14ème législature

Question N° 12362
de M. Olivier Véran (Socialiste, républicain et citoyen - Isère )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > déchéances et incapacités

Tête d'analyse > tutelle

Analyse > mesures de protection. examen périodique. moyens.

Question publiée au JO le : 04/12/2012 page : 7118
Réponse publiée au JO le : 18/06/2013 page : 6450

Texte de la question

M. Olivier Véran interroge Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les solutions qui pourront être apportées aux tribunaux d'instance pour permettre notamment le réexamen des dossiers de tutelle en application de la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs. La réforme de la carte judiciaire, opérée par le précédent gouvernement, a entraîné la réduction d'un tiers du nombre total des tribunaux d'instance. À ce bouleversement organisationnel se sont en outre ajoutés des transferts et alourdissements de contentieux comme le réexamen systématique des dossiers de tutelle en application de la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs. Il est ainsi fait obligation aux tribunaux d'instance d'avoir, d'ici au 1er janvier 2014, achevé la révision des 731 671 mesures de protection qui étaient en cours dans les cabinets des juges des tutelles au 1er janvier 2009. À défaut les mesures de protection deviendront caduques. Lors du mandat précédent, l'État ne s'est pas donné les moyens d'une ambition pourtant très louable dans son principe et les délais de révision des mesures de protection des majeurs ne seront pas tenus. Fin 2010, seulement 143 662 mesures avaient été révisées, soit environ 20 % du stock à réviser. Il faut rappeler que la révision d'un dossier consiste a minima, à entendre la personne protégée ce qui peut exiger du juge qu'il se déplace dans une maison de retraite ou un hôpital psychiatrique possiblement assez éloigné du siège du tribunal et à entendre la personne chargée de la mesure de protection. Il revient en outre au greffier en chef de procéder à la vérification des comptes de tutelle, ainsi qu'au contrôle des émoluments des mandataires judiciaires à la protection des majeurs. Aux dossiers de protection des majeurs s'ajoutent en outre les dossiers de tutelles des mineurs car le transfert des procédures vers les juges aux affaires familiales reste théorique, les présidents de tribunaux de grande instance étant invités à maintenir, par délégation, leur compétence. Considérant qu'il n'est pas concevable de laisser des milliers de mesures devenir caduques, au détriment des personnes protégées, sans compter le risque de mise en cause de la responsabilité de l'État pour le dysfonctionnement du service de la justice, il lui demande quelles sont les mesures qu'elle compte prendre pour faire face à cette situation.

Texte de la réponse

La loi du 5 mars 2007 a posé le principe d'une révision quinquennale des mesures de protection, sous peine de caducité, dont le point de départ a été repoussé par loi du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit, au jour de l'entrée en vigueur de la loi, soit au 1er janvier 2009. Il en résulte que la caducité des mesures ordonnées avant le 1er janvier 2009 sera encourue à compter du 1er janvier 2014. Il ressort d'une cartographie nationale, établie en mars 2012 sur la base des déclarations des juridictions, que depuis le 1er janvier 2009, 232 328 mesures de protection ont été réexaminées par les juges des tutelles, soit un taux de renouvellement moyen de 43 % au 1er janvier 2012. Par ailleurs, à l'occasion des dialogues de gestion pour l'année 2013, les juridictions ont indiqué qu'au 30 juin 2012, le taux de renouvellement se situait à près de 60 % (59.9), soit une augmentation de près de 20 points en 6 mois. Si les derniers chiffres en possession de la Chancellerie apparaissent plus favorables, le ministère de la justice se montre conscient des difficultés relevées et a décidé de réaliser une enquête auprès de l'ensemble des juridictions afin de disposer d'un état des lieux actualisé des mesures de protection restant à renouveler au 31 décembre 2012 permettant de décider des moyens à mettre en oeuvre pour éviter la caducité de ces mesures. S'il est exact que 178 tribunaux d'instance ont été fermés dans le cadre de la réforme de la carte judiciaire, il convient d'observer que le nombre de postes localisés des juges d'instance est de 852 pour l'année 2012 (contre 850 en 2011). En effet, dans le cadre des dialogues de gestion pour l'année 2012, dix demandes de création de poste à l'instance étaient fléchées pour les tutelles par les cours d'appel et deux créations d'emplois de juge d'instance ont été ainsi prévues dans la circulaire de localisation des emplois de magistrats pour l'année 2012. S'agissant des effectifs localisés de fonctionnaires des greffes, l'action consistant à renforcer la qualification des personnels par la transformation d'emplois de catégorie C en emploi de greffier se poursuit de manière continue depuis plusieurs années. 129 tribunaux d'instance ont vu leur effectif localisé renforcé en 2012. Enfin, 30 emplois nouveaux de greffiers placés créés en 2012, pourront, à la demande des cours d'appel, contribuer à renforcer les effectifs des tribunaux d'instance. Outre la question des effectifs, des mesures ont été prises afin d'accompagner l'effort des juridictions concernées. Ainsi, en application du décret n° 2011-1470 du 8 novembre 2011, lorsque les ressources de la personne protégée le permettent et qu'ils l'estiment utile, les greffiers en chef des tribunaux d'instance peuvent désormais solliciter aux frais de la personne protégée, l'assistance d'un huissier de justice dans le cadre de leurs pouvoirs de vérification des comptes de gestion. Ces dispositions sont de nature à favoriser un contrôle effectif, de qualité et dans des délais raisonnables, sur le déroulement financier des mesures de protection. Des recommandations seront adressées afin de : limiter les délégations des magistrats et fonctionnaires affectés au tribunal d'instance au profit d'autres juridictions ; relancer la concertation avec les conseils généraux, en particulier sur l'utilisation des mesures d'accompagnement social personnalisé (MASP) dans le but de limiter aux cas strictement nécessaires la saisine du juge des tutelles. Par ailleurs, un recueil des bonnes pratiques et des formulaires labellisés « cerfa » facilitant le traitement des requêtes en renouvellement seront mis prochainement à la disposition des juridictions. Enfin, différentes mesures d'accompagnement susceptibles de simplifier la procédure de renouvellement des mesures et d'alléger la tâche que représente la révision quinquennale de l'ensemble des mesures de tutelles seront examinées : - possibilité d'instaurer une mesure de protection pour une durée supérieure à 5 ans, dans certaines circonstances particulières où l'état de la personne n'est pas susceptible de s'améliorer et où l'obligation de révision quinquennale n'apporte pas de réelle plus value ; - possibilité pour tout médecin d'établir le certificat médical permettant de disposer des droits relatifs au logement ou au mobilier de la personne protégée dans le but de permettre son accueil dans un établissement. La question du renouvellement des mesures de protection fait l'objet d'un suivi particulièrement attentif et régulière, permettant, le cas échéant de prendre les dispositions qui s'imposent afin d'écarter tout risque au 1er janvier 2014 dans un souci de protection des personnes.