Texte de la QUESTION :
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M. Philippe Tourtelier attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme sur le problème de la subordination de vente (vente liée) des ordinateurs et de logiciels préinstallés. En effet, alors qu'il a saisi le Gouvernement de ce problème, il y a près de trois ans (QE n° 53 733 du 21/12/2004), la situation n'a toujours pas évolué pour le consommateur. Si, notamment par la réponse apportée en février 2005, des avancées existent, dans les faits, rien n'est fait. Il est toujours quasiment impossible aujourd'hui de se procurer un ordinateur chez un distributeur de matériel informatique ou dans une grande surface, sans que celui-ci soit livré avec des logiciels préinstallés, et notamment le système d'exploitation dominant très largement le marché du logiciel. Il renvoie également M. le secrétaire d'État à la réponse à sa propre question (n° 60590), lorsqu'il était encore député, en août 2005. Le problème est double : non seulement le consommateur ne peut pas, à l'achat, renoncer à ces logiciels que les revendeurs refusent de désinstaller ou de déduire, mais en outre leur prix n'est même pas affiché, de sorte que le consommateur ne sait pas combien il a payé pour son matériel, et combien pour les logiciels qu'il est tenu (forcé) d'acheter. Enfin, les logiciels préinstallés sur les ordinateurs neufs sont soumis à des licences en principe très restrictives par rapport à la version du logiciel commercialisé seul. Or aucune information n'est disponible dans les magasins au sujet de ces restrictions d'utilisation. Les fabricants de matériel informatique et les revendeurs manquent à leurs obligations au regard du code de la consommation. L'article L. 122-1 de ce code dispose clairement que la subordination de vente (vente forcée) est interdite, l'article L. 113-3 impose aux vendeurs de communiquer aux consommateurs les prix, et l'article L. 111-1 leur donne un devoir d'information sur les caractéristiques essentielles du bien ou service vendu. Les fabricants, en ne fournissant aux revendeurs aucun ordinateur sans logiciels préinstallés, et en ne leur communiquant pas les prix desdits logiciels, participent à cette violation du code de la consommation. Les conséquences sont d'abord des prix artificiellement hauts pour les consommateurs, qui pâtissent directement de la situation. C'est aussi une fermeture du marché à toute concurrence en matière de systèmes d'exploitation, alors que d'autres éditeurs de systèmes d'exploitation proposent des alternatives réelles pour le grand public. Il déplore la contradiction entre la volonté gouvernementale de créer de la richesse et des emplois et ce verrouillage du marché qui touche des dizaines d'entreprises innovantes. Il ne comprend pas non plus comment le Gouvernement peut afficher une lutte pour le pouvoir d'achat des ménages et cette violation de la loi en faveur des consommateurs, notamment en termes de diversité, de qualité et de prix du matériel informatique et des logiciels. La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a commencé - tardivement - à organiser des tables rondes pour faire avancer la situation. Une première table ronde réunissant les représentants de consommateurs a eu lieu en décembre 2006, puis une seconde réunissant fabricants et distributeurs en janvier 2007. La table ronde de synthèse qui aurait dû réunir l'ensemble des acteurs précédemment reçus, et déboucher sur des solutions concertées, n'a depuis jamais été programmée. C'est pourquoi, à l'approche de la période de forte consommation que sont les fêtes de fin d'année, il lui demande de lui indiquer les mesures qu'il compte prendre - notamment au niveau de la DGCCRF - pour faire cesser ces abus, rendre aux consommateurs leur droit à l'information sur les prix et les restrictions liées aux logiciels préinstallés, et leur permettre de choisir librement et à moindre coût leur équipement informatique.
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Texte de la REPONSE :
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Les fabricants et distributeurs de micro-ordinateurs proposent aux consommateurs des offres de vente composées le plus souvent d'une machine avec différents logiciels préinstallés, dont le système d'exploitation. Or, depuis plusieurs années, l'administration constate une évolution significative de la demande des consommateurs en matière de micro-informatique. L'étude du mode de commercialisation des micro-ordinateurs montre en effet qu'il comporte des avantages mais aussi des inconvénients pour les consommateurs. D'une part, l'offre commerciale de produits groupés peut présenter un intérêt pour le consommateur non spécialiste. Dans le cas d'un premier achat, par exemple, la mise en route de l'ordinateur ne nécessite qu'un minimum de connaissances et de manipulations. Mais, d'autre part, on observe que les consommateurs maîtrisent de mieux en mieux les technologies informatiques et expriment de façon croissante le souhait de pouvoir choisir les caractéristiques essentielles de leur équipement, dont le système d'exploitation. En outre, pour le consommateur qui estime ne pas avoir l'usage des logiciels préinstallés, le mode actuel de commercialisation peut constituer un facteur de renchérissement du coût du micro-ordinateur. Il est également probable que l'affichage individualisé du prix du logiciel et du matériel favoriserait la prise de conscience, par un plus grand nombre de consommateurs, du caractère distinct du logiciel et du matériel et de la possibilité de faire jouer la concurrence sur chacun des éléments constituant un micro-ordinateur. La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), qui a effectivement rappelé aux professionnels concernés en décembre 2006 les évolutions manifestes de la demande, a également entendu les associations de consommateurs sur ce sujet. Toutefois, les désaccords constatés entre les deux parties n'ont pas permis de parvenir à une synthèse utile lors de ces réunions. Dans le courant de l'année 2007, les services ont donc poursuivi plusieurs expertises sur le plan juridique, économique et technique. Des consultations de personnalités qualifiées tendent à montrer que le contexte technique de l'offre de systèmes d'exploitation grand public devrait encore évoluer fortement dans une perspective de moyen terme. Il est, par ailleurs, important de veiller à ce que l'élargissement des offres faites aux consommateurs n'entraîne pas une hausse des prix de tous les micro-ordinateurs, en raison de la répercussion sur toutes les machines des coûts supplémentaires de mise en place des offres alternatives. Il faut enfin veiller à ce que ce choix de solutions techniques plus large ne s'accompagne pas d'une dégradation des services rendus par les unités d'assistance en ligne. Il est à souligner que certaines enseignes de distribution spécialisées en micro-informatique proposent, dès à présent, des micro-ordinateurs sans logiciel préinstallé ou avec un système d'exploitation alternatif au logiciel dominant. Si ces offres ne concernent que peu de références pour le moment, elles sont toutefois en mesure de satisfaire la demande spécifique d'une partie des consommateurs qui ne souhaitent pas payer une licence de système d'exploitation dont ils n'ont pas l'usage. Sur le plan juridique, des décisions de justice sont attendues au cours de cette année, notamment à la suite des actions engagées par une association agréée de consommateurs devant plusieurs tribunaux de la région parisienne. Ces décisions devraient contribuer à clarifier la situation.
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