14ème législature

Question N° 100767
de Mme Dominique Chauvel (Non inscrit - Seine-Maritime )
Question écrite
Ministère interrogé > Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche
Ministère attributaire > Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Rubrique > enseignement secondaire

Tête d'analyse > ZEP

Analyse > réseaux d'éducation prioritaire. lycées.

Question publiée au JO le : 22/11/2016 page : 9542
Réponse publiée au JO le : 14/02/2017 page : 1273
Date de changement d'attribution: 07/12/2016

Texte de la question

Mme Dominique Chauvel attire l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les inégalités réelles et ressenties au sein des établissements lycéens de France. En cette période de fin de mandat, un bilan doit se poser et prendre en considération les inégalités qui demeurent fortement marquées. La jeunesse issue des quartiers populaires ou ruraux d'aujourd'hui se sent en partie abandonnée tant d'un point de vue pécuniaire que moral. Or l'école a un rôle fondamental à jouer pour pallier ce sentiment très fort, et donner des perspectives aux jeunes tout en leur permettant de devenir des citoyens éclairés dans cette période marquée par une série de troubles délétères. Face aux fléaux reconnus que constituent la ségrégation territoriale (les frontières spatiales du quartier) et la ségrégation sociale (ségrégation des établissements scolaires), l'éducation prioritaire semble plus que jamais nécessaire pour pallier, dans une certaine mesure, ces inégalités. En effet, les élèves de ces quartiers délaissés nécessitent davantage d'attention du fait de la distance parfois culturelle entre leur univers familial et les exigences de l'école, et parfois spatiale entre les familles et le lieu d'études des jeunes. La réforme de l'éducation prioritaire de 2013 était censée améliorer la prise en compte de ces inégalités, et la réforme du collège censée limiter la ségrégation inter et intra-établissements. Pourtant, à la rentrée 2016, bon nombre d'élèves, de parents et de représentants enseignants se sont montrés inquiets. Certaines zones, dont Nanterre, ont appris la fin de l'éducation prioritaire en lycée (celle-ci s'arrêterait à la fin de la « scolarité obligatoire, c'est-à-dire l'école et le collège »). Or ce manque de considération et d'ambition pour les lycées est en totale contradiction avec les objectifs affichés par le ministère de l'éducation nationale. Ainsi, elle souhaite connaître les mesures qu'elle envisage pour pallier la contradiction entre l'annonce prolongeant la scolarité obligatoire à 18 ans et celle, dans le même temps, qui vise à limiter l'éducation prioritaire à l'école et au collège. La sortie de l'éducation prioritaire aura en effet des conséquences très claires pour les lycées concernés : une baisse de la dotation horaire globale (ce qui ne permettra plus de dédoubler les classes ni d'assurer des projets culturels ou encore des dispositifs d'aide), une hausse des effectifs par classe (quand bien même la plupart des études préconisent des effectifs réduits significativement pour assurer un enseignement efficace), mais aussi la fin des indemnités et compensations spécifiques pour les enseignants, qui permettent d'assurer la stabilité des équipes et d'inciter les enseignants expérimentés à rester dans ces établissements. Les lycées qui étaient classés ZEP recrutent dans des bassins où l'essentiel des collèges sont classés REP ou REP+. Elle souhaite savoir comment son ministère compte assurer aux élèves les plus fragiles le soutien dont ils ont besoin, au moment même où ils se préparent au baccalauréat et font des choix cruciaux pour leur orientation dans l'enseignement supérieur.

Texte de la réponse

La refondation de l'éducation prioritaire, comme la refondation de l'école engagée en 2013, a été prioritairement établie pour l'école obligatoire de la maternelle à la fin du collège. Elle a été largement reconnue pour la qualité du travail réalisé en termes de méthode et de contenus pédagogiques. Cette refondation a commencé par une évaluation de politique publique dans le cadre de la modernisation de l'action publique (MAP) qui a permis d'aboutir, en juillet 2013, à un diagnostic qui a pu être discuté avec les équipes des écoles et collèges concernés. Ce n'est qu'après avoir entendu de manière approfondie les acteurs de terrain que les ministres ont annoncé, en janvier 2014, les mesures pour l'éducation prioritaire qui ont donné lieu à une préfiguration au cours de l'année 2014-2015, avant une généralisation à la rentrée 2015. La refondation de l'éducation prioritaire dans l'école obligatoire a abouti à une nouvelle carte plus juste, conçue sur la base de critères objectifs adaptés aux écoles et collèges. Elle a donné lieu à la publication d'un référentiel pédagogique construit à partir des pratiques repérées comme les plus efficaces en éducation prioritaire. Les conditions de ce changement réussi sont liées à la qualité du diagnostic préalable, à la mise en œuvre d'une concertation approfondie, à la construction de mesures étayées par des travaux de recherche et par l'expertise des personnels, et à la mise en œuvre progressive des mesures. S'agissant des lycées, un certain nombre d'entre eux sont aujourd'hui labellisés : lycée ZEP, lycées ambition réussite, lycée ECLAIR, soit en raison des élèves qu'ils scolarisent, du territoire dans lequel ils sont situés, des évènements de violence qu'ils ont pu connaître. Par ailleurs, sans relever de l'éducation prioritaire, les personnels de certains lycées bénéficient d'un avantage spécifique d'ancienneté (ASA) pour leur mutation. Des engagements forts pour les lycées et lycées professionnels relevant de l'éducation prioritaire, ainsi que pour les lycées et lycées professionnels scolarisant les élèves les plus défavorisés ont été pris. Depuis 2015, ils bénéficient de façon prioritaire de la nouvelle allocation progressive des moyens, c'est-à-dire de la répartition des moyens d'enseignement et d'éducation aux établissements proportionnellement aux difficultés économiques, sociales et scolaires de leurs élèves. Par ailleurs, et en réponse aux inquiétudes de leurs personnels, toutes les dispositions ont été prises pour sécuriser les rentrées 2017, 2018 et 2019 s'agissant du maintien des indemnités des enseignants de ces lycées et du maintien des droits dont les personnels bénéficient pour leur mutation. Une dotation exceptionnelle de 450 emplois nouveaux est dédiée à la rentrée 2017 aux lycées et lycées professionnels les plus défavorisés. Ces emplois permettront d'abaisser le nombre d'élèves par classe et d'augmenter le nombre d'adultes dans les établissements. Il est souhaitable que ces moyens supplémentaires soient maintenus jusqu'à la redéfinition de la politique d'éducation prioritaire dans les lycées, qui doit être une priorité des prochaines années, en prenant pleinement en compte la situation des lycées professionnels notamment. La réforme à conduire pour les lycées devra à la fois être cartographique – c'est-à-dire qu'elle devra actualiser la liste des établissements qui rencontrent objectivement le plus de difficultés sociales afin de mieux les accompagner grâce à un effort financier soutenu –, financière et pédagogique. Elle implique en effet l'élaboration d'un référentiel pédagogique permettant d'atteindre les ambitions fixées à l'éducation prioritaire.