FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 791  de  M.   Quentin Didier ( Union pour un Mouvement Populaire - Charente-Maritime ) QOSD
Ministère interrogé :  Écologie
Ministère attributaire :  Écologie
Question publiée au JO le :  23/06/2009  page :  5976
Réponse publiée au JO le :  01/07/2009  page :  5792
Rubrique :  énergie et carburants
Tête d'analyse :  politique énergétique
Analyse :  terminal méthanier. perspectives. Verdon-sur-Mer
Texte de la QUESTION : M. Didier Quentin appelle l'attention de Mme la secrétaire d'État chargée de l'écologie sur le projet de terminal méthanier au Verdon-sur-Mer. Il importe donc d'en finir le plus rapidement possible avec cette « épée de Damoclès », d'autant plus que ce projet constitue un triple non-sens économique, énergétique et écologique. Un non-sens énergétique d'abord, car la France est déjà en situation de surcapacité de stockage de gaz naturel liquéfié avec les installations existantes, dont certaines peuvent être doublées, comme à Montoir-de-Bretagne. Un non-sens économique aussi, car les initiateurs de ce projet font miroiter des retombées mirobolantes en terme de recettes fiscales pour les collectivités et de création d'emplois. Mais elles seraient dérisoires par rapport aux effets très négatifs pour les activités primaires et pour l'économie touristique, comme on a pu le constater dans des localités qui ont accueilli des installations classées Seveso. Or le tourisme - l'écotourisme - reste le premier gisement d'emplois et la principale source de richesses du pays royannais. Un non-sens écologique enfin, tant les conséquences seraient négatives pour l'environnement et la biodiversité. Un tel équipement provoquerait une pollution visuelle et paysagère devant quelques-uns des sites les plus emblématiques de notre littoral, sans parler d'innombrables nuisances pour les cultures marines. Par ailleurs, il convient de se féliciter de l'installation à Rochefort-sur-Mer de la mission de préfiguration pour la création d'une « aire marine protégée », au nord de l'estuaire de la Gironde et dans les pertuis charentais, qu'il préconise avec insistance depuis l'automne 2007 et dont les travaux viennent de commencer. C'est pourquoi il lui demande de lui indiquer l'attitude de l'État sur les suites données à la convention de réservation des terrains entre le port autonome de Bordeaux - désormais grand port maritime - et la société 4Gas, alors que celle-ci touche à son terme. L'État doit pouvoir se prononcer sur ce sujet, ainsi que sur les aspects réglementaires relatifs au dossier de demande d'autorisation d'exploiter un terminal qui avait été déclaré non recevable en l'état, le 3 décembre 2008.
Texte de la REPONSE :

