FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 99402  de  M.   Diefenbacher Michel ( Union pour un Mouvement Populaire - Lot-et-Garonne ) QE
Ministère interrogé :  Commerce extérieur
Ministère attributaire :  Commerce extérieur
Question publiée au JO le :  08/02/2011  page :  1118
Réponse publiée au JO le :  03/05/2011  page :  4479
Rubrique :  commerce extérieur
Tête d'analyse :  balance commerciale
Analyse :  déficit. perspectives
Texte de la QUESTION : M. Michel Diefenbacher appelle l'attention de M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur sur l'évolution de la balance commerciale de la France. La balance commerciale a longtemps été excédentaire, l'excédent ayant atteint 23,8 milliards d'euros en 1997. C'est à partir de 1998 que la situation s'est dégradée ; le déficit commercial qui prévaut depuis lors étant révélateur d'une perte de compétitivité de l'économie française. La concomitance entre le creusement du déficit et l'instauration des 35 heures ne peut manquer d'interpeller les observateurs. Il lui demande, en conséquence, de lui faire part de son analyse sur ce point.
Texte de la REPONSE : Depuis 1980, la France n'a dégagé d'excédent commercial qu'entre 1993 et 1999, la balance commerciale fut, en effet, déficitaire durant toutes les années 1980 et, sans arrêt depuis 2000, le point bas étant atteint en 2008 avec 56 Mdeuros. En 2010, dans un contexte de reprise du commerce mondial, importations comme exportations ont connu une évolution similaire (+ 14 %). Malgré cette orientation favorable, le déficit commercial de la France s'est creusé, passant de 44 Mdeuros en 2009 à 51 Mdeuros en 2010. Différents éléments expliquent cette persistance du déficit commercial : 1. En 2010, comme les années précédentes, la dégradation du solde est essentiellement imputable à l'alourdissement de la facture énergétique. Entre 1999 et 2008, la facture énergétique a augmenté de 47 Mdeuros tandis que le solde de la balance commerciale se creusait de 70 Mdeuros. En 2010, en raison de la hausse continue des cours du baril de Brent au cours de l'année (+ 35 % en euro), la facture énergétique s'est alourdie de 8 Mdeuros par rapport à 2009 et s'élevait à 48 Mdeuros. En revanche, en 2010, le déficit hors énergie est quasiment stable (- 20,3 Mdeuros après - 19,5 Mdeuros en 2009). 2. Par ailleurs, la montée en puissance des pays émergents dans l'économie mondiale, avec notamment l'accession de la Chine, entrée à l'Organisation mondiale du commerce en 2002 et hissée au premier rang des exportateurs depuis 2009, est susceptible de peser sur le solde commercial en entraînant une hausse du contenu en importations des exportations et des pertes de parts de marché à l'exportation au détriment des pays développés. De fait, même si la France reste le cinquième exportateur mondial de marchandises depuis 2003 et au deuxième rang européen, elle a subi un tassement régulier de sa part de marché en valeur depuis le début des années 1990. Depuis 1990, l'érosion tendancielle des positions françaises n'apparaît donc pas spécifique à la France au sein de l'Organisation de coopération et de développement économiques. Toutefois, au cours des années 2000, la France a subi une dégradation de sa compétitivité. Les exportations ont pâti d'une baisse de compétitivité-prix, qui provient pour partie de la forte appréciation qu'a connue l'euro sur la période 2002-2009. Pour faire face à la perte de compétitivité engendrée par la hausse de l'euro, les exportateurs français ont largement réduit leurs marges, ce qui a pu se faire au détriment, notamment des efforts d'innovation des entreprises, un facteur déterminant pour leur performance à l'exportation. Entre novembre 2009 et juin 2010, l'euro s'est fortement déprécié, notamment par rapport au dollar, au yen et à la livre procurant des gains de compétitivité aux exportateurs français. Cependant, deux nouvelles vagues d'appréciation de l'euro face à ces mêmes monnaies ont de nouveau pesé sur l'activité en France, en pénalisant nos ventes hors zone euro mais aussi au sein de la zone euro du fait des pertes de compétitivité liées à la baisse des prix étrangers convertis en euro. Par rapport à l'Allemagne, si la compétitivité-prix suit la même tendance, la compétitivité évaluée à partir des coûts salariaux s'est assez nettement détériorée au cours des années 2000. Au moment où s'effectuait en France le passage aux 35 heures, l'Allemagne mettait en place une forte modération salariale et un assouplissement de son marché du travail. Les gouvernements successifs, depuis 2002, se sont attachés à apporter plus de souplesse dans la fixation du temps de travail (modulation, modification par accord collectif du contingent annuel d'heures supplémentaires) et à alléger les charges sur le travail. La perte relative de compétitivité-coût par rapport à l'Allemagne dépasse les seuls coûts salariaux : ce pays a beaucoup externalisé à l'étranger la production de consommations intermédiaires, ce qui a joué un rôle important dans la bonne tenue de ses coûts de production, contrairement à la France où l'externalisation se ferait de façon plus complète, portant sur la production de produits finis. Enfin, la dégradation des performances commerciales de la France s'explique également par certains facteurs structurels tels que l'appareil exportateur français est très concentré sur les grandes entreprises : sur les 90 000 entreprises exportatrices françaises, les 1 000 premières assurent plus des deux tiers du chiffre d'affaires total à l'exportation. À l'inverse, 69 des entreprises exportatrices ont moins de 20 salariés. Cette concentration renvoie à la structure de notre tissu productif. La part des « grosses » PME (entreprises de taille intermédiaire, par exemple) dans ce tissu est faible (relativement à l'Allemagne en particulier), ce qui limite leur possibilité d'internationalisation (mais aussi d'innovation), notamment pour exporter dans les régions émergentes lointaines, pour lesquelles le « facteur taille » est important. Au total, le nombre d'exportateurs, en particulier les PME, est en baisse depuis 2001. Seule une minorité des PME exportatrices exportent de manière régulière et la plupart d'entre elles n'exportent que vers un ou deux pays. De ce point de vue, les exportations demeurent largement tournées vers le reste de l'Union européenne à 27 (à plus de 60 %) et profitent encore trop peu du dynamisme des zones du monde en forte croissance, l'Asie émergente, le Proche-et Moyen-Orient ou encore l'Europe centrale et orientale. Ainsi, la demande mondiale adressée à la France, c'est-à-dire la demande de biens (importations) émanant des clients de la France, pâtit structurellement de son orientation géographique, en raison d'une croissance modérée de la zone euro et, en particulier, de la faiblesse de la demande intérieure du principal partenaire, l'Allemagne. La différence d'orientation géographique entre la France et l'Allemagne pourrait expliquer un peu moins d'un cinquième du différentiel de croissance des exportations entre les deux pays depuis 2000. L'Italie est également davantage tournée que la France vers les pays émergents. Toutefois, on observe que, au cours des années 2000, la France a également perdu des parts de marché sur les marchés traditionnels, en particulier l'Europe de l'Ouest. La spécialisation sectorielle de la France est, dans ses grandes lignes, proche de celle de l'Allemagne et ne permet pas d'expliquer les pertes de parts de marché subies. En revanche, en matière de contenu en innovation des produits, l'accentuation du retard vis-à-vis de l'Allemagne au cours des dernières années tend à accélérer les pertes de parts de marché. Plus généralement, la réputation de qualité des produits allemands les rendrait moins sensibles à la concurrence par les prix des autres pays et leur aurait permis de moins souffrir de la hausse de l'euro.
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