Question de : M. François Loncle
Eure (4e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. François Loncle attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la composition et le fonctionnement des tribunaux de commerce qui soulèvent régulièrement des interrogations. La France compte 132 de ces juridictions dites consulaires qui se composent de juges non professionnels et bénévoles choisis parmi les commerçants ou les dirigeants d'entreprises et élus par eux pour une période de quatre ans. Ces instances juridictionnelles traitent principalement des litiges entre commerçants, des affaires entre ceux-ci et les particuliers, mais elles s'occupent aussi de plus en plus des procédures collectives touchant les entreprises en difficulté, comme la cessation de paiement, la sauvegarde, le redressement judiciaire, la reprise ou la liquidation. Jusqu'à une date encore récente, les affaires de contentieux général constituaient l'essentiel de l'activité de ces tribunaux. Mais les magistrats consulaires sont désormais surchargés par les dossiers de sociétés affectées par la crise économique et financière. Ainsi, le nombre de procédures traitées par le tribunal de commerce de Paris a augmenté de 45 % depuis un an. Quant au tribunal de Nanterre, le deuxième de France, il prononce en moyenne 1 000 liquidations chaque année. Malgré cet afflux de dossiers, la justice commerciale reste rapide, peu dispendieuse et en phase avec les réalités économiques, dans la mesure où les juges, étant issus du milieu entrepreneurial, ont une approche pragmatique de la vie des affaires. Toutefois, elle pose un problème de qualification, d'impartialité et de représentativité. D'une part, il est parfois reproché aux juges consulaires une connaissance insuffisante du droit, même s'ils peuvent bénéficier d'une formation juridique dispensée par l'École nationale de la magistrature. D'autre part, les tribunaux de commerce sont aussi accusés de manquer de transparence et d'être la proie de conflits d'intérêts, même si la collégialité est censée garantir l'indépendance des juges et limiter les risques de dérives clientélistes. Par conséquent, il aimerait savoir si elle n'estime pas nécessaire de réviser la composition des juridictions consulaires, en y associant des juges professionnels, des représentants des salariés, voire les commissaires au redressement.

Réponse publiée le 26 février 2013

Lors du séminaire ministériel sur la compétitivité du 6 octobre 2013, le Premier ministre a souhaité « Rénover le fonctionnement de la justice commerciale pour la rendre plus efficace ». Le Gouvernement entend faire jouer l'ensemble des leviers à sa disposition pour renforcer l'efficacité de la justice commerciale. A cet égard, parce qu'avec derrière la compétitivité, on trouve la croissance et on trouve l'emploi, les mécanismes de prévention de la phase juridictionnelle ou judiciaire doivent être renforcés et améliorés. La spécialisation des magistrats du parquet en matière commerciale ainsi que de certaines juridictions commerciales est en cours de réflexion. Par ailleurs, la formation des juges consulaires n'est pas obligatoire et la formation initiale dispensée par l'ENM aux nouveaux juges consulaires est seulement de 9 jours, dont deux consacrés à la rédaction des jugements et un seul jour pour l'environnement judiciaire, la déontologie et l'impartialité. En 2011, 663 juges ont suivi une formation initiale et 875 une formation continue thématique pendant deux jours. C'est un grand progrès, qui témoigne de l'investissement des juges consulaires. La garde des sceaux souhaite travailler avec les juges consulaires pour rendre obligatoire la formation initiale. Elle souhaite mettre en place une formation accélérée pour les juges nouvellement élus et renforcer la formation continue. Il pourrait être également envisagé de faire siéger un juge consulaire dans les juridictions d'appel, ce qui serait de nature à renforcer la juridiction par la diversité des compétences et des origines des juges. Cette diversité ne peut qu'être bénéfique pour une juridiction qui traite du sort d'entreprises et de salariés. Enfin, il est aussi nécessaire de maîtriser les risques de conflits d'intérêts auxquels les juges consulaires, comme tous les juges, peuvent être confrontés. Le renforcement des règles déontologiques est une priorité de la garde des sceaux. Elle souhaite s'appuyer dans ce domaine sur les nombreux travaux et réflexions réalisés par la conférence générale des juges consulaires et par le conseil national des tribunaux de commerce. Loin d'un désaveu, le projet du Gouvernement vis au contraire à assoir davantage la légitimité des juges consulaires et partant celle de la justice commerciale. Dans cet esprit, l'échevinage constitue une piste de réflexion qui sera discutée avec les représentants des juges consulaires.

Données clés

Auteur : M. François Loncle

Type de question : Question écrite

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 20 novembre 2012
Réponse publiée le 26 février 2013

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