Texte de la QUESTION :
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M. Maxime Gremetz souligne auprès de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration qu'encore aujourd'hui il existe des rues baptisées rue Pétain. Il en existe dans la Somme à Demancourt, à Amiens, ainsi qu'à Tremblois-lès-Carignan dans les Ardennes. Faut-il rappeler que le maréchal Pétain a été jugé à la libération pour intelligence avec l'ennemi et haute trahison par la Haute cour de justice, qu'il fut arrêté, frappé d'indignité nationale et condamné à la confiscation de ses biens et à la peine de mort, dont il fut gracié par le général de Gaulle qui commua sa peine en prison à perpétuité ? Le document révélé récemment prouvant l'antisémitisme du maréchal Pétain, qui s'est traduit par la déportation et la mort de millions de juifs, rend d'autant plus intolérable que des rues en France portent encore ce nom. Il lui demande de prendre les mesures qui s'imposent afin de décider l'interdiction de tout hommage, quel qu'il soit, à l'égard de ce personnage.
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Texte de la REPONSE :
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La dénomination des voies et édifices publics relève de la compétence du conseil municipal en vertu de l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales. Une jurisprudence constante rappelle ce principe (CE, 2 décembre 1991, Commune de Montgeron, req. n° 84929 ; CAA Bordeaux, 30 avril 2002, Farrugia, req. n° 99BX02592). La compétence du conseil municipal dans ce domaine fait l'objet d'un contrôle de l'erreur manifeste d'appréciation de la part du juge administratif. La dénomination attribuée à une voie ou un édifice public doit être conforme à l'intérêt public ; le cas échéant cet intérêt peut être local. Ainsi, l'attribution d'un nom à un espace public ne doit pas être de nature à provoquer des troubles à l'ordre public, ni heurter la sensibilité des personnes, ni porter atteinte à l'image de la ville ou du quartier concerné (CAA Marseille, 12 novembre 2007, Ville de Nice, req. n° 06MA01409). La dénomination d'un espace public doit également respecter le principe de neutralité du service public, qui s'oppose notamment à ce que soient apposés sur les édifices publics des signes exprimant des opinions politiques, religieuses ou philosophiques (CAA Bordeaux, 30 avril 2002, Farrugia, req. n° 99BX02592 ; CE, 27 juillet 2005, req. n° 259806). Le tribunal administratif de Caen a récemment considéré que l'apposition d'un portrait de Philippe Pétain en mairie portait atteinte au principe de neutralité des services publics (TA Caen, 26 octobre 2010, req. n° 1000282). À la suite de ce jugement, les préfets procèdent à une sensibilisation des élus municipaux sur l'existence de lieux portant hommage à Philippe Pétain. Ainsi, le préfet de la Somme a-t-il appelé l'attention du maire de Dernancourt sur l'existence d'une rue au nom de Philippe Pétain dans cette commune. Après délibération du conseil municipal, cette rue a été renommée « rue du 5 avril 1918 - Bataille de Dernancourt ». Cette initiative du conseil municipal a permis de concilier les valeurs républicaines avec l'hommage rendu aux combattants de la Première Guerre mondiale.
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