14ème législature

Question N° 1263
de M. Daniel Fasquelle (Les Républicains - Pas-de-Calais )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Environnement, énergie et mer

Rubrique > chasse et pêche

Tête d'analyse > chasse

Analyse > oiseaux migrateurs. dates de chasse.

Question publiée au JO le : 09/02/2016
Réponse publiée au JO le : 17/02/2016 page : 1287
Date de changement d'attribution: 09/02/2016

Texte de la question

M. Daniel Fasquelle attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur l'interdiction de la chasse aux oies en février en France alors que dans d'autres États de l'Union européenne, la chasse aux oies, s'apparentant à une destruction programmée de cette espèce, est proposée toute l'année à des chasseurs fortunés. Il s'étonne par ailleurs que le rapport parlementaire rédigé par M. Plisson sur la chasse des oies ait omis de relever l'existence de cette chasse aux oies touristique et annuelle en Hollande qui, potentiellement, concerne les mêmes animaux que ceux dont la chasse est interdite aux sauvaginiers français en février. Il lui demande donc quelles mesures elle entend prendre pour réparer cette injustice flagrante et permettre aux chasseurs français de pratiquer une chasse raisonnable, de l'ordre de quelques centaines d'oies, au mois de février, permettant une gestion raisonnée de cette espèce.

Texte de la réponse

CHASSE AUX OIES


M. le président. La parole est à M. Daniel Fasquelle, pour exposer sa question, n°  1263, relative à la chasse aux oies.

M. Daniel Fasquelle. Madame la secrétaire d'État auprès du ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité, la période de chasse aux oies grises a pris officiellement fin le 31 janvier dernier. Pour la seconde année consécutive, le Gouvernement, par la voix de Ségolène Royal a accordé, de façon officieuse, la possibilité de chasser ces espèces pendant dix jours supplémentaires, créant une nouvelle catégorie de chasseurs : les braconniers légaux. Vous comprendrez que cette situation n'est absolument pas satisfaisante. Depuis plusieurs années, les chasseurs demandent en effet à pratiquer une chasse durable des espèces migratrices, lorsque celles-ci sont en état de conservation favorable, voire très favorable. Or, c'est le cas des oies grises européennes, que nous chassons sur le territoire métropolitain.

Dois-je vous rappeler que de nombreux États européens voisins ont décrété ces mêmes espèces nuisibles, et que leur destruction se pratique toute l'année avec des moyens d'ailleurs difficilement acceptables – gazage, bastonnade, voire éradication par la faim ? Et pendant ce temps, les chasseurs français ne comprennent pas que la chasse soit interdite dans notre pays.

Le Conseil d’État a condamné régulièrement dans le cadre de la directive Oiseaux les arrêtés de prolongation de la chasse pris par plusieurs de vos prédécesseurs, reprochant aux chasseurs de ne pouvoir étayer scientifiquement leur demande légitime, en particulier en raison du manque de données sur les dates migratoires prénuptiales. En 2009, la Fédération nationale des chasseurs, la FNC, a donc débloqué les fonds nécessaires à la mise en œuvre d'une étude scientifique indiscutable. La publication au début du mois de janvier 2016 du rapport technique et scientifique du volet « oie cendrée » de la convention de recherche P.R.O.C.E.E.D.-FNC sous l'égide du docteur Mathieu Boos a répondu clairement aux interrogations du Conseil d’État au travers de deux constats.

Premier constat : l'Europe n'abrite qu'une seule population d'oies, et non des sous-populations en différents états de conservation. Cet argument, longtemps avancé par les anti-chasse, n'a donc aucun fondement scientifique. Deuxième constat : des balises apposées sur les oies durant cinq ans ont prouvé que les mouvements migratoires prénuptiaux devaient être dissociés des mouvements erratiques climatiques et nutritionnels qui, eux, peuvent intervenir à tout moment durant la période hivernale. Il a donc été clairement prouvé qu'avant la deuxième décade de février, aucune oie grise n'entreprend de trajet de retour sur les lieux de nidification.

