FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 78087  de  M.   Grosdidier François ( Union pour un Mouvement Populaire - Moselle ) QE
Ministère interrogé :  Intérieur et collectivités territoriales
Ministère attributaire :  Intérieur et collectivités territoriales
Question publiée au JO le :  04/05/2010  page :  4895
Réponse publiée au JO le :  28/09/2010  page :  10621
Rubrique :  secteur public
Tête d'analyse :  services publics
Analyse :  concession. associations. réglementation
Texte de la QUESTION : M. François Grosdidier attire l'attention de M. le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales sur le cas particulier de la commune d'Amnéville-les-Thermes (Moselle) qui a construit et financé une station thermale dont la gestion a été confiée à une association para-municipale par une délibération du conseil municipal de 1986. Depuis lors, l'association para-municipale gère la station au nom et pour le compte de la commune. Il souhaite que soit confirmé le caractère de service public assuré par l'association dans ce cadre.
Texte de la REPONSE : Indépendamment des cas dans lesquels le législateur entend lui-même reconnaître ou à l'inverse exclure l'existence d'un service public, la jurisprudence a au fil du temps permis de déterminer des critères permettant d'identifier l'existence d'un service public. La possibilité pour une personne privée de gérer un service public a été reconnue depuis longtemps par le Conseil d'État (CE, assemblée, 20 décembre 1935, Établissement Vézia ; CE, assemblée, 13 mai 1938 Caisse primaire aide et protection). Le juge a par la suite fixé trois critères permettant de déterminer la présence d'un service public lorsqu'il est géré par un organisme privé : l'existence d'une mission d'intérêt général, l'existence d'un contrôle exercé par une personne publique et, enfin, l'existence de prérogatives de puissance publique (CE, section, 28 juin 1963 Narcy). Si la présence cumulée de ces trois critères a pu paraître indispensable à la reconnaissance de l'existence d'un service public géré par une personne privée, le Conseil d'État a pu admettre qu'une association gère sous le contrôle d'une commune un service public communal, alors même que les missions qui lui étaient confiées ne comportaient pas la mise en oeuvre de prérogatives de puissance publique (CE, 20 juillet 1990, Ville de Melun et association Melun culture loisirs c/Vivien). Plus récemment, le Conseil d'État a estimé que « même en l'absence de prérogatives de puissance publique, une personne privée doit être regardée, dans le silence de la loi, comme assurant une mission de service public lorsque, eu égard à l'intérêt général de son activité, aux conditions de sa création, de son organisation ou de son fonctionnement, aux obligations qui lui sont imposées ainsi qu'aux mesures prises pour vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, il apparaît que l'administration a entendu lui confier une telle mission » (CE, section, 22 février 2007, association du personnel relevant des établissements pour inadaptés). Le Conseil d'État a également considéré, dans une décision rendue la même année, que « l'activité d'une personne privée peut se voir reconnaître un caractère de service public, alors même qu'elle n'a fait l'objet d'aucun contrat de service public procédant à sa dévolution, si une personne publique, en raison de l'intérêt général qui s'y attache et de l'importance qu'elle revêt à ses yeux, exerce un droit de regard sur son organisation et, le cas échéant, lui accorde, dès lors qu'aucune règle ni aucun principe n'y font obstacle, des financements » (CE, 6 avril 2007 commune d'Aix en Provence). Enfin, le Conseil d'État a pu juger, s'agissant de deux conventions destinées respectivement à assurer une mission d'information communale et à assurer la promotion et la publicité d'une station thermale, par l'accueil et l'information des curistes notamment, « que [leur objet] relevait d'une mission de service public » (CE, 10 juillet 1996, commune de Divonne-les-Bains). Il ressort de l'ensemble de ces éléments qu'il existe un faisceau d'indices tendant à démontrer qu'une activité telle que celle décrite par l'honorable parlementaire pourrait être qualifiée de service public. La qualification de service public relève en tout état de cause de l'appréciation souveraine du juge administratif à l'occasion des cas d'espèces qui lui sont soumis. Par ailleurs, s'il n'existe pas d'incompatibilité de principe entre la qualité d'élu d'une collectivité locale et celle de membre du conseil d'administration d'une association subventionnée par cette collectivité, l'objet de la structure ne doit pas viser à contourner certaines obligations liées à la gestion publique (notamment les règles en matière de comptabilité publique, de marchés publics, ou encore le statut de la fonction publique territoriale) ni constituer un simple démembrement du service public. Aussi, en confiant des moyens et des missions à des associations, les élus doivent veiller à ce que ces associations ne puissent être considérées comme de simples prolongements de la collectivité locale et qu'elles disposent d'une autonomie suffisante pour l'utilisation des subventions octroyées. À défaut, les élus membres de ces associations s'exposent à être déclarés comptables de fait. En effet, les personnes morales ou physiques concernées par la gestion de fait peuvent être celles qui ont utilisé ou détenu de façon directe ou indirecte les deniers publics sans habilitation régulière, ainsi que celles qui, du fait de leur fonction, ont soit couvert de leur autorité, soit connu et toléré ces opérations irrégulières. Selon la jurisprudence du Conseil d'État (8 juin 1994, Delerez) et de la Cour des comptes (24 septembre 1987, association Madine Accueil), un encadrement des rapports entre la collectivité et l'association peut contribuer à prévenir le risque de gestion de fait, les droits et obligations des deux parties devant être strictement définis dans une convention afin de garantir, d'une part, l'autonomie de l'association et, d'autre part, la surveillance que la collectivité doit exercer sur les conditions d'exécution d'une mission d'intérêt général financée par des fonds publics. Cette exigence a été rappelée par la circulaire du Premier ministre n° 3-300 S/G du 15 janvier 1988 relative aux rapports entre l'État et les associations bénéficiaires de fonds publics. Néanmoins, l'existence d'une convention entre la collectivité et l'association bénéficiaire de fonds publics, si elle constitue une précaution, ne suffit pas pour écarter le risque de qualification de gestion de fait, les autres critères jurisprudentiels devant être, dans tous les cas, respectés.
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