Texte de la QUESTION :
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M. Jean-Christophe Cambadélis interroge M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur quelques faits marquants en matière de santé mondiale et de l'aide publique qui lui est allouée en France et en Europe : 25 millions de femmes n'ont pas accès aux services des plannings familiaux et ni les moyens de décider librement du nombre d'enfants qu'elles ont. Chaque année plus de 358 000 d'entre elles meurent en donnant la vie. La grossesse représente encore, dans beaucoup de pays en développement, un risque majeur pour la santé des femmes en âge de procréer. Ce sont pourtant des droits qui leur ont été reconnus lors de la Conférence internationale sur la population et le développement (ICPD) tenue au Caire en 1994. 2010 marque un moment crucial, alors qu'il reste cinq ans seulement avant l'échéance fixée par la communauté internationale pour atteindre les 8 objectifs du millénaire pour le développement (OMD). 55 milliards de dollars sont toujours nécessaires pour diminuer à l'horizon 2015 la mortalité maternelle de 70 %, la mortalité infantile de 40 % et des avortements non sécurisés de 73 %. Les pays donateurs devront contribuer à combler ce manque, et utiliser leur influence politique pour s'assurer que les pays partenaires, récipiendaires de l'aide, participent à cet effort au titre de leurs propres engagements. Les contributions des États membres de l'Union européenne demeurent en deçà de l'objectif européen qui voulait fixer l'APD à 0,56 % de leurs PIB nationaux. Cet écart entre les engagements des États membres et leurs propres contributions s'élève à 18,4 milliards d'euros annuels pour l'Europe, 200 millions en ce qui concerne la France. Seuls 13 % de l'aide publique au développement (APD) mondiale sont alloués à la santé des populations des pays en développement. Pourtant, l'APD santé est cruciale pour la réalisation des OMD 4, 5 et 6 visant la lutte contre la mortalité infantile, maternelle et la lutte contre le VIH-sida, le paludisme et les autres maladies. Les femmes pauvres des pays en développement continuent de payer le prix fort des mesures d'austérité des pays donateurs européens. L'Europe est quasi absente du financement des services du planning familial. Les contributions pour la santé sexuelle et reproductive demeurent consacrées à 75 % à la lutte contre les maladies sexuellement transmissibles et le VIH-sida, alors que les OMD sur la santé maternelle et infantile n'ont été financés respectivement qu'à la hauteur de 3 % et 5 % de l'APD santé. Il est pourtant reconnu que ces objectifs accusent le retard le plus alarmant dans la réalisation des OMD. Par ailleurs, un investissement ambitieux en matière de prévention pourrait diminuer de 70 % le poids financier de la santé sur le long terme. En ce qui concerne la France, les montants d'APD alloués au secteur de la santé s'élèvent en 2010 à 1 036 millions d'euros. Ils ne représentaient en 2009 que 11,6 % (APD santé plus Unitaid) de l'APD ce qui correspond à 0,053 % du revenu national brut (RNB) et devraient descendre à 0,047 % du RNB en 2010. La France est donc loin d'être un contributeur majeur de l'assistance aux populations. On constate depuis 2007 une tendance de la part de la santé dans l'APD. Il est essentiel que le Gouvernement maintienne la santé parmi les secteurs prioritaires de la politique de coopération française. Si l'on retire les dépenses ne participant pas au développement sanitaire des pays en développement, l'aide française à la santé mondiale ne s'élevait en 2009 qu'à 0,043 % du RNB, soit 947 millions d'euros, une contribution insuffisante au regard des besoins. Il revient à la France, membre du G 8, d'assumer une part non négligeable de cet effort collectif. Elle s'y est engagée à de multiples reprises, comme au sommet des Nations-unies sur les OMD où le chef de l'État a promis de mobiliser 500 millions d'euros supplémentaires au cours des cinq années à venir pour la lutte contre la mortalité maternelle et infantile. Il a par ailleurs précisé que la France augmenterait de 20 % sa contribution au fond mondial de lutte contre le VIH-sida, le paludisme et la tuberculose sur la période 2011-2013. Si les engagements français sont répercutés dans la loi de finances de 2011 et que ces fonds sont véritablement additionnels, le budget APD santé devrait augmenter de 130 millions d'euros jusqu'en 2013, un sursaut qui surviendrait après des années de sous-investissement dans la santé dans les pays en développement. Il souhaite connaître la suite donnée aux engagements du chef de l'État sur ces questions.
