FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 83544  de  M.   Grellier Jean ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Deux-Sèvres ) QE
Ministère interrogé :  Défense et anciens combattants
Ministère attributaire :  Défense et anciens combattants
Question publiée au JO le :  13/07/2010  page :  7742
Réponse publiée au JO le :  23/11/2010  page :  12733
Rubrique :  anciens combattants et victimes de guerre
Tête d'analyse :  internés
Analyse :  Tsiganes. revendications
Texte de la QUESTION : M. Jean Grellier attire l'attention de M. le secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants sur la situation des Tsiganes et gens du voyage. Dans une période de crise où précisément notre sens de la solidarité et de l'accueil constitue le meilleur rempart contre la haine, le racisme et l'exclusion, il importe que notre pays s'honore et entende la juste revendication des Tsiganes de France. Appuyés par des historiens, ils en appellent aux autorités françaises pour reconnaître les persécutions dont ces Français furent victimes dans des camps de 1940 à 1946 et à abolir les discriminations qui les frappent toujours aujourd'hui. L'internement de quelque 6 500 "nomades" français par l'État français pendant la Seconde Guerre mondiale est une réalité que nous devons collectivement assumer. Aussi il lui demande ce qu'il entend mettre en oeuvre pour apporter des réponses concrètes à nos compatriotes.
Texte de la REPONSE : Pour ce qui concerne le droit à réparation, les Tsiganes français peuvent bénéficier des statuts de déporté ou d'interné politique mis en oeuvre par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre. L'article L. 286 de ce code prévoit que le titre de déporté politique est attribué aux Français ou ressortissants français qui ont été transférés par l'ennemi hors du territoire national puis incarcérés ou internés dans une prison ou un camp de concentration dont la liste est limitativement énumérée. Ce titre peut également être attribué aux personnes qui se sont évadées ou sont décédées pendant le trajet vers un camp. L'article L. 288 du même code prévoit, quant à lui, que le titre d'interné politique est attribué, sous réserve d'une durée d'internement minimale de trois mois, à tout Français ou ressortissant français résidant en France ou dans un pays d'outre-mer qui a été interné à partir du 16 juin 1940 par l'ennemi ou l'autorité de fait se disant gouvernement de l'État français. Aucune condition de durée n'est exigée de ceux qui se sont évadés ou qui ont contracté pendant leur internement une maladie ou une infirmité provenant notamment de tortures. Ainsi, les Tsiganes qui remplissent ces conditions peuvent bénéficier de ces statuts qui leur ouvrent ensuite droit, le cas échéant, à une pension au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, en application des dispositions sur les victimes civiles de guerre. Ce droit à pension est également ouvert aux ascendants, aux veuves et aux orphelins de ceux qui sont morts dans les camps ou des suites des mauvais traitements subis. En ce qui concerne plus spécifiquement l'histoire des Tsiganes pendant cette période, il convient de se souvenir que l'interdiction de circulation des nomades prise par le décret du 6 avril 1940 fut radicalisée après l'armistice quand les Allemands, en zone nord et le Gouvernement de Vichy, en zone sud, exigèrent leur regroupement. C'est ainsi que des camps furent ouverts pour les Tsiganes, forains, chemineaux dont le dénominateur commun était de ne pas avoir de domicile fixe. Dans d'autres camps, préexistants, les gens du voyage se trouvèrent mêlés à des réfugiés espagnols, des opposants au gouvernement de la collaboration. L'histoire de ces camps est complexe, la similitude n'existant ni dans leur longévité, de quelques mois à plusieurs années, ni dans les conditions de vie qu'y trouvèrent les internés. Il ressort des dernières études historiques qu'environ 6 000 Tsiganes furent internés en France. Cette mesure eut cependant pour effet paradoxal de les préserver de la déportation et du sort que connurent les Tsiganes dans les autres pays européens. Les seuls à être déportés furent ceux des départements du Nord et du Pas-de-Calais rattachés au gouvernement militaire de Bruxelles. Dans le domaine de la mémoire, la France n'est pas en reste par rapport aux autres pays. Ainsi, de nombreuses initiatives sont, depuis plusieurs années, à l'origine du rappel de l'existence de camps pour les gens du voyage en France. L'ancien camp de Rivesaltes est notamment le lieu d'évènements culturels liés au drame tsigane, avec la prochaine ouverture d'un parcours muséographique. Le ministère de le défense, à travers le direction de la mémoire, du patrimoine et des archives, participe à ces actions de mémoire en contribuant financièrement à la réalisation des expositions, des plaques ou des stèles commémoratives. S'agissant du souhait de voir créer une date de commémoration en hommage aux gens du voyage morts en déportation, la commission de réflexion sur la modernisation des commémorations publiques, présidée par le professeur André Kaspi, a mis en lumière des enjeux importants, parmi lesquels la nécessaire pérennisation de la participation du public aux commémorations et le défi de la transmission aux jeunes générations des valeurs sous-jacentes à ces rassemblements mémoriels. Les conclusions du rapport de cette commission précisent qu'il est nécessaire de veiller à éviter la multiplication du nombre de journées nationales de commémorations. Par ailleurs, dans le cadre du 70e anniversaire de la Seconde Guerre mondiale, le secrétaire d'État a accordé son soutien officiel au programme « 2010, une mémoire française - Les Tsiganes pendant la Seconde Guerre mondiale 1939-1946 », conduit par la Fédération nationale des associations solidaires d'actions avec les Tsiganes et gens du voyage et des associations représentatives. Il a invité ces associations à se joindre à la journée nationale du souvenir des victimes et héros de la déportation, le 25 avril dernier et il a cité le cas Tsigane dans son discours. Le 18 juillet 2010, pour la journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l'État français et d'hommage aux « Justes » de France, les Tsiganes ont été de nouveau associés et leur tragédie spécifique a été publiquement rappelée.
S.R.C. 13 REP_PUB Poitou-Charentes O