FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 99  de  M.   Zumkeller Michel ( Union pour un Mouvement Populaire - Territoire-de-Belfort ) QOSD
Ministère interrogé :  Solidarité
Ministère attributaire :  Solidarités actives contre la pauvreté
Question publiée au JO le :  08/01/2008  page :  120
Réponse publiée au JO le :  09/01/2008  page :  17
Date de changement d'attribution :  08/01/2008
Rubrique :  consommation
Tête d'analyse :  crédit
Analyse :  surendettement. lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Michel Zumkeller attire l'attention de Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité sur le surendettement. La loi prévoit un délai de dix ans pour solder la dette. Or, l'application de ce délai pose quelques interprétations qui méritent d'être clarifiées. Il souhaiterait savoir : si ce délai s'applique à la date initiale du premier plan ou à la révision du nouveau, et comment il se fait que les personnes âgées bénéficiant d'une petite retraite et qui remboursent depuis plus de quinze ans ne puissent pas prétendre à une faillite personnelle. Enfin, il semblerait que les juges de l'exécution ne tiennent pas compte du décret Borloo qui propose le gel ou la suppression de certaines dettes distinctes des dettes personnelles, lorsque des particuliers se sont portés caution d'une association. Par conséquent, il lui demande des réponses concrètes par rapport à ses interrogations en suspens.
Texte de la REPONSE :