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Texte de la REPONSE :
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La France a consacré en 2010 plus de 12 % de son aide publique au développement à la santé dans les pays en développement, soit 1046 Meuros et 0,05 % de la richesse nationale. 72 % de ces interventions sont affectés à des actions dans un cadre multilatéral, prépondérant depuis 2004. Les contributions à UNITAID, depuis 2008 y sont incluses, suivant ainsi la recommandation du Comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE. La croissance de l'APD française en matière de santé, multipliée par quatre depuis l'année 2000, se traduit par une importante implication dans les trois grandes initiatives globales actuelles, en particulier le Fonds mondial, l'Alliance GAVI, et UNITAID. La France vient d'annoncer une augmentation de 20 % au Fonds mondial, portant son financement à 360 Meuros par an, pour le triennium 2011-2012 et vient de s'engager auprès de l'UNITAID, de façon pluriannuelle (avec 110 Meuros garantis par an). Ces décisions traduisent un engagement politique clair, porté au plus haut niveau de l'État, de participer pleinement aux efforts coordonnés de la communauté internationale, en vue de la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) en santé. Le niveau des dépenses de santé dans les pays en développement reste toutefois insuffisant pour relever les défis auxquels ces pays sont confrontés, compte tenu de la persistance des grandes pandémies, de la mortalité liée aux maladies chroniques et de la faiblesse structurelle de leurs systèmes de santé. La part des dépenses médicales assumées directement par les ménages est élevée dans la plupart des PED, avec une contribution proportionnelle plus importante pour les bas revenus, ce qui conduit à l'exclusion du système de santé des plus pauvres. Aussi, la France considère-t-elle que l'accès universel aux soins passe également par la mise en place de mécanismes de protection sociale en santé qui permettrait d'assurer une protection efficace et durable contre le risque maladie. En parallèle, le renforcement des ressources humaines dans le domaine médical constitue un élément clé de l'appui aux systèmes de santé. Pour toutes ces raisons, la France apporte, au sein de l'OMS, tout son soutien à l'initiative « Providing for health » (initiative mondiale pour la protection sociale en santé) et à l'alliance pour les ressources humaines dans ce domaine. En outre, la formation nécessite une mobilisation générale, à laquelle participent conjointement le MAEE (pour l'enseignement supérieur) et l'AFD (pour les formations non médicales). Il convient notamment d'actualiser les programmes de formation afin de les adapter aux réalités des pays. Les appuis à la modernisation des établissements de formation médicale et paramédicale accompagneront, lorsqu'ils sont indispensables, nos différentes interventions. Faire de la formation une priorité renforcée suppose également la modification progressive des modalités de coopération technique pour privilégier la formation de formateurs, les professionnels de l'encadrement administratif, technique et paramédical. L'aide bilatérale centre ses interventions en complément de celles de l'aide multilatérale française, en visant des domaines où les effets de levier sont possibles (cofinancements avec les bailleurs européens, partenariats publics-privés, etc.). L'efficacité de l'aide financière des grands fonds verticaux se trouve en effet limitée si elle n'est pas accompagnée sur le terrain de l'aide bilatérale. Il s'agit en particulier du renforcement des capacités de gestion locale par la mobilisation de notre expertise en complément des engagements multilatéraux (coopération bi-/multi). La part de nos actions bilatérales dans le domaine de la santé est de 28 % en 2010, soit 252 Meuros (projets du Fonds de solidarité prioritaire et projets portés par l'AFD, le Groupement d'intérêt public (GIP), ESTHER, assistance technique, initiative additionnelle de réduction de la dette, contrats de désendettement et de développement, soutien aux ONG, appui à la recherche contre le Sida). Dans ce contexte, la santé de la femme et de l'enfant reste une préoccupation majeure en matière de développement. Dans le cadre de sa présidence du G8, la France présidera les groupes chargés de la santé et la redevabilité des engagements de Muskoka pour les contributions complémentaires - 500 euros sur cinq ans pour la France - en matière de santé maternelle et infantile. Enfin, marque de son intérêt sur le sujet, la France siège depuis peu au conseil d'administration du partenariat pour la santé de la mère, du nouveau-né et de l'enfant.
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