FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 88356  de  M.   Mallot Jean ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Allier ) QE
Ministère interrogé :  Jeunesse et solidarités actives
Ministère attributaire :  Solidarités et cohésion sociale
Question publiée au JO le :  14/09/2010  page :  9890
Réponse publiée au JO le :  21/12/2010  page :  13819
Date de signalisat° :  14/12/2010 Date de changement d'attribution :  14/11/2010
Rubrique :  politique sociale
Tête d'analyse :  RSA
Analyse :  mise en oeuvre. bilan
Texte de la QUESTION : M. Jean Mallot attire l'attention de M. le ministre de la jeunesse et des solidarités actives sur les difficultés que rencontrent certains bénéficiaires du RSA. Compléter les revenus du travail pour ceux qui en ont besoin et encourager l'activité professionnelle étaient, entre autres, les objectifs annoncés du RSA. Or nous constatons que des personnes pour qui le RSA est un complément de ressources se trouvent pénalisées par le passage du RMI au RSA. En effet, certaines d'entre elles bénéficiaient d'aides qu'elles ne peuvent désormais plus percevoir ou qui ont fortement baissé. Cela concerne principalement la CMU, l'APL ou la tarification sociale pour le gaz, l'électricité ou le téléphone. De plus, ces personnes qui étaient souvent exonérées de la taxe d'habitation doivent aujourd'hui s'en acquitter. Cette situation nouvelle plonge ces salariés, économiquement fragiles, dans une grande précarité, aux antipodes des objectifs affichés du RSA. Aussi, il aimerait savoir si des mesures seront prises afin de remédier à ces difficultés. De façon plus générale, l'extrême complexité du dispositif rend la tâche des conseillers CAF beaucoup plus difficile, tant dans l'application de la réglementation, pour le calcul des droits, que dans le contact avec un public soucieux de comprendre et d'anticiper l'évolution de ses droits. Il lui demande donc quelles solutions il entend apporter pour remédier aux effets négatifs de cette réforme.
Texte de la REPONSE : Les aides de toute nature accordées sous seule condition de statut d'allocataire de minima sociaux constituent des droits dits « connexes », ouverts aux bénéficiaires du revenu minimum (RMI) ou de l'allocation pour parent isolé (API). Il s'agit d'aides monétaires, aides quasi-monétaires (bons d'achat par exemple), aides en nature (colis alimentaires par exemple), aides tarifaires ou droits connexes indirects (exonérations, dégrèvements). Il existe deux grandes catégories de droits connexes : les droits connexes nationaux alloués par l'État ou les grandes entreprises de réseau (dégrèvement de la taxe d'habitation, exonération de la redevance audiovisuelle, prime de Noël, tarifs spéciaux sur certains services publics...) ; les droits connexes locaux constitués d'aides financières des collectivités et organismes sociaux. Ces nombreuses aides sociales locales accordées par les départements, les communes, les régions, les caisses d'allocations familiales remplissent des objectifs variés : restauration scolaire, centre de loisir, aide aux vacances, prise en charge d'impayés, aide au transport et à la mobilité, tarifs sociaux des équipements collectifs (piscine, musée...). Partant du constat que ces droits, très dégressifs avec les ressources des ménages, et rapidement perdus lors d'un retour à l'emploi, pénalisaient leurs bénéficiaires, la généralisation du revenu de solidarité active a impliqué une large réflexion afin de circonscrire au maximum ces pratiques. La refonte globale des dispositifs attachés aux droits auxquels se substitue le revenu de solidarité active (RSA), c'est-à-dire les aides attachées au ex-RMI et à l'ex-API, vise donc la suppression ou l'atténuation des effets de seuil, régulièrement dénoncés comme pénalisant pour les salariés modestes lorsqu'ils reprennent un emploi. Ainsi, s'agissant des droits connexes nationaux, ils ont été réformés dans le cadre de la mise en place du RSA, afin de ne plus être alloués par référence à la situation statutaire des allocataires du RSA, mais par référence à un niveau de ressources. Dorénavant, toutes les personnes ayant un niveau de ressources inférieur à un seuil fixé, dès