APPLICATION DE LA LOI SUR LE SURENDETTEMENT

M. le président. La parole est à M. Michel Zumkeller, pour exposer sa question, n° 99, relative à l'application de la loi sur le surendettement.
M. Michel Zumkeller. Monsieur le haut-commissaire, ma question aborde un sujet qui concerne malheureusement un très grand nombre de nos compatriotes : le surendettement, avec toutes ses conséquences et toute l'ampleur qu'il a prise ces dernières années. La loi Borloo, qui fut une très bonne chose, a évidemment permis de redonner espoir aux personnes concernées en prévoyant un le délai de dix ans pour l'apurement de la dette. Ce délai est réellement facteur d'espoir pour tous ces gens pris dans la spirale infernale du surendettement, qui s'attendaient à devoir payer toute leur vie - situation proprement intenable. Cette disposition-barrière a très souvent porté ses fruits, mais dans notre travail quotidien en permanence nous amène à rencontrer de nombreux cas de figure, peut-être particuliers, mais qui empoisonnent la vie de bien des gens.
Premièrement, lorsqu'il est question de réviser un plan de surendettement, la question se pose de savoir si ce fameux délai de dix ans s'applique à compter de la date initiale du plan ou à compter de la date de révision, alors que le débiteur paie déjà depuis plusieurs années.
Le deuxième cas de figure est peut-être plus personnel, pour ne pas dire plus humain encore : il arrive très souvent que des personnes âgées, pour des raisons qui ne les concernent même pas - le cautionnement du prêt d'un conjoint, par exemple - se trouvent prises dans une spirale de règlements de prêts. Je peux vous citer l'exemple d'une personne de soixante-quinze ans amenée à rembourser avec sa petite retraite des prêts qui ne sont pas les siens depuis quinze ans, sans jamais voir le bout du tunnel. J'aimerais savoir si pour ces problèmes spécifiques il existe des solutions spécifiques. Il ne s'agit plus en la circonstance de redonner de l'espoir, mais bien d'envisager de passer à autre chose : non seulement'il y a déjà eu beaucoup d'années de paiement, mais, de toute façon, on n'arrive jamais au règlement total. Ne peut-on y plus rapidement un terme ?
Le troisième cas est également très particulier. Il s'agit de personnes qui se sont portées caution d'une association. Quand on s'engage dans le cadre associatif, il est tout de même dommage d'être obligé de payer des dettes pendant très longtemps. Je pense à une personne qui paye des dettes d'une association, mais le juge ne les reconnaît pas dans le cadre du plan de surendettement, ce qui ne permet donc pas d'appliquer le fameux délai de dix ans.
Tels sont les trois exemple que je vous soumets, monsieur le haut-commissaire. Cela étant, au-delà de l'action à mener en faveur des victimes du surendettement, sans doute conviendrait-il de trouver les moyens de les empêcher d'y tomber... S'agissant de la trop grande facilité d'accès au crédit à la consommation, la mise en place d'un fichier serait tout de même une très bonne chose. Il est humain de vouloir progresser socialement ; pour un commerçant, il est logique de vendre ; mais peut-être devrions-nous poser quelques barrières afin que l'achat à crédit, qui pour l'instant n'est conditionné qu'à une simple déclaration, soit un peu mieux contrôlé. Je suis prêt à m'associer à toutes les actions qui seront menées dans ce domaine.
Ma question est donc simple : que peut-on faire pour les cas que j'ai évoqués ?
M. le président. La parole est à M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.
Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. Monsieur le député, vous avez mis l'accent sur un phénomène très important qui concerne malheureusement de plus en plus de personnes et qui n'a pas été complètement endigué par la loi que vous avez rappelée et qui a tenté, après d'autres lois, de mettre en place des procédures nouvelles. Votre question porte sur un certain nombre de cas très précis et très concrets. Il s'agit en fait de situations qu'on rencontre souvent, et je vais essayer d'y apporter les réponses les plus précises possibles.
Le premier point, c'est la durée des plans conventionnels de redressement. Il s'agit de savoir comment se calcule le délai de dix ans. Le plan de redressement, qu'il soit conventionnel ou qu'il résulte des recommandations du juge, ne peut excéder dix ans. La loi précise que " la durée totale [du plan], y compris lorsqu'il fait l'objet d'une révision ou d'un renouvellement, ne peut excéder dix années " - c'est l'article L. 331-6 du code de la consommation. Le délai de dix ans s'applique donc, sans aucun doute possible, à compter de la date initiale du premier plan. Le législateur a cependant ménagé une exception à cette règle : " les mesures du plan peuvent excéder ces délais lorsqu'elles concernent le remboursement de prêts contractés pour l'achat d'un bien immobilier constituant la résidence principale et dont le plan permet d'éviter la cession par le débiteur ". On comprend que c'est une mesure protectrice pour que la personne concernée ne se retrouve dans la situation où elle rembourse vite, mais en étant obligée de vendre sa maison, et finalement à la rue.
En outre, j'attire votre attention sur le fait que, pendant le déroulement du plan, il est toujours possible à un débiteur dont la situation se serait dégradée de déposer un nouveau dossier de surendettement qui fera l'objet d'un examen par la commission. Celle-ci se demandera alors si ce nouveau dépôt ne traduit pas " une situation irrémédiablement compromise " justifiant une orientation vers une procédure de rétablissement personnel, ou s'il ne traduit pas, au moins, une situation grave justifiant un effacement partiel de créance, et ce avant même l'écoulement de la période de dix ans. Les dix ans, je le rappelle, s'entendent comme un maximum : on peut aller plus vite.
Enfin, il convient de relever que la limitation dans le temps du plan conventionnel ou des mesures recommandées par la commission est une innovation de la loi de 2003, dite loi Borloo. Cette règle, en enfermant le traitement du surendettement dans un délai légal, permet d'offrir aux débiteurs surendettés une vraie perspective de sortie de leur situation de surendettement.
Le deuxième point de votre question porte sur le bénéfice de la faillite personnelle pour les personnes âgées amenées à rembourser depuis plus de quinze ans. La loi ne soumet l'accès à la procédure de rétablissement personnel à aucune règle concernant l'âge, le statut d'activité, le montant des ressources ou la durée des prêts contractés par les demandeurs. Il n'y a donc aucun obstacle de principe à ce que la personne retraitée que vous évoquez puisse prétendre à la procédure de rétablissement personnel. Le seul critère d'ouverture posé par le législateur est, logiquement, lié à l'appréciation de la situation objective de la personne au regard des dettes contractées : le débiteur doit en effet être dans une situation " irrémédiablement compromise caractérisée par l'impossibilité manifeste de mettre en oeuvre les mesures de traitement prescrites devant la commission de surendettement des particuliers ". La procédure de faillite personnelle est bien évidemment un dernier recours. Dès lors, les personnes qui honorent leurs engagements liés au déroulement d'un plan conventionnel ne sont, a priori, pas concernées.
Il n'y a pas de droit à effacement des dettes au bout d'un temps donné. Toutefois, il est possible de recourir à la procédure de rétablissement en cours d'exécution du plan de redressement, comme je l'ai signalé dans le cas précédent. Cela dit, la loi vise à maintenir un équilibre entre les différents intérêts en jeu, et la mise en oeuvre d'une procédure de rétablissement personnel entraîne le prononcé par le juge de la liquidation des biens du débiteur dont la vente est confiée à un mandataire. Sont exclus de la vente les meubles nécessaires à la vie courante, les biens non professionnels indispensables à l'exercice de l'activité professionnelle. Mais la vente du bien immobilier est de la compétence du tribunal de grande instance, avec une mise à prix fixée par le juge de l'exécution. Dans sa conception actuelle, la procédure de rétablissement entraîne automatiquement la vente des biens immobiliers. C'est une décision très grave et il est souvent préférable d'exécuter scrupuleusement les prescriptions du plan de redressement : les personnes propriétaires de leur résidence principale n'ont en général pas intérêt à bénéficier d'une procédure de rétablissement personnel. C'est probablement le cas de la personne retraitée que vous évoquez. Je suppose qu'elle est propriétaire de son logement, et la durée de son plan - plus de quinze ans - suggère que le passif inclut le remboursement d'un crédit immobilier lié à l'achat de sa résidence principale. Il s'agit, encore une fois, de trouver le juste équilibre, en l'occurrence pour éviter la perte du logement.
Le troisième point de votre question porte sur les particuliers qui se sont portés caution dans le cadre associatif. Il est vrai que, dans le courrier que je reçois, je vois beaucoup de tels cas de figure. Seules les dettes non professionnelles des particuliers peuvent être prises en compte par la commission de surendettement. La caution consentie à un débiteur principal, fût-ce à raison de son activité professionnelle, demeure cependant un acte civil : le débiteur-caution d'un débiteur principal peut donc saisir la commission de surendettement. Rien ne fait obstacle en droit à l'inclusion de cette dette dans le plan ni à ce que le débiteur puisse bénéficier d'un effacement de cette dette sur décision du juge dans le cadre d'une recommandation de la commission ou à l'occasion de la clôture de la procédure de rétablissement personnel.
Toutefois, il faut attirer l'attention des personnes concernées sur le fait que l'effacement partiel des dettes ne peut être recommandé par la commission que lorsqu'elle constate l'insolvabilité du débiteur. Il n'y a donc pas de pénalisation quand le surendettement tient au fait que l'on s'est porté caution.
Je terminerai par deux remarques. D'une part, les pratiques peuvent certainement varier d'une commission départementale de surendettement à l'autre ; il serait utile de faire le point, afin d'identifier les bonnes pratiques et les diffuser dans l'ensemble des commissions. D'autre part, si les textes adoptés ont apporté des améliorations, ils n'ont pas suffi à endiguer le problème du surendettement. Il ne pourra l'être que s'il est traité à la source, en faisant de la prévention mais également en responsabilisant la profession bancaire. Cette année, des initiatives pourront être prises dans ce sens. Je vous remercie d'avoir manifesté votre attention pour ce sujet.

UMP 13 REP_PUB Franche-Comté O