Ma question est donc simple : quand allez-vous enfin entendre ces arguments scientifiques et donner gain de cause aux chasseurs ? À quel moment, à présent que les chasseurs ont rempli leur part du contrat, allez-vous donner raison aux acteurs de la biodiversité qu'ils sont, et va-t-on enfin clore ce dossier, qui suscite beaucoup d'incompréhension de la part des chasseurs de gibier d'eau français ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la biodiversité. Permettez-moi de vous féliciter pour votre promotion et de vous présenter tous mes vœux de succès, madame la secrétaire d'État.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État chargée de la biodiversité. Je vous remercie, monsieur le président.

Monsieur le député, je vous prie tout d'abord d'excuser Mme Ségolène Royal, ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, qui ne peut être présente ce matin car elle préside le CNTE, le Conseil national de la transition écologique, et qui m'a chargée de vous répondre.

Vous m'interrogez sur une question un peu différente de celle qui était prévue concernant une organisation qui autorise, moyennant une participation financière élevée, la chasse aux oies sans limitation de quantité, toute l'année. Chacun comprendra aisément que les règles de la chasse aux oies en France ne sauraient être déterminées par cette offre touristique proposée aux Pays-Bas. C'est la raison pour laquelle le rapport de M. Philippe Plisson ne traite pas de ce sujet.

Les chasseurs de gibier d'eau soutenus par la Fédération nationale des chasseurs demandent chaque année la prolongation de la chasse des oies jusqu'au 10 février. Plusieurs arrêtés prolongeant la chasse des oies en février ont été annulés par le Conseil d’État depuis 2011 au motif de la protection de ces espèces et afin d'éviter les risques de confusion entre différentes espèces, l'oie des moissons, l'oie rieuse et l'oie cendrée. Dans ses différents arrêts, le Conseil d’État s'est dit favorable à un examen des données nouvelles concernant la fixation de cette date. Or, une étude conduite par l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, dont les résultats ont été rendus en novembre 2014, ne permet pas de remettre en cause la date de fermeture de la chasse validée par la Haute juridiction.

La demande de prolongation de la chasse à l'oie cendrée au-delà du 31 janvier formulée en 2015 portait quant à elle sur une dérogation prise en application de l'article 9.1.c de la directive Oiseaux. Une fois encore, il apparaît clairement que cette requête ne répond pas aux critères nécessaires à l'octroi d'une telle dérogation.

Le 30 janvier 2015, Ségolène Royal avait interrogé à ce sujet M. Karmenu Vella, commissaire européen. Ce dernier a confirmé que la dérogation demandée ne respecte pas la condition liée à l'absence d'autre solution satisfaisante. Par ailleurs, au vu des risques de confusion avec l'oie cendrée, la chasse aux oies des moissons et aux oies rieuses ne saurait être envisageable. Comme le précisait Mme la ministre dans son courrier en date du 16 janvier 2015 adressé à la Fédération nationale des chasseurs, l'élaboration d'un plan de gestion international de l'oie cendrée reste la piste à privilégier pour remédier à une situation au sujet de laquelle vous vous interrogez tout à fait légitimement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Fasquelle.

M. Daniel Fasquelle. Voilà des années que le Gouvernement évoque ce plan de gestion européen, voire international – M. Martin déjà l'avait fait avant Mme Royal – et on ne voit absolument rien venir. Le rapport de M. Plisson est malheureusement vide de toute proposition concrète. Je regrette que le Gouvernement ne s'appuie pas sur les nouvelles données scientifiques qui datent de janvier 2016. Vous vous référez à des études de 2014 et de 2015, madame la secrétaire d'État, mais nous disposons à présent de données nouvelles, et il est plus que temps d'en tenir compte. Elles se fondent sur un travail très approfondi et très étayé. Je réitère donc cette demande au nom des chasseurs de gibier d'eau auprès du Gouvernement, afin qu'on ne revive pas la même situation l'année prochaine. Il faut que celui-ci prenne rapidement connaissance de cette étude et en tire toutes les conséquences. Vous constaterez qu'on peut parfaitement autoriser la chasse de gibier d'eau pendant deux décades en février si on en a réellement la volonté politique dans le cadre de la directive Oiseaux et des dérogations qu'elle permet.