droit international
Question de :
M. Jean-Pierre Decool
Nord (14e circonscription) - Les Républicains
M. Jean-Pierre Decool attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la corrélation existante entre manque de transparence fiscale et pauvreté. Seulement 10 % de l'argent de la corruption mondiale permettrait d'éradiquer l'extrême pauvreté dans le monde. Comme l'une des plus grandes sources de richesse dans de nombreux pays en développement est leurs richesses minières, les entreprises extractives opérant dans ces pays portent une responsabilité majeure dans cet enjeu. Les obliger à transmettre la publication des paiements effectués à leur gouvernement respectif, mesure que les États-unis ont déjà établie, est une démarche qui mériterait d'être considérée et adoptée au sein du G 20. En outre, la lutte contre les paradis fiscaux et judiciaires constitue un défi crucial lorsque ces paradis font échapper aux États des sommes considérables et nécessaires à leur développement. En vue des objectifs du millénaire pour le développement, il est indispensable de prendre des mesures contre la corruption et l'évasion fiscale et judiciaire. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui préciser les mesures concrètes envisagées dans le cadre national, européen et international.
Réponse publiée le 11 septembre 2012
La lutte contre les flux illicites de capitaux constitue un enjeu majeur de développement. La France a fait de cette lutte un axe stratégique qu'elle porte dans sa coopération bilatérale et dans les instances européennes et multilatérales. Le Président de la République s'est fermement engagé à combattre les flux financiers illicites et à promouvoir la transparence et la régulation financière indispensable pour stabiliser l'économie internationale et permettre le développement des pays les plus pauvres. Durant sa présidence du G8 et du G20 en 2011, la France a porté au sein de ces deux enceintes et auprès de leurs membres les axes prioritaires du renforcement de la régulation financière, de la lutte contre la corruption, et du soutien au développement socio-économique. Les membres du G20 ont ainsi exprimé leur volonté commune de lutter contre les paradis fiscaux et de faire de la mobilisation des ressources domestiques l'un des piliers de leur politique en faveur du développement. Des progrès réels ont été enregistrés ces dernières années en matière de lutte contre les paradis fiscaux. Ils ont contribué à réduire le degré d'opacité du système financier international. Les pays en développement en ont également bénéficié. Les premières exigences concernaient l'échange d'informations, organisé sur la base de douze conventions bilatérales. Les travaux du Forum mondial sur la transparence et l'échange de renseignements à des fins fiscales permettent désormais, à travers un système de revues par les pairs, de juger réellement de la transparence fiscale des juridictions examinées du point de vue de leur cadre réglementaire comme de la pratique. Aujourd'hui fort de 109 membres, le Forum jouit d'une réelle légitimité. Par ailleurs, la nouvelle Convention multilatérale concernant l'assistance mutuelle en matière fiscale, conclue entre l'OCDE et le Conseil de l'Europe mais ouverte aux Etats non-membres, constitue une avancée dans l'instauration d'un réseau d'échange d'informations efficace. Depuis le sommet du G20 de Séoul en 2010, la mobilisation de ressources fiscales des pays en développement est un enjeu prioritaire du plan d'action du groupe de travail du G20 sur le développement, avec en particulier la volonté de mettre l'accent sur l'évasion fiscale qui grève le développement de ces pays. Les pays en développement sont ainsi incités à rejoindre le Forum fiscal, qui en contrepartie s'engage à reporter les revues des pays adhérents et à favoriser la mise en oeuvre de l'assistance technique nécessaire, à travers une plateforme coordonnant les actions menées dans ce domaine par les organisations internationales. La France est fidèle à ses engagements multilatéraux dans la promotion de la transparence et de la lutte contre la corruption dans le secteur extractif. La coopération française soutient les efforts de l'ensemble des acteurs, au sein des pays producteurs en Afrique et ailleurs, pour accroître les revenus financiers tirés de l'exploitation des ressources et maximiser leur contribution au développement de l'économie réelle. A ce titre, la France soutient activement l'Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE), norme de référence internationale visant à promouvoir la publication et le rapprochement des revenus issus du secteur extractif. Les groupes français Total, Areva, GDF-Suez, Eramet adhèrent à l'Initiative et travaillent localement avec les représentants des gouvernements et de la société civile pour promouvoir la transparence des revenus financiers. La France accompagne les organisations de la société civile actives dans la promotion de la transparence et de la lutte contre la corruption dans ce secteur. En lien avec les ONG françaises réunies au sein de la coalition française de « Publiez ce que vous payez » et de plusieurs ONG internationales telles que Revenue Watch Institue ou Oxfam, elle appuie les initiatives d'ONG d'Afrique subsaharienne dans la promotion de la transparence à travers des actions de plaidoyer, et le développement d'outils de formation et de renforcement des capacités d'un réseau d'associations, de journalistes et de parlementaires, et de populations vivant sur des sites extractifs. La France soutient par ailleurs l'adoption du projet de révision des directives européennes « normes comptables » à l'initiative du commissaire Barnier, actuellement en discussion au Parlement européen, dont l'objectif est de garantir une plus grande transparence de ces flux financiers à travers la transmission d'informations sur les sommes versées aux autorités par l'industrie extractive et les exploitants de forêts primaires. Cette révision introduit une obligation de publier, dans un rapport consolidé spécifique, les paiements significatifs faits aux gouvernements, pays par pays et projet par projet, pour les entreprises cotées sur un marché financier européen réglementé, mais également pour les grandes entreprises non cotées. Les questions de transparence financière du secteur extractif sont régulièrement abordées dans le cadre des relations bilatérales avec les gouvernements de pays producteurs. La France met en place un partenariat renouvelé avec les pays en développement fondé sur la gouvernance démocratique pour aider nos partenaires à consolider leur Etat. Dans ce cadre, l'expertise française est mobilisée pour oeuvrer au renforcement des capacités des administrations fiscales, par des actions destinées à moderniser la gestion et le recouvrement de l'impôt, à professionnaliser le contrôle fiscal, à identifier, rendre publiques les exonérations fiscales accordées et à supprimer celles les moins justifiées. Cet appui a aussi pour objectif de soutenir les pays partenaires désireux de rejoindre le Forum Mondial pour la transparence et l'échange d'informations à des fins fiscales, notamment les pays qui ne disposent pas des capacités administratives nécessaires.
Auteur : M. Jean-Pierre Decool
Type de question : Question écrite
Rubrique : Relations internationales
Ministère interrogé : Affaires étrangères
Ministère répondant : Affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 24 juillet 2012
Réponse publiée le 11 septembre 2012