FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 82778  de  M.   Cuvillier Frédéric ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Pas-de-Calais ) QE
Ministère interrogé :  Justice et libertés (garde des sceaux)
Ministère attributaire :  Justice et libertés (garde des sceaux)
Question publiée au JO le :  29/06/2010  page :  7174
Réponse publiée au JO le :  28/09/2010  page :  10630
Rubrique :  système pénitentiaire
Tête d'analyse :  établissements
Analyse :  conditions de détention
Texte de la QUESTION : M. Frédéric Cuvillier attire l'attention de Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur le rapport annuel effectué dernièrement par le contrôleur général des lieux de privation de liberté, rendu public le 10 mars 2010. L'auteur constate qu'il existe en milieu carcéral, de manière générale, « une offre de travail faible, insuffisante, peu qualifiée et enfin sous payée ». Rappelant que la loi n° 87-432 du 22 juin 1987 relative au service public pénitentiaire, dite « Chalandon » déclare que « les activités de travail et de formation professionnelle ou générale sont prises en compte pour l'appréciation des gages de réinsertion et de bonne conduite des condamnés », le contrôleur déclarer que cette insuffisance d'activité amène l'administration pénitentiaire à établir un régime de « faveur et de privilégier telle ou telle catégorie » de détenus, générant aujourd'hui, « des situations d'inégalités très fortes ». Aussi, il souhaiterait savoir si elle entend prendre rapidement les mesures qui permettront de remédier au constat effectué par le contrôleur des lieux de privation de liberté à ce sujet.
Texte de la REPONSE : Les activités en détention sont une préoccupation majeure de l'administration pénitentiaire. Ces activités permettent aux personnes détenues d'acquérir une expérience et des compétences professionnelles qui pourront être valorisées à l'issue de leur incarcération, et de disposer d'un pécule propre à aider financièrement leurs familles et à rembourser les éventuelles parties civiles. L'administration pénitentiaire a développé l'offre de travail en détention ; en 2009, le taux d'activité rémunérée dans les établissements pénitentiaires était de 35,7 % de la population écrouée. Elle a élaboré ces dernières années plusieurs stratégies et programmes. Le plus récent est le « plan entreprendre ». Ce Plan national d'action « entreprendre », dont le déploiement en établissements a commencé en début d'année 2008. Il porte sur l'organisation du travail (notamment en termes de facilités d'accès des véhicules de livraison), les infrastructures dédiées au travail, la formation du personnel en relation avec les ateliers, l'alternance travail/formation au service général, et les relations avec les partenaires économiques. Il s'agit donc d'un plan intervenant sur les aspects structurants du fonctionnement des établissements pénitentiaires. Dans la crise économique récente ce plan a permis d'amortir considérablement ses effets, au moyen d'actions volontaristes : mise en place de la journée continue dans de nombreux établissements, création de zones de stockage supplémentaires, promotion du travail pénitentiaire permettant de faire venir de nouvelles entreprises concessionnaires en détention... Outre ce développement quantitatif du travail pénitentiaire, il convient de rappeler que l'administration pénitentiaire adapte en permanence le contenu de l'offre de travail en détention, afin de préparer le plus efficacement possible la réinsertion des personnes incarcérées. Ainsi, elle tient compte de la part prépondérante du secteur tertiaire dans l'économie, et développe en conséquence en détention des activités professionnelles dans ce secteur. Pour autant, il reste nécessaire de maintenir en détention des activités moins qualifiantes, comme par exemple le travail à façon ou le conditionnement, afin de permettre au plus grand nombre de personnes détenues de pouvoir accéder au travail pénitentiaire. En effet, la plupart des personnes incarcérées présentent un niveau scolaire et de qualification assez faible, voire très faible (près d'un quart d'entre elles sont non francophones, illettrées, ou présentent des difficultés majeures de lecture, et près de la moitié d'entre elles ont un niveau de qualification inférieur au CAP/BEP). Ainsi, d'un point de vue qualitatif, l'administration pénitentiaire s'efforce d'offrir un panel d'activités de travail le plus large possible, afin de prendre en compte la diversité de la population carcérale en termes de qualification et de parcours professionnels. L'administration pénitentiaire recherche également à rendre l'accès au travail pénitentiaire le plus égalitaire possible, dans le respect des règles édictées par le code de procédure pénale. Ce dernier prévoit en effet certaines restrictions, par exemple l'article D. 105 précise que les personnes détenues classées au service général sont choisies « de préférence parmi les condamnés n'ayant pas de longues peines à subir », et que les prévenus ne peuvent être désignés « qu'avec l'accord préalable du magistrat saisi du dossier d'information ». De plus, il faut rappeler que l'affectation des personnes détenues à un travail pénitentiaire est décidée par le chef d'établissement, sur avis d'une commission pluridisciplinaire, qui se prononce en fonction de différents critères, prévus par l'article D. 101 du code de procédure pénale. Cet article dispose que « le travail est procuré aux détenus compte tenu du régime pénitentiaire auquel ceux-ci sont soumis, des nécessités du bon fonctionnement des établissements, ainsi que des possibilités locales d'emploi. Dans la mesure du possible, le travail de chaque détenu est choisi en fonction, non seulement de ses capacités physiques et intellectuelles, mais encore de l'influence que ce travail peut exercer sur les perspectives de sa réinsertion. Il est aussi tenu compte de sa situation familiale et de l'existence de parties civiles à indemniser ». La commission pluridisciplinaire doit tenir compte des critères définis par cet article D. 101, et permettre une adéquation entre le profil des personnes détenues et les postes auxquels elles sont susceptibles d'être affectées. Il est prévu à cette fin que soit systématisée en établissements la rédaction de fiches de postes, indiquant pour chaque poste le descriptif des tâches à accomplir et les compétences requises pour les effectuer. Enfin, s'agissant de la rémunération du travail pénitentiaire, la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 prévoit désormais, en son article 32, que la rémunération du travail des personnes détenues ne pourra être inférieure à un taux horaire fixé par décret et indexé sur le SMIC. Le décret d'application, soumis actuellement au Conseil d'État, devrait être publié avant la fin de l'année 2010.
S.R.C. 13 REP_PUB Nord-Pas-de-Calais O