14ème législature

Question N° 1237
de Mme Isabelle Le Callennec (Les Républicains - Ille-et-Vilaine )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > énergie et carburants

Tête d'analyse > économies d'énergie

Analyse > fournisseurs. précarité énergétique. évaluation.

Question publiée au JO le : 26/01/2016
Réponse publiée au JO le : 03/02/2016 page : 732

Texte de la question

Mme Isabelle Le Callennec attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur l'obligation faite aux distributeurs de combustibles d'inciter leurs clients à faire des travaux d'économie d'énergie sous peine de payer des pénalités. Depuis le 1er janvier 2016, comme cela est mentionné dans le décret n° 2015-1825 du 30 décembre 2015, les fournisseurs d'énergie ont l'obligation de repérer les ménages en situation de précarité énergétique afin de les inciter à faire des travaux. Des pénalités supplémentaires sont prévues pour les entreprises qui n'effectueraient pas cette nouvelle obligation. Elle lui demande si le Gouvernement considère que le rôle des distributeurs de combustibles est d'évaluer la précarité énergétique des ménages, quels considérants ont fondé ce décret, si l'impact a été mesuré et s'il est prévu d'évaluer cette mesure dénoncée par nombre de professionnels qui estiment que ce n'est pas leur rôle et dénoncent le système des pénalités.

Texte de la réponse

OBLIGATION DES DISTRIBUTEURS DE COMBUSTIBLES D'INCITER LEURS CLIENTS À ENGAGER DES TRAVAUX D'ÉCONOMIES D'ÉNERGIE


M. le président. La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, pour exposer sa question, n°  1237, relative à l'obligation des distributeurs de combustibles d'inciter leurs clients à engager des travaux d'économies d'énergie.

Mme Isabelle Le Callennec. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Depuis plusieurs années, les fournisseurs d'énergie ont l'obligation d'inciter leurs clients à faire des travaux d'économies d'énergie. À défaut, ils doivent s'acquitter d'une amende. Pour certaines entreprises, considérées comme insuffisamment actives, la pénalité peut s'élever à plusieurs milliers d'euros.

En plus de cette obligation, un décret et deux arrêtés ministériels sont parus au Journal officiel du 31 décembre dernier, qui s'applique depuis le 1er janvier : l'incitation est devenue une obligation et la pénalité s'est alourdie de quatre euros du mètre cube.

Si l'objectif de réduire la facture énergétique des ménages est tout à fait partagé, il est permis de s'interroger sur la pertinence de demander aux fournisseurs d'énergie, je pense à ceux qui livrent le fuel domestique en particulier, d'identifier les ménages concernés.

Comment un livreur de combustible peut-il en effet évaluer, lors d'une simple livraison, la situation de précarité énergétique d'un ménage ? Les services de l'État demandent ainsi aux entreprises, non seulement de repérer les familles en précarité énergétique, mais aussi de les obliger à engager des travaux d'économies et d'établir, le cas échéant, les dossiers de demande d'aide, tout en risquant une amende en cas de manquement.

Est-ce vraiment leur rôle quand on sait à quel point la conjoncture est difficile pour elles, suite à la baisse du pouvoir d'achat des ménages ? D'autres acteurs ne pourraient-ils être mobilisés, comme EDF qui dispose de données exploitables, ou les conseils départementaux, dont les services sociaux ont à connaître de la situation de précarité énergétique ? Ce sont tout de même ces derniers qui gèrent le fonds de solidarité pour le logement.

De surcroît, ces nouvelles dispositions ont été imposées sans réelle expertise de faisabilité, d'après les nombreux témoignages que j'ai recueillis.

Quels considérants ont fondé ce décret ? Y a-t-il une chance pour que ce que décret a fait, décret défasse ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des droits des femmes.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État chargée des droits des femmes. Madame la députée Isabelle Le Callennec, l'article 1er de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte inscrit la lutte contre la précarité énergétique parmi les enjeux de la politique énergétique. Il fixe également l'objectif de réduire la consommation énergétique finale de 50 % en 2050 par rapport à la référence 2012, en visant un objectif intermédiaire de 20 % en 2030.

Le logement est l'un des principaux secteurs consommateurs d'énergie. La loi fixe l'objectif de rénover énergétiquement 500 000 logements par an à compter de 2017, pour moitié occupés par des ménages aux revenus modestes, visant ainsi une baisse de 15 % de la précarité énergétique d'ici 2020. Pour atteindre ces objectifs, le Gouvernement met en place le chèque énergie dont l'expérimentation vient d'être annoncée.

La loi de transition énergétique a également créé, dans son article 30, une nouvelle obligation d'économies d'énergie au bénéfice des ménages en situation de précarité énergétique, qui s'ajoute à l'obligation existante dans le cadre du dispositif des certificats d'économie d'énergie – CEE. Cette nouvelle obligation a pris effet le 1er janvier de cette année et vise des économies d'énergie à hauteur de 150 térawattheures cumulés actualisés d'ici fin 2017. Elle permettra de mobiliser de l'ordre de 1 milliard d'euros pour soutenir les travaux d'efficacité énergétique des ménages aux plus faibles revenus, ce qui créera de l'activité et des emplois.

Les modalités de mise en œuvre ont été établies au plus près du dispositif existant. Les plus petits vendeurs d'énergie ne sont pas soumis à obligation grâce à l'application d'une franchise. La pénalité en cas de non atteinte des objectifs par les énergéticiens a été réduite, par rapport au dispositif préexistant, à 15 euros par mégawattheure. Cette mesure ne devrait cependant pas se révéler nécessaire, les énergéticiens soumis à l'obligation pouvant déléguer tout ou partie de leur obligation à des tiers, acquérir des certificats sur le marché, remplir leur obligation en contribuant à des programmes CEE.

Grâce à ce nouveau dispositif, deux programmes CEE ont d'ores et déjà été validés par arrêté. Il s'agit du programme « SLIME », qui vise l'identification et l'accompagnement de 10 000 ménages par an, et du programme « Pacte Énergie Solidarité », qui vise l'isolation des combles de 5 000 à 10 000 ménages modestes d'ici la mi-2017. D'autres acteurs, comme l'Agence nationale de l'habitat, les bailleurs sociaux ou les collectivités territoriales, mènent des actions pouvant donner lieu à délivrance de CEE « précarité énergétique ».

Dans ses objectifs et les mesures mises en œuvre, la France se doit d'être à la hauteur de l'ambition de l'accord de Paris trouvé à l'issue de la COP21, et de veiller à accompagner et à soutenir les ménages modestes dans la transition énergétique.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Le Callennec.

Mme Isabelle Le Callennec. Je vous remercie pour votre réponse. La lutte contre la précarité énergétique est partagée et nous souhaitons tous alléger la facture des ménages. Rappelons, à propos des 150 térawattheures, que cet objectif a été revu suite à la mobilisation des fournisseurs d'énergie contre le projet initial du Gouvernement qui l'avait fixé à 250 !

Une question demeure, celle de la définition des petits fournisseurs. Les entreprises de ma circonscription seront pénalisées si elles n'ont pas rempli les objectifs. Ce n'est pas leur rôle.