lors qu'elles remplissent les autres conditions d'éligibilité à un dispositif, y ont droit, indépendamment de leur statut. Les droits des bénéficiaires sont donc ajustés à la situation de leurs revenus. Ces réformes s'accompagnent néanmoins d'un principe protecteur : le RSA n'est jamais pris en compte dans les ressources des bénéficiaires, ni en matière fiscale, ni en matière sociale. On s'assure de la sorte de maintenir les droits de ceux des bénéficiaires les plus vulnérables, cependant que les bénéficiaires en reprise d'emploi seront placés dans la même situation que les travailleurs modestes. Au plan national, plusieurs droits connexes ont fait l'objet d'une réforme, notamment ans le cadre de la loi du 1er décembre 2008 et de son premier décret d'application du 15 avril 2009 (décret n° 2009-404 du 15 avril 2009 relatif au revenu de solidarité active). D'autres dispositions décrétales, relatives notamment aux aides au logement (décret n° 2009-976 du 20 août 2009 relatif aux ressources prises en compte pour le calcul du droit aux prestations familiales et aux allocations de logement) et au tarif social téléphonique (décret n° 2009-716 du 18 juin 2009 relatif aux traitements automatisés de données à caractère personnel accompagnant la mise en oeuvre du RSA et portant diverses dispositions de coordination) ont permis de poursuivre cette réforme. Concernant la taxe d'habitation, les allocataires du RMI bénéficiaient d'un dégrèvement total de taxe d'habitation, quel que soit leur niveau de revenu. Ce droit était prolongé un an après leur sortie du RMI. Désormais, les bénéficiaires du RSA bénéficient, au même titre que les autres contribuables, d'un plafonnement de leur cotisation en fonction de leur revenu fiscal de référence, en application du régime de droit commun (régime défini à l'article 1414 A du code général des impôts [CGI]). Cette mesure qui subordonne l'octroi de l'allègement de TH au montant du revenu fiscal de référence a été renforcée. (Auparavant, les contribuables même sans revenu devaient payer une taxe dès lors que les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale avaient augmenté leur taux d'imposition.) Ainsi, ce dispositif peut conduire jusqu'au dégrèvement total de la taxe ablation mise à la charge des contribuables dont le niveau de revenu est proche de celui d'un RMIste. En pratique, les personnes dépourvues de ressources se voient comme aujourd'hui octroyer une exonération totale. Les autres paient en proportion de leurs ressources. À ce titre, il convient de souligner que le gain lié à la perception du RSA reste toujours supérieur au montant de la taxe d'habitation mise à la charge du bénéficiaire du RSA. Afin de prendre en compte la situation des ménages anciennement bénéficiaires du RMI dont le revenu fiscal n'est pas nul, et donc susceptibles de se voir réclamer le paiement de la taxe d'habitation, des consignes permanentes sont données aux services des impôts pour que les demandes gracieuses émanant de ces redevables en situation difficile soient examinées avec bienveillance. Concernant la redevance audio-visuelle, le dégrèvement total de la taxe d'habitation s'accompagnait d'un dégrèvement de la redevance audio-visuelle pour les bénéficiaires du RMI. À l'instar de la solution retenue pour la taxe d'habitation, les bénéficiaires du RSA dont le revenu fiscal de référence est nul sont désormais exonérés de la redevance audiovisuelle. Enfin, s'agissant des droits connexes locaux, l'article 13 de la loi du 1er décembre 2008 (dispositions nouvelles de l'article L. 1111-5 du code général des collectivités territoriales) invite les collectivités territoriales et les organismes chargés de la gestion d'un service public à veiller à ce que les conditions d'attribution d'aides ou avantages n'entraînent pas de discrimination à l'égard de personnes placées dans la même situation, notamment au regard du niveau de leurs ressources. Or, la connaissance de ces aides est actuellement très fragmentaire. Si aucune évaluation précise de l'impact pour les finances publiques ne peut être à ce jour réalisée, la simple substitution du critère du RSA à la référence au RMI ne pouvait se faire