14ème législature

Question N° 12160
de Mme Sandrine Mazetier (Socialiste, républicain et citoyen - Paris )
Question écrite
Ministère interrogé > PME, innovation et économie numérique
Ministère attributaire > Économie et finances

Rubrique > télécommunications

Tête d'analyse > Internet

Analyse > moteurs de recherche. concurrence. respect.

Question publiée au JO le : 27/11/2012 page : 6932
Réponse publiée au JO le : 21/05/2013 page : 5285
Date de changement d'attribution: 29/01/2013

Texte de la question

Mme Sandrine Mazetier attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique, sur le marché de la recherche sur internet. Actuellement, ce marché est sous la domination d'un acteur économique, dont le modèle est fondé sur la commercialisation de la publicité via en particulier la monétisation des données personnelles collectées. Cette situation, liée au fait que Google détienne plus de 90 % de parts de marché en France, voire 95 % sur les téléphones mobiles, soulève de nombreuses questions structurantes. Outre les risques pour la vie privée que la CNIL a pointés récemment, après avoir infligé, le 17 mars 2011, une amende de 100 000 euros pour collecte illicite de données personnelles, Google se voit reprocher des pratiques anti-concurrentielles et notamment de discrimination, de manipulation des résultats ou de clauses contractuelles d'exclusivité. Or, comme l'a relevé l'Autorité de la concurrence dans son avis du 14 décembre 2010, le moteur de recherche est la principale porte d'accès aux contenus sur le réseau internet. Être écarté ou mal référencé peut donc avoir des conséquences dramatiques pour les opérateurs économiques, qui ont un besoin de trafic pour leur développement. Des acteurs français ont dû engager des actions judiciaires devant les tribunaux aux fins d'indemnisation en réparation du préjudice subi, aux motifs de certaines pratiques abusives de Google. Par ailleurs, les menaces proférées par Google de déréférencement des sites des éditeurs de presse, alors qu'ils proposent une solution tendant à faire respecter leurs droits intervient sur le respect du pluralisme sur internet et au-delà. Sous la précédente législature, l'ancien ministre chargé de l'économie numérique avait repris à son compte une étude qui, commandée par Google, portait précisément sur la contribution de cette entreprise à l'économie française. Il n'est pas sain dans notre démocratie qu'une entreprise en situation monopolistique tente d'empêcher la mise en œuvre de solutions adaptées aux circonstances. Or le temps presse car certaines PME françaises sont en situation de grave péril. Cet ancien ministre avait ainsi, à son insu, participé à une opération d'influence, montée d'ailleurs par une entreprise qui dépense beaucoup d'argent en lobbying, y compris en recrutant au sein même du Conseil d'État. Elle lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles mesures elle entend appliquer afin de garantir le pluralisme et, en cas de carence des autorités de régulation, si elle entend prendre des mesures adaptées et proportionnées visant notamment à : séparer les activités de moteur de recherche vers les liens naturels et les activités verticales favorisant les propres contenus du monopole ; assurer la transparence du code de l'algorithme afin d'en finir avec les manipulations et les référencements discriminatoires ; mettre un terme aux pratiques exclusivité.

Texte de la réponse

La situation du marché de la publicité en ligne, en particulier dans le secteur des moteurs de recherche, soulève des interrogations en termes concurrentiels. Celles-ci avaient conduit le ministre de l'économie et des finances à saisir l'autorité de la concurrence pour avis le 18 février 2010. A la suite de cette saisine, l'autorité de la concurrence a rendu un avis, le 14 décembre 2010, sur le fonctionnement du marché de la publicité en ligne. L'autorité de la concurrence concluait que l'application du droit de la concurrence pouvait apporter des réponses aux risques qu'elle identifiait, sans qu'il soit nécessaire de mettre en place une régulation d'ensemble du secteur. A titre d'illustration de l'efficacité de l'application du droit de la concurrence, l'autorité rappelait avoir été saisie d'une plainte dénonçant des pratiques opaques et discriminatoires, et avoir ordonné une série de mesures conservatoires, pérennisées et précisées par la suite dans le cadre d'une procédure d'engagements. Ces engagements, rendus obligatoires par une décision du 28 octobre 2010, tendent à rendre plus transparentes et plus prévisibles pour les annonceurs les règles appliquées par le service de publicité en ligne « AdWords ». Par ailleurs, la Commission européenne, saisie de plaintes, a décidé d'ouvrir une enquête en 2010. Conformément aux dispositions du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, l'ouverture par la Commission de cette procédure dessaisit les autorités de concurrence des États membres de leur compétence pour appliquer le droit communautaire de la concurrence pour les mêmes faits. Sur le fond, le Commissaire européen à la concurrence, Joaquin Almunia, s'est d'ailleurs récemment exprimé publiquement sur ce dossier, en soulignant que la Commission européenne attendait des engagements de la part de l'opérateur concerné. L'analyse approfondie de la Commission européenne devrait permettre de clarifier la qualification de certaines pratiques et, le cas échéant, de mettre fin à celles qui pourraient être considérées comme anticoncurrentielles. Le Gouvernement restera particulièrement attentif aux développements de cette procédure communautaire.