Texte de la QUESTION :
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Mme Isabelle Vasseur attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur les évolutions de la gestion du réseau Natura 2000 dans le département de l'Aisne. Les représentants de la Chambre d'agriculture de l'Aisne, de l'Union des syndicats agricoles de l'Aisne et des « jeunes agriculteurs de l'Aisne » s'opposent en effet au projet d'étendre les incidences de protection des zones Natura 2000 à une liste de communes complémentaires dite « première liste locale » puis à une liste locale d'activités, qui pourrait contraindre fortement le développement économique des exploitations agricoles des communes concernées. Si la Cour de justice de l'Union européenne a récemment rendu un arrêt dans le cadre d'une procédure en manquement engagée par la Commission européenne à l'encontre de la France, jugeant non conforme la transposition en droit interne de l'article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992, dite « habitats, faune, flore », rien, dans cette décision, ne stipulait une extension des périmètres Natura 2000, actuellement de 30 000 hectares dans l'Aisne. Si elles devaient être confirmées, ces propositions auraient des conséquences particulièrement néfastes pour l'avenir des activités agricoles et forestières du département de l'Aisne, compte tenu des nombreuses restrictions qui pourraient être appliquées : sur les constructions des bâtiments, le stockage des déchets et des effluents, le retournement des prairies etc... Aussi, les acteurs du monde agricole de l'Aisne demandent que ces périmètres soient revus et qu'ils se limitent, sauf cas particuliers, aux sites Natura 2000 existants. Elle souhaiterait connaître l'avis du Gouvernement sur ces revendications.
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Texte de la REPONSE :
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La mise en oeuvre au niveau local du régime de l'évaluation des incidences Natura 2000 résulte de la nouvelle transposition de l'article 6 de la directive 92143/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels, de la faune et de la flore sauvages. En effet, la Cour de justice de l'Union européenne a rendu, dans le cadre d'une procédure en manquement engagée par la Commission européenne à l'encontre de la France, un arrêt jugeant non conforme la transposition en droit interne de l'article 6, paragraphes 2 et 3 de la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992, dite « habitats, faune, flore ». Des mesures législatives et réglementaires se sont imposées pour exécuter cette décision, notamment sur le régime d'évaluation appropriée des incidences des plans et des projets. Le législateur a prévu que ce régime d'évaluation, visant à vérifier l'absence d'impact des plans et projets sur les sites Natura 2000, s'exerce sur le fondement d'une liste nationale et de deux listes arrêtées par le préfet qui regroupent les activités devant être évaluées. La liste nationale, désormais fixée à l'article R. 414-19 du code de l'environnement, intègre les activités qui sont susceptibles de produire des effets significatifs sur l'ensemble des sites Natura 2000 du territoire métropolitain. Les listes locales ont, elles, vocation à prendre en considération, au plus près du terrain, les menaces pouvant porter atteinte aux sites Natura 2000 d'un département. La loi dispose également que les listes locales précisent si l'évaluation des incidences Natura 2000 s'applique « dans le périmètre d'un ou plusieurs sites Natura 2000 ou sur tout ou partie du territoire départemental ». En effet, une limitation de l'évaluation des incidences au seul périmètre des sites Natura 2000 ne peut garantir qu'un projet devant être réalisé à l'extérieur ne serait pas générateur d'effets défavorables à l'encontre des habitats naturels, espèces végétales et animales ayant justifié la désignation du site. C'est pourquoi il est légitime d'évaluer les incidences de projets « hors sites ». Il est précisé que les arrêtés fixant les listes locales ne peuvent procéder à des extensions de sites, mais disposent néanmoins de la faculté d'instituer des zonages dans lesquels certaines activités sont soumises à l'évaluation des incidences. En revanche, évaluer ne signifie aucunement interdire et la majorité des activités projetées à l'extérieur des sites n'aura sans doute pas d'impact significatif sur les objectifs de conservation des sites. Aussi, le décret n° 2010-365 du 9 avril 2010 a prévu, d'une part, que l'évaluation soit proportionnelle à l'envergure du projet et que, d'autre part, des niveaux distincts d'exigences permettent de fournir les informations strictement nécessaires. Ainsi, une évaluation des incidences Natura 2000 peut se résumer à situer l'emplacement de l'activité sur une carte, la décrire succinctement et expliquer les raisons pour lesquelles elle n'aura pas d'effet sur le site le plus proche en raison, par exemple, de la distance ou de la faible importance du projet. Il est précisé que les arrêtés préfectoraux fixant les listes locales n'occasionnent aucune extension des sites Natura 2000 qui ne peuvent légalement être étendus que par arrêté ministériel. Cependant, les listes locales peuvent instituer des zonages dans lesquels certaines activités sont soumises à l'évaluation de leurs incidences. Ces zonages, pour les raisons exposées précédemment, peuvent excéder la superficie des sites Natura 2000. En fait, l'évaluation des incidences Natura 2000 ne vise en aucune manière à freiner le développement économique des exploitations agricoles, mais bien à responsabiliser les différents acteurs dès la conception d'un projet en intégrant la préservation de la biodiversité. Si cette préoccupation est prise en compte dès l'amont d'un projet, l'évaluation de ses incidences devient une simple formalité. Lorsque les habitats naturels, les espèces végétales et animales protégés dans les sites Natura 2000, et plus généralement les intérêts environnementaux seront systématiquement considérés comme un paramètre à part entière dans les activités humaines, le développement pourra véritablement être qualifié de durable.
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