Texte de la QUESTION :
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M. Gilbert Le Bris attire l'attention de M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique sur le recours par certaines entreprises françaises, particulièrement du secteur de l'agroalimentaire, à des sociétés intérimaires étrangères. Cela a des conséquences, notamment concernant l'emploi en France et la question des cotisations dans le système de retraites. Ces entreprises ne payant pas de charges sociales sur ces contrats, elles préfèrent recruter, à compétence égale, une main-d'oeuvre étrangère et bon marché. Ainsi, elles ne participent pas à la redynamisation de l'emploi en France et ne cotisent pas au système de financement des retraites. Face à ces pratiques, il souhaite connaître l'avis du Gouvernement et les mesures qui peuvent être envisagées pour limiter de telles pratiques.
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Texte de la REPONSE :
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Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative aux conditions d'intervention en France d'entreprises de travail temporaire étrangères auprès d'entreprises utilisatrices françaises. Il convient tout d'abord de rappeler que le code du travail encadre strictement les conditions d'intervention en France des entreprises de travail temporaire établies hors de France, conformément aux dispositions de la directive européenne 1996/71/CE du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services. En effet, la mise à disposition de salariés intérimaires par une entreprise de travail temporaire établie hors de France auprès d'une entreprise utilisatrice en France est un des quatre cas de détachement définis par le code du travail (art. L. 1262-2). À ce titre, le code du travail prévoit l'obligation pour les entreprises de travail temporaire établies hors de France d'être régulièrement immatriculées en tant que telles dans leur pays d'établissement et d'y exercer une activité significative. Elles doivent en outre justifier d'une garantie financière, afin d'assurer le paiement aux salariés détachés de l'intégralité des salaires dus pendant leur période de détachement. Les entreprises de travail temporaire établies hors de France sont également tenues de respecter à l'égard des salariés détachés en France l'ensemble des règles du code du travail relatives au travail temporaire. Ainsi s'appliquent notamment les règles françaises relatives à la durée des missions, aux cas de recours à l'intérim, à l'élaboration du contrat de mise à disposition et du contrat de mission, et aux droits individuels des salariés en matière de conditions de travail (durée du travail, travail de nuit, repos hebdomadaire, jours fériés, sécurité et hygiène sur les lieux de travail) et de rémunération (les salariés mis à disposition doivent ainsi percevoir une rémunération au moins égale à celle que percevrait, après période d'essai, un salarié de l'entreprise utilisatrice de qualification équivalente et occupant le même poste de travail). Concernant les formalités à accomplir, les entreprises de travail temporaire établies hors de France doivent transmettre une déclaration préalable à l'inspection du travail du lieu d'exécution de la mission du salarié détaché. Par ailleurs, le code du travail (art. D. 8222-7) prévoit l'obligation pour l'entreprise utilisatrice, en sa qualité de donneur d'ordre en France, de se faire remettre par l'entreprise étrangère un certain nombre de documents préalablement à la conclusion du contrat de mise à disposition (dès lors qu'il porte sur un montant au moins égal à 3000 euros). La responsabilité solidaire de l'entreprise utilisatrice pourra être engagée s'il est prouvé qu'elle n'a pas accompli ces formalités et qu'un procès verbal pour travail dissimulé est relevé à l'encontre de l'entreprise de travail temporaire étrangère (art. L. 8222-2 du code du travail). En matière de sécurité sociale, je vous précise que le règlement communautaire 883/2004 permet, sous certaines conditions, de limiter les changements de législation applicable pour de courtes périodes de détachement, en prévoyant le maintien de la législation de l'État d'envoi. Ainsi, en application de ce règlement, les entreprises de travail temporaires établies hors de France peuvent légalement rester affiliées dans leur État d'établissement et y verser des cotisations sociales pendant la période de mise à disposition de leurs salariés auprès d'entreprises françaises. Pour la bonne application de ces règles dans un contexte de circulation accrue des travailleurs au sein de l'Union européenne, et compte tenu des pratiques fréquentes de contournement du droit par certaines entreprises (entreprises « boîte aux lettres », par exemple) constatées par les services de contrôle, le ministère chargé du travail a retenu la « lutte contre les fraudes au détachement dans le cadre de prestations de services transnationales » comme l'un des axes prioritaires du dernier Plan national de lutte contre le travail illégal. Ce plan encourage notamment l'organisation d'actions de contrôles conjoints, associant les différents services en charge de la lutte contre le travail illégal (inspection du travail, gendarmerie/police, organismes de recouvrement). Enfin, afin de permettre le jeu de la libre prestation de services des entreprises dans un climat de concurrence loyale, tout en garantissant aux travailleurs détachés des conditions de travail et d'emploi conformes, le ministère chargé du travail privilégie deux axes d'action en vue du renforcement de l'effectivité des règles du détachement : d'une part la mise à disposition, à l'attention de l'ensemble des acteurs du détachement, d'une information précise, accessible et adaptée à leur situation, et d'autre part le renforcement de la coopération administrative entre États.
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