14ème législature

Question N° 1264
de Mme Isabelle Attard (Écologiste - Calvados )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social
Ministère attributaire > Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

Rubrique > travail

Tête d'analyse > conditions de travail

Analyse > Amazon. perspectives.

Question publiée au JO le : 31/10/2013
Réponse publiée au JO le : 31/10/2013 page : 10771

Texte de la question

Texte de la réponse

CONDITIONS DE TRAVAIL CHEZ AMAZON


M. le président. La parole est à Mme Isabelle Attard, pour le groupe écologiste.

Mme Isabelle Attard. Monsieur le président, nous saluons cette bonne nouvelle concernant les otages français libérés et nos pensées vont vers les sept qui sont encore détenus ainsi qu'à leurs familles.

Chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre du travail.

Je profite de cette question pour proposer à mes collègues députés un changement des règles de notre assemblée. Nous posons nos questions aux ministres en deux minutes. Nos performances ne s'améliorent jamais. Nous semblons incapables d'augmenter notre productivité. Je vous propose qu'à compter de novembre, chaque député dispose d'une seule minute puis, en décembre, de trente secondes. Nous serons ainsi efficaces et productifs. (Murmures sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Cela vous paraît aberrant, injuste ? Tant mieux, car aujourd'hui la Une du Monde diplomatique est consacrée à Amazon, une entreprise à la politique managériale très rigide.

La direction d'Amazon choisit un lieu déclassé, avec un fort taux de chômage et obtient ainsi des aides financières, et une image de bienfaiteur.

Un député du groupe UDI . C'est Montebourg !

Mme Isabelle Attard. Elle recrute un grand nombre d'intérimaires, en promettant un CDI aux meilleurs et organise ses entrepôts de manière stakhanoviste : le salarié ne dispose d'aucune autonomie ; une machine lui dit où aller, quoi faire, chaque déplacement est mesuré, chaque ralentissement provoque un rappel à l'ordre des contremaîtres.

La direction d'Amazon ne demande pas une production fixe à chaque employé mais simplement faire mieux que la veille. C'est donc une course perpétuelle qui ne mène qu'à l'épuisement, et à l'abandon.

Ces conditions de travail que nous refuserions en tant que parlementaire, comment seraient-elles acceptables pour d'autres ?

Cette entreprise prétend créer des emplois alors qu'elle en détruit bien plus dans les chaînes de distribution et surtout chez les libraires indépendants. Ces destructions d'emplois sont pourtant subventionnées par les collectivités locales, alors qu'Amazon pratique abondamment l'évasion et l'optimisation fiscale : le manque à gagner fiscal se chiffre en centaines de millions d'euros.

L'inspection du travail intervient régulièrement dans cette entreprise mais la loi du silence, imposée aux salariés par le règlement intérieur, complique la tâche de ceux qui enquêtent. J'ai aussi été avertie que l'intégralité des données personnelles des salariés serait transmises au siège de Seattle.

Monsieur le ministre, nous vous demandons de lancer une enquête globale sur les pratiques d'Amazon envers ses salariés, en y associant la CNIL, au vu de l'automatisation poussée de l'organisation. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Madame la députée, chacun connaît bien cette entreprise Amazon qui a installé quatre grandes bases logistiques couvrant une grande partie de notre pays…

M. Marc Le Fur. En Saône-et-Loire !

M. Michel Sapin, ministre. …dans le Loiret, en Saône-et-Loire, dans la Drôme et tout récemment dans le Nord, avec la création de 2 500 emplois de plus d'ici 2015.

Cette entreprise est bien connue de mes services en raison d'une organisation du travail interne qui mérite effectivement d'être suivie très attentivement. Mes services et ceux de l'inspection du travail – qui agissent de manière indépendante – sont intervenus plusieurs fois dans différents établissements du groupe.

D'abord il s'agissait de vérifier les conditions de recours au travail temporaire, un type de contrat très utilisé par l'entreprise dont l'activité fortement saisonnière augmente notamment au moment des fêtes. Mes services ont été très attentifs au respect de la loi en la matière.

Ensuite, il s'agissait de veiller aux conditions de sécurité liées à l'utilisation de certains équipements.

Enfin, les conditions de travail que vous avez décrites nécessitent une surveillance médicale des salariés, tout particulièrement de ceux qui travaillent de nuit, compte tenu de l'organisation du travail. J'ai demandé à mes services, dans le cadre de leur mission, d'être particulièrement attentifs sur l'ensemble du territoire au respect de la loi.

Je leur ai aussi demandé – et cela me semble particulièrement important – d'être les artisans d'un dialogue social au sein de l'entreprise. Sans dialogue social, sans capacité d'expression reconnue aux uns et aux autres – à la direction mais aussi aux salariés – aucune amélioration du climat social n'est possible.

Le respect de la loi d'un côté, c'est la mission de l'inspection du travail ; le dialogue social de l'autre, c'est le travail de mes services. Ainsi, cette entreprise pourra effectivement créer des emplois sans pour autant porter atteinte aux conditions de travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)