automatiquement. C'est pourquoi, dans le strict respect de l'articulation des principes de libre administration des collectivités locales et d'égalité entre les citoyens, il apparaissait nécessaire, notamment pour des raisons financières, de réexaminer les conditions d'attribution de ces aides facultatives. C'est cette analyse qui est au coeur du rapport de la « mission parlementaire sur les droits connexes locaux dans le cadre de la généralisation du RSA », rendu en mai 2009 par la sénatrice Sylvie Desmarescaux. C'est pour prendre la mesure de ces constats et donner suite aux conclusions de ce rapport, qu'un « guide des droits connexes locaux », outil d'aide à la décision pour aider les institutions à ajuster les politiques sociales locales après la mise en place du RSA, réalisé par le haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, a été diffusé à l'ensemble des décideurs locaux en juillet 2009. Il préconise ainsi une réforme des aides sociales de façon à optimiser leurs effets pour les usagers, c'est-à-dire en réduisant les effets de seuil, sans faire de perdants tout en maintenant l'effort de solidarité. Une des options ainsi proposées aux collectivités est de retenir, pour l'attribution des aides, un barème associant plusieurs tranches de ressources permettant de lisser progressivement la sortie des aides avec l'élévation du niveau de revenu des familles. C'est également dans cet esprit qu'a été signée une déclaration commune sur les critères d'attribution des aides facultatives à caractère social par huit institutions (ADF, AMF, ARF, Cnaf, Cnamts, MSA, Pôle emploi et Uncass). Parmi les principes énoncés par ce texte figure notamment l'effort à faire pour que ces aides « ne désincitent pas à la reprise ou à l'exercice d'une activité professionnelle par les bénéficiaires de ces dispositifs ». Transformer les aides locales sous conditions de statut en aides sous condition de ressources vise donc un objectif de cohérence avec les réformes au niveau national. En effet, une étude récente « Aides sociales locales, revenu de solidarité active et gain de retour à l'emploi » du 26 août 2010, de Denis Anne et Yannick L'Horty, qui s'attache à évaluer les effets de la mise en oeuvre du RSA en substitution du RMI et de l'API, souligne que « le RSA rend le retour à l'emploi rémunérateur dans la quasi-totalité des villes et des configurations familiales, ce que ne permet pas le RMI même si l'on prend en compte l'intéressement ». Mais l'étude rappelle que les ajustements éventuels de l'offre locale d'aides sociales dans le nouveau contexte du RSA sont susceptibles de limiter ces effets positifs. Enfin, dans le cadre des travaux du comité d'évaluation du RSA, notamment chargée de préparer la conférence nationale prévue à l'article 32 de la loi du 1er décembre 2008, une étude sera conduite pour réaliser le recensement de l'ensemble des droits connexes locaux versés par les communes et intercommunalités ayant compétence en matière sociale de plus de 20 000 habitants. L'étude sera réalisée avec l'Association des maires de France. Elle vise à recenser l'ensemble des aides existantes, leurs barèmes et conditions d'octroi. Elle sera réalisée en deux vagues, début 2010 et 2011 afin de mesurer une éventuelle évolution, en particulier la substitution de conditions de revenus à des conditions de statut. S'agissant plus globalement de la complexité du dispositif que vous soulignez, le chantier de simplification du RSA a été lancé en juin 2010. À l'issue de nombreuses réunions de concertation, 10 mesures et 3 axes de travail ont été identifiés. En premier lieu, améliorer l'accès des publics cibles à l'information sur le dispositif, en s'appuyant notamment sur les prescripteurs, faciliter les démarches quotidiennes et simplifier les documents et les notices d'information. En outre, le deuxième axe vise à améliorer et simplifier le pilotage du dispositif, notamment en fluidifiant le dialogue entre les différents acteurs intervenant dans la prise en charge des bénéficiaires potentiels et réels du RSA. Enfin, en troisième lieu, l'objectif est de faire du RSA un outil clé de l'insertion professionnelle.
S.R.C. 13 REP_PUB Auvergne O