le cinquième jour suivant cette date, au lieu de destination du convoi ». Or, malgré des déclarations de bonnes intentions, le secrétariat d'État ne cesse de discuter les termes de la loi, faisant surgir de très nombreux cas ne permettant pas d'établir des actes de décès : lieu de naissance inconnu, dernière adresse en France inconnue... Le secrétariat d'État va même parfois jusqu'à contredire les termes de la loi, notamment lorsqu'il souligne que tous les déportés n'ont pas été exterminés lors de leur arrivée dans les camps nazis, rendant selon lui impossible l'application de la loi. Ces tergiversations mettent à mal la politique mémorielle pourtant revendiquée par la France. Alors que le Gouvernement a prévu, lors du conseil des ministres du 9 septembre 2009, « une année commémorative exceptionnellement riche », il lui demande par conséquent ce qu'il entend faire pour rendre enfin justice aux requérants des dizaines de milliers de dossiers en déshérence dans le respect strict du texte voté par le législateur, afin que la République n'oublie plus ceux qui sont morts en raison de leurs origines comme de leur engagement pour la liberté de tous.
Texte de la REPONSE : En application des dispositions de l'article 1er de la loi n° 85-528 du 15 mai 1985 sur les actes et jugements déclaratifs de décès des personnes mortes en déportation, la mention « mort en déportation » est portée sur l'acte de décès de toute personne de nationalité française, ou résidant en France ou sur un territoire antérieurement placé sous la souveraineté, le protectorat ou la tutelle de la France, qui, ayant fait l'objet d'un transfert dans une prison ou un camp visé par l'article L. 272 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, y est décédée. La même mention est portée sur l'acte de décès si la personne a succombé à l'occasion du transfert. L'attribution de la mention « mort en déportation » suppose donc l'existence d'un acte de décès. En l'absence d'un tel acte, il est indispensable qu'un jugement déclaratif de décès soit rendu aux termes d'une procédure en déclaration judiciaire de décès dans les conditions édictées aux articles 88 et suivants du code civil. Il est important de souligner qu'un grand nombre de dossiers restant aujourd'hui à traiter concerne des personnes pour lesquelles il n'existe ni acte de décès, ni jugement déclaratif de décès. Pour ces dossiers qui ne comportent aucune des pièces précitées, une procédure en déclaration judiciaire de décès doit donc être engagée auprès du tribunal de grande instance. Deux hypothèses peuvent alors se présenter. Si la victime a fait partie d'un convoi de déportation sans qu'aucune nouvelle n'ait été reçue d'elle postérieurement à la date de départ de ce convoi, son décès est présumé survenu le 5e jour suivant cette date en application de l'article 3 de la loi du 15 mai 1985. Si elle a fait partie d'un convoi, mais que la preuve est apportée qu'elle a été vue dans le camp d'arrivée ou tout autre camp postérieurement aux cinq jours prévus par la loi, le décès est alors présumé survenu cinq jours après la date attestant que la personne a été vue vivante, conformément aux dispositions de l'article 3 de la loi du 15 mai 1985. Dans ces deux hypothèses, il incombe à l'autorité judiciaire de rendre un jugement déclaratif de décès valant acte de décès, préalable indispensable à l'attribution de la mention. Telles sont les raisons pour lesquelles le travail de l'administration ne peut se limiter, pour chaque dossier, à appliquer uniformément la règle des cinq jours au départ du convoi. Elle doit également s'attacher à rechercher les informations contenues dans les documents d'archives. Par ailleurs, il est indispensable, pour attribuer la mention « mort en déportation », de disposer des pièces officielles de l'état civil. Or, les investigations pour recueillir ces pièces sont longues et difficiles. C'est le cas, par exemple, lorsqu'il s'agit de rechercher l'acte de naissance d'une personne née en Europe de l'Est. Dans ces conditions, une instruction doit être menée pour chaque demande d'attribution de la mention, lorsque toutes les pièces nécessaires à la constitution du dossier ne sont pas réunies. Il convient d'ajouter que tous les dossiers répertoriés ne répondent pas aux critères définis pour l'application de la loi et que certains dossiers sont malheureusement inexploitables en raison de l'absence de pièces indispensables à leur instruction, telles les pièces d'état civil. Enfin, l'une des difficultés concernant l'attribution de la mention tenait aux interprétations divergentes de la loi de 1985 par les parquets. Afin de pallier cette difficulté, le garde des sceaux, ministre de la justice, saisi par le ministère de la défense a diffusé une circulaire en date du 29 octobre 2008 à tous les parquets, afin que ceux-ci appliquent uniformément la loi du 15 mai 1985. Parallèlement, les services du ministère de la défense, conscients de l'importance du travail à mener, mettent tout en oeuvre pour que les dossiers en instance soient traités dans les meilleurs délais. C'est ainsi que depuis 2006, les effectifs chargés de l'instruction de ces dossiers ont été renforcés. Cet effort a permis, depuis cette date, d'augmenter sensiblement la moyenne annuelle du nombre de dossiers traités. Ainsi, 3 000 dossiers par an ont été traités alors que la moyenne de dossiers traités entre 2001 et 2005 se situait aux environs de 1 000. Actuellement, 60 000 dossiers ont été régularisés.
S.R.C. 13 REP_PUB Ile-de-France O