FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 81211  de  M.   Paternotte Yanick ( Union pour un Mouvement Populaire - Val-d'Oise ) QE
Ministère interrogé :  Justice et libertés (garde des sceaux)
Ministère attributaire :  Justice et libertés (garde des sceaux)
Question publiée au JO le :  15/06/2010  page :  6536
Réponse publiée au JO le :  16/11/2010  page :  12487
Rubrique :  politique extérieure
Tête d'analyse :  Rwanda
Analyse :  génocide. auteurs. poursuites
Texte de la QUESTION : M. Yanick Paternotte interroge Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur l'interpellation d'un docteur rwandais organisée le 26 mai 2010, dans sa ville de Sannois. Celui-ci, suspecté d'avoir activement participé au génocide rwandais et recherché par Interpol, venait assister, à Sannois, aux obsèques de l'ancien dirigeant rwandais Jean-Bosco Barayagwiza décédé alors qu'il purgeait, au Bénin, une peine de 32 ans pour sa participation au génocide. Suite à son interpellation, à sa demande et grâce à sa police municipale - à laquelle il souhaite ici rendre hommage - et en parfaite harmonie avec la police nationale, le docteur avait été placé sous écrou extraditionnel. L'on ne peut que se féliciter d'une telle arrestation qui répondait aux voeux formulés par le Président Nicolas Sarkozy en février dernier à Kigali : voir "les responsables du génocide retrouvés et punis, où qu'ils se trouvent". Aussi, au lendemain du sommet Afrique-France, il souhaite l'interroger sur la position précise de la France sur ce dossier du génocide rwandais - qui, rappelons-le, a fait au moins 800 000 morts - et notamment sur la question de la poursuite de ses auteurs sur notre territoire. Il appelle notamment son attention sur le fait que notre cadre légal ne favorise pas l'arrestation, sur notre sol, de personnes recherchées par Interpol mais ne résidant pas en France. Notons qu'une première étape, sensible, vient d'être franchie aujourd'hui avec la décision prise à Versailles du maintien en détention de ce docteur et, à Mamoudzou, du maintien en détention d'un autre génocidaire rwandais présumé. Aussi, alors que le projet de loi visant à adapter le droit pénal français à l'institution de la Cour pénale internationale devrait prochainement venir en discussion à l'Assemblée nationale, il espère que ce texte permettra, enfin, de donner aux juges français une compétence extraterritoriale. Dans cette attente, il l'interroge sur la manière dont la France envisage, à l'avenir, de participer effectivement à la poursuite des génocidaires rwandais, notamment sur son territoire, et plus généralement des criminels internationaux. Enfin il appelle son attention sur son étonnement quant au fait que les corps de ces criminels puissent être rapatriés sur notre sol - comme cela a été le cas à Sannois - pour y être inhumés et ceci sans que le maire, représentant de l'État - en l'occurence lui-même - n'en ait été préalablement informé.
Texte de la REPONSE : Les articles 689 et suivants du code de procédure pénale déterminent les conditions dans lesquelles sont susceptibles d'être poursuivis et jugés par les juridictions françaises les auteurs ou complices d'infractions commises hors du territoire de la République, soit lorsque, conformément aux dispositions du livre Ier du code pénal ou d'un autre texte législatif, la loi française est applicable ou lorsqu'une convention internationale donne compétence aux juridictions françaises pour en connaître. Dans cette dernière hypothèse qui constitue certains des cas de compétence universelle, l'article 689-1 du code de procédure pénale impose que le suspect se trouve sur le territoire national. S'agissant plus spécifiquement des poursuites exercées en France à l'encontre des auteurs présumés du génocide commis au Rwanda en 1994, plusieurs informations judiciaires sont actuellement en cours au tribunal de grande instance de Paris. Les juridictions françaises se trouvent effectivement compétentes pour connaître de ces faits en application des dispositions de la loi du 22 mai 1996. Cette dernière leur reconnaît une compétence universelle spontanée et absolue pour juger les auteurs des faits visés par la résolution 955 du 8 novembre 1994 adoptée par l'ONU ayant créé le tribunal pénal international chargé de juger les personnes présumées responsables d'actes de génocide ou d'autres violations graves du droit international humanitaire commis sur le territoire du Rwanda et, s'agissant des citoyens rwandais, sur le territoire d'États voisins entre le 1er janvier et le 31 décembre 1994. La loi impose cependant, pour admettre la compétence des juridictions françaises, que l'auteur présumé de l'infraction soit trouvé en France. Par ailleurs, s'agissant des personnes recherchées par les autorités rwandaises pour leur participation présumée au génocide, les autorités françaises mettent en oeuvre le processus extraditionnel en procédant à leur arrestation lorsqu'elles sont visées par des demandes d'extradition ou par des demandes d'arrestation provisoire émanant du Rwanda diffusées par le canal Interpol, quand bien même ces personnes ne résideraient pas sur le territoire français mais y seraient découvertes. En effet, la réception de telles demandes par le bureau central national Interpol donne lieu à inscription au fichier des personnes recherchées, ce qui permet de procéder à l'arrestation. Les personnes arrêtées sur ce fondement comparaissent alors devant la chambre de l'instruction, qui rend un avis soit favorable à l'extradition, permettant au gouvernement de prendre un décret accordant l'extradition, soit défavorable, mettant un terme au processus extraditionnel. La question relative aux circonstances dans lesquelles M. Barayagwiza, ancien dirigeant rwandais a pu être inhumé à Sannois ne relève pas de la compétence du garde des sceaux mais de celle du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
UMP 13 REP_PUB Ile-de-France O