14ème législature

Question N° 14296
de Mme Geneviève Gaillard (Socialiste, républicain et citoyen - Deux-Sèvres )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère attributaire > Agriculture, agroalimentaire et forêt

Rubrique > énergie et carburants

Tête d'analyse > agrocarburants

Analyse > développement. conséquences.

Question publiée au JO le : 25/12/2012 page : 7640
Réponse publiée au JO le : 05/02/2013 page : 1303

Texte de la question

Mme Geneviève Gaillard attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur la répartition des terres agricoles consacrées aux agro-carburants et de celles consacrées au développement de l'agriculture biologique. Les agro-carburants de première génération dont la production a été encouragée jusqu' à maintenant révèlent aujourd'hui de nombreuses contradictions. Malgré des émissions de carbone neutres à la combustion, leur production pose de graves problèmes environnementaux tels que l'emprise sur les terres arables, la perte de biodiversité due à la monoculture et l'utilisation accrue d'engrais et pesticides, la surconsommation en eau et des problèmes sociétaux, au regard de la famine et de la malnutrition qui sévissent dans le monde. De nombreux rapports mondiaux attestent pourtant que le transfert de terre de la production de nourriture vers la production de biomasse énergétique favorise famine et pauvreté dans le monde. Le rapport annuel de la FAO publié le 6 décembre 2012 tirant une nouvelle fois la sonnette d'alarme sur cette situation dramatique. Fin 2011, 23 135 exploitations agricoles sont engagées en agriculture biologique représentant 4,5 % des exploitations agricoles en France. Les surfaces conduites en agriculture biologique représentent plus de 3,5 % de la surface agricole de la France. De plus, un quart du temps de travail en exploitation biologique est effectué par des salariés permanents contre 17 % en conventionnel. Les exploitations en agriculture biologique au final génèrent plus d'emploi et de valeur ajoutées sur les produits que les exploitations conventionnelles. Personne n'est sans savoir que les objectifs de production en AB n'ont pas été remplis, et ce alors même que tant pour l'environnement, la santé humaine et animale, et l'économie, cette agriculture présente des avantages incontestables pour la société. C'est d'ailleurs pourquoi nous avons voté récemment l'amendement gouvernemental en faveur de la prolongation du crédit d'impôt pour l'agriculture biologique. Les objectifs du Grenelle étant loin d'être atteints et le développement des agro-carburants favorisant atteintes à l'environnement et famine dans le monde, il lui demande quelles mesures il compte prendre afin d'inciter de façon plus ambitieuse et active à la diminution des cultures d'agro carburants et favoriser à la place le développement de l'agriculture biologique en France et avec quel calendrier.

Texte de la réponse

Les filières biocarburants sont importantes, tant pour atteindre nos objectifs communautaires en matière d'énergie renouvelable et d'émissions de gaz à effet de serre, que pour limiter la dépendance énergétique de la France dans les transports et favoriser le développement de la chimie bio-sourcée. La directive « énergie renouvelable » introduit des critères de durabilité pour les biocarburants et les bioliquides : réduction des émissions de gaz à effet de serre, protection des terres riches en biodiversité et en carbone. Ces critères s'appliquent à l'ensemble des biocarburants consommés dans l'Union européenne et pouvant participer aux objectifs de développement des énergies renouvelables dans les transports, et ce, quelle que soit leur origine et les matières premières utilisées. Par ailleurs, le bilan énergétique et environnemental (hors changements d'affectation des sols) des biocarburants des filières françaises et européennes est bon comme le confirme une étude de l'ADEME de 2010. La manière de prendre en compte le changement d'affectation des sols indirect (CASI) a fait l'objet de travaux menés par la France et la Commission européenne. C'est un sujet complexe, dont les impacts sont difficiles à évaluer, et qui par ailleurs ne concerne pas uniquement les biocarburants, mais potentiellement toute politique ou action consommant de l'espace agricole ou d'intérêt environnemental dans le monde. Concernant les soutiens aux filières de production de biocarburant, les volumes de biocarburants donnant droit à défiscalisation diminuent depuis fin 2011 en France, et arriveront à extinction fin 2015. Devant les difficultés rencontrées par la filière, le Gouvernement a choisi pour 2013 de maintenir le régime de défiscalisation actuel, et de procéder à l'agrément, avant le 31 décembre 2012, de nouveaux volumes donnant droit à défiscalisation jusqu'à la fin de l'année 2015. Ces nouveaux volumes ne compensent que partiellement les volumes arrivés à échéance, et la défiscalisation sera progressivement abaissée à partir de 2014 jusqu'à sa suppression fin 2015. Parallèlement, la situation du marché mondial des céréales a conduit le Gouvernement à annoncer une pause dans le développement des biocarburants de 1re génération, qui seront limités à 7 % d'incorporation. La France portera également cette position sur les biocarburants au niveau européen. Il s'agit à la fois de ne pas mettre en péril la filière industrielle française, et de faciliter la transition vers les biocarburants avancés (2nde génération sur base cellulosique, puis 3e génération sur base d'algues). En effet les biocarburants avancés, en cours de développement par cette même filière, offrent des perspectives prometteuses et nécessaires à la transition énergétique à moyen terme, en complément des filières actuelles, dans le cadre d'une stratégie de diversification des sources de production de bioénergie compatible avec les questions environnementales et la priorité à la sécurité alimentaire (respect de la hiérarchisation des usages). A ce titre, il est important d'encourager dès maintenant leur émergence. Concernant le secteur de l'agriculture biologique, au cours des dernières années, la dynamique de croissance se confirme en France, avec des taux annuels de progression à deux chiffres au cours des dernières années concernant tant la production que la consommation. 4,6 % des exploitations françaises sont des exploitations bio, valorisant plus de 3,7 % de la SAU française. Ce secteur a bénéficié du plan « agriculture biologique : horizon 2012 », arrivé à échéance à la fin de l'année 2012, sans atteindre l'objectif initial fixé à 6 % de SAU en agriculture biologique, et avec un développement qui reste contrasté selon les filières et les régions. Afin de donner un élan supplémentaire au développement de l'agriculture biologique en France, un programme national « ambition bio 2017 » sera élaboré en concertation avec les acteurs concernés. Un premier objectif est fixé dans la feuille de route gouvernementale pour la transition écologique : doubler le pourcentage de surface agricole en agriculture biologique d'ici fin 2017 par rapport à 2012. Il sera complété par d'autres objectifs opérationnels, quantitatifs et qualitatifs, définis pour l'ensemble des composantes de la filière que sont la production, la transformation et la commercialisation, en lien avec la consommation. Ce programme sera élaboré d'ici juin 2013, après notamment une large concertation régionale prévue jusqu'à mi mars 2013. Un comité de pilotage, associant les représentants professionnels et l'administration, a été mis en place par le cabinet du ministre en septembre 2012 pour définir la méthode de travail et suivre la préparation du programme. Il se réunira de nouveau à partir de fin mars, une fois les remontées régionales réalisées. Pour 2013, des engagements ont d'ores et déjà été pris en plus de la prolongation du crédit d'impôt, concernant notamment la reconduction des aides aux producteurs pour la conversion et le maintien en agriculture biologique et la reconduction du fonds de structuration des filières biologiques (« Avenir Bio »).