LUTTE CONTRE LE TRAFIC DE DROGUE DANS LES ZONES DE SÉCURITÉ PRIORITAIRE
Mme la présidente. La parole est à M. Razzy Hammadi, pour exposer sa question, n° 1447, relative à la lutte contre le trafic de drogue dans les zones de sécurité prioritaire.
M. Razzy Hammadi. Ma question s'adressait au ministre de l'intérieur. Je souhaitais appeler son attention sur la question des zones de sécurité prioritaires, en particulier sur leur adaptation au déplacement de certaines problématiques, comme la lutte contre les stupéfiants, et sur les effets de bord.
Le 11 avril 2016, Sébastien Piffeteau, vice-procureur du tribunal de Bobigny et magistrat en charge de la division des affaires criminelles et de la lutte contre la délinquance organisée, rappelait dans un article les caractéristiques du trafic de cannabis en Seine-Saint-Denis. Son chiffre d'affaires annuel est estimé à 1 milliard d'euros. Les points de vente sont connus : les cités Soubise et Émile-Cordon dans le vieux Saint-Ouen et le quartier Zola-Arago, plus au sud de la commune ; la cité des 4 000 à La Courneuve ; les Beaudottes à Sevran ; les Mille-Mille à Aulnay-sous-Bois – j'en passe.
Dans le cadre de la politique de sécurité et de lutte contre la délinquance mise en place par le Gouvernement, quatre zones de sécurité prioritaires ont été créées en 2012 et en 2013 à Saint-Ouen, Saint-Denis, Sevran-Aulnay-sous-Bois et Aubervilliers-Pantin, avec de bons résultats : baisse des atteintes aux biens, baisse des atteintes aux personnes et augmentation des effectifs de police.
Dans ma circonscription, les plus gros points de vente de cannabis sont la cité de La Noue à Montreuil et le quartier de la Capsulerie à Bagnolet. Les habitants de ces quartiers vivent un enfer. Le maire de Bagnolet, Tony Di Martino, vous a interpellé pour demander la création d'une brigade de sécurité territoriale. En effet, la Capsulerie est un quartier ultra-enclavé, situé à l'intersection de la ligne 3 du métro, de l'autoroute A3 et de la gare routière internationale Eurolines. J'appelle votre attention sur les problèmes qui pourraient se poser à l'occasion des événements sportifs internationaux que nous allons accueillir. C'est un supermarché à ciel ouvert et, je le répète, un enfer pour les habitants.
Pourtant, avec la mise en place de la zone de sécurité prioritaire dans le 20e arrondissement de Paris pour le marché et le détachement d'unités à la porte de Bagnolet, nous avons réussi un travail extraordinaire, notamment concernant la lutte contre la vente à la sauvette. Or, aujourd'hui, le trafic se déplace là où les trafiquants sont moins inquiétés.
À Marseille, la préfecture a mis en place une logique globale, avec une coordination de toutes les directions de la police, des autres services de l'État, des collectivités locales, des acteurs publics et privés et de ceux du monde associatif. À la veille de l'Euro 2016, événement sportif international, le quartier de la Capsulerie est au cœur de l'un des tout premiers pôles hôteliers de la région, avec 700 000 nuitées par an.
J'appelle donc à l'action et à la prise de conscience. Il y a urgence à adopter des mesures concrètes. Nous appelons aujourd'hui, au minimum, à la création d'une brigade de sécurité territoriale. Nous demandons, devant la représentation nationale, que chacun prenne ses responsabilités. Nous sommes en première ligne sur le terrain, avec les habitantes et les habitants et, aujourd'hui, nous n'en pouvons plus.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser M. Bernard Cazeneuve, qui, ne pouvant être présent ce matin, m'a demandé de vous répondre.
Protéger nos concitoyens partout sur le territoire national, lutter contre les incivilités, aussi bien que contre toutes les formes de violence et de criminalité, constitue une priorité du Gouvernement, ainsi que des élus de terrain comme vous, monsieur le député.
Vous évoquez le secteur de la Capsulerie, à Bagnolet, en proie au trafic de stupéfiants. Les problématiques de ce secteur sont spécifiquement prises en compte, le site de la Capsulerie constituant l'un des objectifs départementaux du plan de lutte contre les stupéfiants. Des actions contre le trafic de drogue sont menées dans ce quartier à un rythme soutenu, et les résultats sont au rendez-vous : en 2015, ce sont 31 kilogrammes de cannabis et plus de 26 700 euros d'avoirs criminels qui ont été saisis. Les trois premiers mois de l'année 2016 témoignent d'une intensification de l'activité, que vous avez vous-même constatée sur le terrain, avec près de 23 kilogrammes de cannabis et plus de 6 100 euros d'avoirs criminels saisis. Ces résultats ont été encore amplifiés par la saisie, le 1er avril dernier, de 40 kilogrammes de cannabis. Dès lors, les quantités de cannabis saisies depuis le début de l'année 2016 apparaissent d'ores et déjà comme deux fois supérieures à celles prises sur l'ensemble de l'année 2015. Il y a effectivement urgence à agir.
La réponse adéquate réside-t-elle pour autant dans l'extension de la zone de sécurité prioritaire au quartier de la Capsulerie ? Il s'avère que la création, un peu technocratique, d'une nouvelle ZSP propre à la cité de la Capsulerie ne serait pas pertinente au regard de la taille du territoire concerné. Ce qui importe, c'est d'apporter une réponse concrète. La question n'est pas d'accroître le nombre des ZSP existantes, mais d'en exporter la méthode au-delà de leur périmètre actuel. L'objectif n'est pas d'obtenir un label, mais bien la qualité et la nature du travail réalisé, avec le souci quotidien de nouer des relations de confiance efficaces et durables entre tous les acteurs d'un territoire.
Cette méthode de travail pour traiter efficacement des points concentrés de criminalité est mise en œuvre par les forces de sécurité qui interviennent dans le quartier de la Capsulerie. Par ailleurs, l'ensemble concerné fait déjà l'objet d'une action coordonnée des services départementaux et bénéficie régulièrement de renforts de la police d'agglomération. À titre d'exemple, la saisie importante du 1er avril a été réalisée grâce à une surveillance des effectifs des compagnies de sécurisation et d'intervention – CSI.
Concernant le déport de la délinquance dû à la mise en place de zones de sécurité prioritaires à proximité du quartier de la Capsulerie, la direction territoriale de la sécurité de proximité de Seine-Saint-Denis a mis en œuvre des groupes locaux d'action transversale dans les quartiers limitrophes, ce qui permet d'éviter un éventuel effet de report.
Vous avez raison, monsieur le député, d'insister sur la coordination et la coproduction en matière de politique de sécurité. Cela suppose une action coordonnée de l'ensemble des acteurs publics, autour de réponses concrètes. À cet égard, le déploiement par la ville de Bagnolet d'un dispositif de vidéoprotection qui serait raccordé au réseau du Plan de vidéoprotection pour Paris – PVPP – constituerait certainement une avancée sensible. Ce déploiement nécessite une impulsion de la majorité municipale.
Soyez assuré, monsieur le député, de l'entière mobilisation des forces de police pour garantir la sécurité à Bagnolet, et notamment dans le quartier de la Capsulerie. Le Gouvernement met tout en œuvre pour leur donner les moyens matériels et humains de remplir leurs missions de prévention et de sécurité, toutes deux indispensables. L'État et ses partenaires locaux vont continuer à travailler ensemble pour répondre aux attentes de nos concitoyens. Nous savons, pour cela, pouvoir compte sur votre totale mobilisation, monsieur le député.