14ème législature

Question N° 1270
de M. Alain Bocquet (Gauche démocrate et républicaine - Nord )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > système pénitentiaire

Tête d'analyse > détenus

Analyse > troubles mentaux. prise en charge.

Question publiée au JO le : 17/07/2012 page : 4400
Réponse publiée au JO le : 24/06/2014 page : 5273
Date de changement d'attribution: 03/04/2014

Texte de la question

M. Alain Bocquet attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la prise en charge des détenus suite à l'ouverture des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA). L'article L. 3214-1 du code de la santé publique dispose que « les personnes détenues admises en soins psychiatriques ne peuvent l'être que sous la forme d'une hospitalisation complète [...] dans un établissement [...] au sein d'une unité hospitalière spécialement aménagée ou, sur la base d'un certificat médical, au sein d'une unité pour malades difficiles ». D'autre part, l'article R. 3214-2 du code de la santé publique précise que « lorsque l'unité spécialement aménagée territorialement compétente n'est pas en mesure de prendre en charge une personne détenue, faute de place disponible, son hospitalisation est recherchée au sein de l'unité spécialement aménagée la plus proche ». Enfin, l'article D 398 du code de procédure pénale dispose que « au vu d'un certificat médical circonstancié et conformément à la législation en vigueur, il appartient à l'autorité préfectorale de faire procéder, dans les meilleurs délais, à leur hospitalisation d'office dans un établissement de santé habilité au titre de l'article L. 3214-1 du code de la santé publique ». Au vu des textes législatifs et réglementaires, plus rien ne permet de prendre en charge les détenus atteints de troubles mentaux dans le cadre du droit commun en psychiatrie générale. Or un processus dérogatoire se met en place dans certains établissements, qui annoncent un fonctionnement d'hospitalisations programmées en renvoyant les urgences concernant les détenus sur la psychiatrie générale. Si cette pratique persiste, paradoxalement les situations les plus simples seraient prises en charge par un service adapté (UHSA) et les situations de crise les plus difficiles continueraient à être prises en charge avec de grandes difficultés par la psychiatrie générale. Il lui demande la connaissance qu'il a de ces situations et la conduite opposable à tous les intervenants.

Texte de la réponse

L'article 48 II de la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 dispose : « dans l'attente de la prise en charge par les unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) mentionnées à l'article L. 3214-1 du code de la santé publique, l'hospitalisation des personnes détenues atteintes de troubles mentaux continue d'être assurée par un service médico-psychologique régional (SMPR) ou un établissement de santé habilité dans les conditions prévues par les dispositions réglementaires prises sur le fondement des articles L. 6112-1 et L. 6112-9 du même code ». Les SMPR ne peuvent recevoir que des personnes détenues avec leur consentement, les personnes détenues en hospitalisation sans consentement relevant pour leur part des établissements de psychiatrie générale. L'article 3214-2 s'applique dès lors que l'UHSA territorialement compétente est ouverte et se trouve, faute de place disponible, dans l'incapacité de prendre en charge des personnes détenues. L'interprétation large de cet article pourrait amener à penser que les premières UHSA ouvertes ont une vocation d'accueil national, mode opératoire qui n'a pas été retenu par le législateur au vu du nombre de places limité de ces unités. Par conséquent, une hospitalisation sans consentement ne peut être réalisée qu'au sein de l'UHSA compétente territorialement ou en psychiatrie générale, dans l'attente de la mise en service des autres unités hospitalières. Les UHSA en service doivent pouvoir accueillir les hospitalisations programmées, tout comme les urgences, sans qu'une distinction puisse s'opérer sur le régime d'hospitalisation, actuellement partagé à part égale entre les deux types d'hospitalisation. Les centres hospitaliers spécialisés viennent donc simplement en renfort des UHSA lorsque ces dernières se trouvent dans l'incapacité matérielle d'accueillir des personnes détenues faisant l'objet d'une hospitalisation sans consentement. Concrètement, outre les soins qui sont assurés par les unités sanitaires présentes au sein de chaque établissement pénitentiaire, chaque région pénitentiaire dispose d'un ou plusieurs services médico-psychologiques (SMPR) rattachés à un établissement de santé public ou privé. 26 SMPR sont actuellement opérationnels sur l'ensemble du territoire. Afin de recentrer les SMPR sur les soins ambulatoires et pour venir épauler ces structures, la loi d'orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002 a acté la mise en place d'unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA). Alors que 3 sites seulement étaient en fonctionnement à l'arrivée de la Garde des Sceaux, leur nombre aura triplé d'ici 2015, de sorte que 440 détenus pourront être accueillis dans ces unités spécialisées. En 2013, ce sont ainsi 4 UHSA qui ont ouvert leurs portes (Orléans, Paris, Lille et Rennes). Une seconde tranche de construction permettra par la suite l'ouverture de 8 autres UHSA à partir de 2015 (pour un total de 265 places supplémentaires). En outre, le ministère de la justice et le ministère des affaires sociales et de la santé travaillent conjointement à l'amélioration de la prise en charge des personnes détenues souffrant de pathologie psychiatrique dans le cadre d'un groupe de travail installé en février 2013 sur la question de la compatibilité des troubles mentaux avec la détention, et plus particulièrement la suspension de peine pour ce motif médical. La Garde des sceaux conduit depuis sa nomination une politique pénitentiaire qui vise à garantir la dignité des personnes incarcérées, particulièrement celles en situation de faiblesse ou de perte d'autonomie (troubles psychiatriques, personnes âgées et handicap).