FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 990  de  M.   Chassaigne André ( Gauche démocrate et républicaine - Puy-de-Dôme ) QOSD
Ministère interrogé :  Travail, solidarité et fonction publique
Ministère attributaire :  Travail, solidarité et fonction publique
Question publiée au JO le :  20/04/2010  page :  4333
Réponse publiée au JO le :  28/04/2010  page :  2397
Rubrique :  risques professionnels
Tête d'analyse :  maladies professionnelles
Analyse :  amiante. victimes. indemnisation
Texte de la QUESTION : M. André Chassaigne interroge M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique sur l'inscription du site des Ancizes de l'entreprise Aubert et Duval (Puy-de-Dôme) sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA).
Texte de la REPONSE :

ALLOCATION DE CESSATION ANTICIPÉE D'ACTIVITÉ
DES TRAVAILLEURS DE L'AMIANTE

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour exposer sa question, n° 990.
M. André Chassaigne. Ma question s'adressait à M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique. Je ne doute pas que Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville, ici présente, y répondra avec précision.
C'est avec beaucoup de solennité que j'interpelle une nouvelle fois le Gouvernement sur la situation des salariés de l'entreprise Aubert et Duval aux Ancizes-Comps, une aciérie située dans le Puy-de-Dôme.
Ces salariés attendent que l'État réponde enfin à leurs revendications et à leurs souffrances. Ils attendent en effet que le gouvernement de la République fasse preuve d'un peu d'humanité et cesse son incroyable complaisance à l'égard des dirigeants de ces aciéries.
Ils demandent tout simplement que le Gouvernement respecte les décisions de justice prononcées par le tribunal administratif de Clermont-Ferrand et confirmées par la cour d'appel de Lyon, en inscrivant enfin leur entreprise sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.
Dans un tel contexte de déni de justice, vous imaginez l'indignation et la colère qu'ont suscitées les conclusions du rapport d'enquête complémentaire de la DRTEFP du 24 décembre dernier, venant infirmer sans états d'âme celles du précédent rapport du 26 février 2009.
En effet, cette dernière enquête vient de conclure à une surestimation du nombre de pathologies imputées à l'établissement. Les salariés, les élus mais aussi la population ne sont pas dupes d'une manoeuvre qui vise à soumettre les services de l'État aux desiderata des dirigeants d'une entreprise qui ne veulent pas que soient appliquées les décisions de justice.
Dans ces conditions, le refus obstiné du ministère du travail de répondre à l'attente pressante des victimes du site est considéré comme une complaisance à l'égard des dirigeants de l'entreprise.
Combien de temps encore seront spoliés et méprisés les centaines de salariés, meurtris dans leur chair mais aussi désormais dans leur dignité ? Jusqu'où peut aller la protection accordée coûte que coûte à un membre éminent du cercle des proches du palais ?
Le Gouvernement doit le savoir, sa décision dépasse le seul cadre des aciéries inscrites dans le patrimoine commun de cette région industrielle. Elle a une dimension morale en portant un impératif éthique de notre République : celui d'une justice égale pour tous, respectueuse des individus quel que soit leur rang social.
C'est pourquoi, j'invite le ministre du travail à ne pas décevoir, une nouvelle fois, toute une population qui attend sa décision avec impatience mais aussi avec une gravité rare.
Mme la présidente. La parole est à Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville.
Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville. Tout d'abord, monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser Éric Woerth, qui ne peut être présent ce matin.
Votre question concerne l'inscription de l'aciérie Aubert et Duval sur la liste des entreprises qui ouvrent droit à la retraite anticipée pour les travailleurs de l'amiante. Elle fait d'ailleurs suite à la question d'actualité que vous avez posée le 23 mars dernier sur le même point.
C'est un sujet humainement très sensible dès lors que l'on touche aux questions de l'exposition à l'amiante. C'est aussi un dossier complexe qui a donné lieu à plusieurs expertises et contentieux compte tenu de la nature de l'activité de cette entreprise.
Il s'agit en effet d'évaluer le caractère significatif de l'exposition à l'amiante de certaines activités. Il y a eu plusieurs décisions de justice, la dernière étant un arrêt du Conseil d'État du 30 décembre 2009, qui rejette le pourvoi en cassation présenté par l'État contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 18 décembre 2008.
Ce rejet devrait conduire l'État à inscrire cette entreprise dans la liste des établissements ouvrant droit à la retraite anticipée des travailleurs de l'amiante, même si l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon ne fait que confirmer les conclusions du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, enjoignant seulement à réinstruire la demande, sans ordonner pour autant une inscription.
Quatre rapports d'enquête ont été établis depuis 2004. Le dernier, en date du 24 décembre 2009, vient apporter des précisions sur l'évaluation de la situation des salariés ayant subi des expositions à l'amiante déjà anciennes. Ainsi, il affine l'évaluation du nombre de postes ayant été exposés à l'amiante et actualise le nombre des maladies professionnelles imputables à l'établissement, en fonction des derniers recours exercés en la matière.
Toutefois, en termes très opérationnels, une telle décision serait lourde de conséquences pour l'organisation de cette entreprise, fournisseur de l'industrie aéronautique, qui fait partie des fleurons de notre industrie.
Ce serait, semble-t-il, l'une des rares inscriptions d'aciéries sur la liste des entreprises qui ouvrent droit à la cessation anticipée d'activité au titre des travailleurs exposés à l'amiante.
C'est pourquoi la direction et les syndicats de l'entreprise ont engagé une négociation et ont déjà tenu plusieurs réunions afin de rechercher une solution alternative permettant de satisfaire les salariés tout en évitant un dispositif général qui pourrait être préjudiciable au développement de cette entreprise et à l'économie du territoire rural sur lequel elle est implantée.
Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne.
M. André Chassaigne. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie mais je voudrais exprimer ma colère. La réponse est très claire : on ne donne pas suite à ce dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, considérant que ce serait lourd de conséquences pour l'industrie aéronautique.
Cette affirmation est d'une extrême gravité. Certains salariés de cette entreprise sont atteints par la maladie, d'autres sont décédés après l'avoir quittée. Or, pour des raisons industrielles, parce que cela risque de poser des problèmes au développement de l'industrie aéronautique, on ne donne pas suite au dispositif. On souligne la complexité, on cherche des arguments qui ne sont que des arguties.
Cette réponse est véritablement scandaleuse. Je crois que la population des Combrailles dans le Puy-de-Dôme et les salariés ne vont pas l'admettre.

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