PERSPECTIVES DU PROJET DE TERMINAL MÉTHANIER AU VERDON-SUR-MER

M. le président. La parole est à M. Didier Quentin, pour exposer sa question, n° 791, relative aux perspectives du projet de terminal méthanier au Verdon-sur-Mer.
M. Didier Quentin. Madame la secrétaire d'État en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, je viens, pour la cinquième fois dans cet hémicycle mais pour la première fois auprès de vous, me faire l'écho de l'opposition déterminée de la quasi-unanimité des élus, des populations et des associations de Charente-Maritime au projet de terminal méthanier au Verdon-sur-Mer, juste en face de Royan, à l'embouchure de la Gironde, dernier grand estuaire naturel d'Europe.
Je souhaite vous redire de la manière la plus nette que ce projet constitue un triple non-sens, énergétique, économique et écologique, et qu'il importe d'en finir avec lui le plus rapidement possible, tant il est nuisible pour notre littoral et anxiogène pour les populations, lesquelles appellent de leurs voeux la création dans les meilleurs délais d'une aire marine protégée.
C'est un non-sens énergétique d'abord, étant donné que la France est déjà en situation de surcapacité de stockage de gaz naturel, et que d'autres projets d'implantation ne posent pas de problème.
C'est aussi un non-sens économique, car les initiateurs du projet font miroiter des retombées mirobolantes en termes de recettes fiscales pour les collectivités et de création d'emplois, mais elles seraient dérisoires par rapport aux effets très négatifs pour les activités primaires et l'économie touristique, comme on a pu le constater dans des localités où se sont implantées des installations classées Seveso.
C'est un non-sens écologique enfin, tant les conséquences seraient dommageables pour l'environnement et la biodiversité exceptionnelle, tant faunistique que floristique, de cet estuaire. Le fait a d'ailleurs été réaffirmé lors des deux réunions régionales du Grenelle de la mer, qui se sont tenues, le 15 juin à Artigues pour l'Aquitaine, le 20 juin au " Forum des pertuis " de La Rochelle pour Poitou-Charentes.
Par ailleurs, ce projet pourrait être gravement préjudiciable au maintien d'activités primaires, car des méthaniers de quinze mètres de tirant d'eau raclant le fond du chenal d'accès feraient remonter des métaux lourds nuisibles à la pêche et à la conchyliculture, et en particulier à la collecte du naissain d'huîtres.
L'estuaire de la Gironde est un lieu d'intérêt environnemental capital, non seulement pour la France, mais aussi pour l'Europe. Il fait partie de ces territoires à ménager plutôt qu'à aménager - à moins qu'il ne s'agisse d'un aménagement éco-responsable.
Dans cet esprit, les préfets de la Gironde et de la Charente-Maritime ont lancé le 25 juin, à Blaye, les premières consultations pour la création d'une aire marine protégée dans l'estuaire de la Gironde et dans les pertuis charentais. Il est donc patent que la vocation de l'estuaire de la Gironde, plus grand et dernier estuaire naturel d'Europe, doit être liée au développement d'une économie et d'un tourisme durables.
C'est pourquoi je vous serais reconnaissant de m'indiquer dans quel délai le Gouvernement envisage, au-delà des précautions juridiques, de mettre un terme au projet de terminal méthanier. En effet, le grand port maritime de Bordeaux laisse entrevoir la mobilisation de financements en vue de l'appontement de méthaniers ainsi que le creusement d'un nouveau chenal d'accès au port du Verdon. Notre économie littorale ne pourra longtemps supporter une telle épée de Damoclès dans un contexte déjà délicat.
Je vous serais également obligé de m'apporter des précisions sur les décisions que l'État entend prendre, d'une part, sur le renouvellement avant le 4 août 2009 de la convention de réservation des terrains entre le grand port maritime de Bordeaux et la société néerlandaise 4Gas, d'autre part, sur la signature avec cette société d'une éventuelle convention de réservation portant sur un terrain voisin.
Enfin, je me permets d'appeler votre attention sur la composition du conseil scientifique de l'estuaire de la Gironde, qui comporte seulement trois représentants pictocharentais sur vingt membres. Je vous serais reconnaissant de m'indiquer si vous envisagez d'élargir la représentation de ce conseil, où les deux rives devraient être équitablement représentées.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, secrétaire d'État en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. Monsieur le député, le Grenelle de l'environnement fixe comme priorités, en matière énergétique, les économies d'énergie, le développement des énergies renouvelables et, plus généralement, celui des énergies décarbonées. Ce sont les axes majeurs de la transition énergétique dans laquelle nous engageons notre pays.
Néanmoins, notre pays a besoin de gaz naturel liquéfié pour diversifier ses approvisionnements en gaz et, en particulier, réduire son exposition aux risques liés au transport par gazoduc, ainsi que pour accompagner la décroissance du charbon, étant donné que la moitié des centrales à charbon seront fermées d'ici à 2015.
Vous le savez, plusieurs projets existent. Le Gouvernement soutient ceux d'entre eux qui se situent dans des zones a priori favorables d'un point de vue environnemental, comme à Dunkerque ou à Montoir-de-Bretagne, car la qualité environnementale du projet est bien l'élément déterminant et prioritaire.
En l'espèce, le projet de terminal méthanier du Verdon relève du régime des installations classées et de la directive " Seveso seuil haut ". De ce fait, le dossier est soumis à une procédure d'autorisation très stricte, avec étude d'impact et étude de danger, enquête publique, tierce expertise et exigence de garantie financière.
Une telle procédure a pour objectif d'organiser un débat contradictoire et de mettre en évidence, de manière précise, les avantages et inconvénients du projet, ainsi que les mesures prises pour en apprécier et en corriger les impacts et les dangers potentiels.
C'est cette procédure environnementale qui est importante, et non les questions de domanialité, qui regardent au premier chef le port.
Le Gouvernement porte une ambition environnementale pour l'estuaire de la Gironde. C'est pourquoi notre ministère a décidé la mise à l'étude d'un projet de parc naturel marin sur l'estuaire de la Gironde ainsi que sur les pertuis charentais. Ce projet s'inscrit dans le cadre des engagements du Grenelle de l'environnement en faveur d'une gestion durable et concertée des ressources du littoral et de la création de dix parcs naturels marins d'ici à 2012.
Naturellement, le projet de terminal méthanier devra être examiné à la lumière de la création de ce parc naturel, ainsi que des enjeux de sécurité au regard des populations environnantes. Nous serons très attentifs à ces aspects, s'agissant d'un site Seveso.
Je précise que, depuis la décision d'irrecevabilité du dossier prise en décembre 2008 par le préfet, l'entreprise n'a pas déposé de dossier complémentaire, et la procédure est donc à ce stade arrêtée.
Enfin, pour répondre à votre dernière question, le conseil scientifique de l'estuaire de la Gironde a été créé le 5 mars dernier en application de la loi de juillet 2008 et du décret de janvier 2009. Ces deux textes laissent une marge d'appréciation quant à sa composition.
Le préfet de la Gironde a ainsi constitué une commission de haut niveau universitaire, représentative des différentes disciplines concernées et ouverte aux experts et associations de protection de l'environnement. La composition et le fonctionnement de ce conseil feront bien entendu l'objet d'une évaluation régulière afin de déterminer l'opportunité de son élargissement.
M. le président. La parole est à M. Didier Quentin.
M. Didier Quentin. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de vos propos rassurants, qui font suite à ceux tenus par Mme Jouanno lors d'un entretien sur France-Inter le lundi 8 juin, ainsi que par M. le ministre d'État Jean-Louis Borloo le 20 juin à Rochefort-sur-Mer, lors de l'inauguration des nouveaux locaux de la Ligue pour la protection des oiseaux.
J'insiste néanmoins sur l'urgente nécessité de donner un coup d'arrêt à ce projet, car un tel terminal méthanier serait " grenello-incompatible " - si vous me permettez cette expression - et contraire aux orientations que nous prenons dans le Grenelle de la mer.
Au contraire, nous pourrions, en créant dans les meilleurs délais le parc naturel marin de la Gironde et des pertuis charentais que nous appelons ardemment de nos voeux, concilier croissance bleue et croissance verte.

UMP 13 REP_PUB Poitou-Charentes O