Texte de la QUESTION :
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M. Camille de Rocca Serra interpelle M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche sur la reconnaissance des spécificités agricoles corses. D'une part, la Corse a obtenu la définition et la mise en oeuvre du PDRC (programme de développement rural de la Corse) qui sont assurés par l'ODARC mais on applique la conditionnalité du PDRH (programme de développement rural hexagonal) comme dans l'ensemble des régions françaises. D'autre part, la Corse a un territoire montagnard avec un maquis qui a valeur fourragère et des types de races rustiques (chèvre, porc,...) dont l'élevage est extensif. Ces parcours, assimilés à tort par les instances européennes comme relevant de la divagation, ne sont pas reconnus. Pourtant, ils relèvent d'une technique basée sur des pratiques agro-sylvopastorales maîtrisées et héritées des générations antérieures. L'abandon manifeste de ces espaces productifs constitue un danger environnemental dont seront responsables les politiques nationales et communautaires. De surcroît, la non reconnaissance desdits parcours ainsi que l'absence de conditionnalité des aides spécifique à la Corse entraînent souvent un blocage au niveau des financements européens. Ainsi, il souhaiterait savoir si, comme il s'y était engagé, le Gouvernement envisageait de remédier à cette situation pénalisante pour le secteur agricole insulaire et quelle démarche sera initiée pour cela.
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Texte de la REPONSE :
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La conditionnalité est un ensemble d'exigences et de normes qui s'impose à tout bénéficiaire d'aides agricoles financées ou cofinancées par des fonds européens. Cela inclut les aides du premier pilier de la politique agricole commune (PAC) depuis 2005 et certaines aides de développement rural (second pilier de la PAC) depuis 2007. Ce dispositif s'appuie essentiellement sur des réglementations déjà existantes au niveau communautaire et national qui ne peuvent pas, dans un souci de cohérence globale, être adaptées dans le cadre de la conditionnalité. En revanche, les bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE), normes d'entretien des surfaces exploitées relevant de la responsabilité de l'État et définies spécifiquement pour la conditionnalité au niveau national, peuvent faire l'objet d'adaptations départementales (voire infradépartementales) par arrêté préfectoral, comme c'est le cas en Corse, afin de tenir compte de spécificités et pratiques locales. Par ailleurs, lors d'un audit de la Commission européenne relatif à la mise en oeuvre des aides agricoles conduit fin 2009 en France et notamment en Corse, il a été constaté, dans certaines situations, l'absence de correspondance entre des surfaces de maquis déclarées et la réalité de l'utilisation agropastorale de ces surfaces. Cela ne remet pas en cause les pratiques usuelles des agriculteurs corses, et notamment l'usage agropastoral du maquis, mais implique un nécessaire recadrage afin de faire en sorte que les surfaces aidées, que ce soit des aides du premier pilier ou du programme de développement rural de la Corse, soient effectivement et correctement exploitées. Sur la base de ce constat, partagé par l'ensemble des acteurs - État, collectivité territoriale de Corse (CTC) et organisations professionnelles agricoles -, des travaux ont débuté dès le début de l'année 2010. Une première réunion réunissant l'État, la CTC, l'Office de développement agricole de Corse (ODARC), l'Office de l'environnement de Corse (OEC) et l'agence de service et de paiement (ASP) s'est tenue le 14 avril 2010 à Ajaccio. Dans ce cadre, l'OEC a proposé une typologie descriptive des différents types de maquis, dont certains seulement, à condition d'être ouverts et entretenus, ont une vocation pastorale, laquelle peut d'ailleurs différer selon les types de cheptel. Ce document a été validé par l'ensemble des partenaires lors d'une réunion du groupe de travail technique organisée à Corte le 30 juin 2010. Sur cette base technique, il est aisé de préciser les règles de définition des surfaces de maquis pouvant être retenues comme surfaces fourragères, les conditions communément admises étant que leur capacité fourragère soit reconnue et que leur valorisation par des animaux soit réelle. Le règlement de la commission fait un lien direct entre surface fourragère et présence de strate herbacée. Les services du ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche considèrent néanmoins qu'il peut être envisagé, sur des bases techniques solides, de mener des discussions visant à faire reconnaître le caractère réellement fourrager de certaines surfaces de maquis ne comportant que peu ou pas de strate herbacée, contexte pouvant se retrouver dans beaucoup de zones méditerranéennes de l'Europe. Par ailleurs, dans l'objectif de garantir la correspondance entre surfaces déclarées et surfaces utilisées, les services locaux de l'État ont préparé des propositions de travail pouvant servir de base aux discussions avec les professionnels, notamment lors de la réunion de la commission territoriale d'orientation de l'agriculture (CTOA) du 21 juillet 2010. Cette réunion a permis de dégager un consensus sur la nécessité de réviser les modalités de déclaration des surfaces de maquis qui ne satisfont actuellement personne, que ce soit par les modalités de prise en compte de ces surfaces ou par l'absence de correspondance entre surfaces déclarées et surfaces réellement exploitées. Les travaux doivent donc se poursuivre en ce sens. Les services de l'État sont fortement impliqués dans l'organisation et le suivi de ces travaux et restent à la disposition des organisations professionnelles agricoles et de la CTC, afin qu'ils puissent aboutir et que la prochaine campagne d'aides en 2011 se déroule sur la base de règles rénovées et satisfaisantes pour l'ensemble des acteurs.
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