14ème législature

Question N° 17332
de M. Franck Gilard (Union pour un Mouvement Populaire - Eure )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > gens du voyage

Tête d'analyse > généralités

Analyse > élus municipaux. gestion de crise. formation.

Question publiée au JO le : 05/02/2013 page : 1233
Réponse publiée au JO le : 07/01/2014 page : 254

Texte de la question

M. Franck Gilard rappelle à M. le ministre de l'intérieur la nécessité de mieux informer les responsables de collectivités locales sur la conduite à tenir face aux intrusions ou occupations illicites de roms, sur des terrains publics ou des propriétés de particuliers. Ces élus locaux sont souvent désemparés et se retrouvent confrontés à des situations d'extrême urgence. Ils sont souvent tiraillés entre les cas de troubles à l'ordre public ou de mises en danger, notamment de familles et de mineurs, et leur volonté de venir en aide à des êtres humains en détresse. Il paraît donc souhaitable de mieux informer les responsables des collectivités locales qui sont les premiers à intervenir face à une situation sur le terrain qui entraîne souvent la colère de la population. Une formation spécifique auprès de ces élus pourrait s'avérer particulièrement utile, si ces situations venaient à se multiplier. Il lui demande, en conséquence, de lui indiquer s'il compte répondre positivement à cette proposition.

Texte de la réponse

L'occupation illicite des terrains publics ou privés des collectivités publiques ou des propriétés des particuliers est en effet un sujet préoccupant pour les élus qui doivent souvent concilier la nécessité de protéger l'ordre public, voire le respect de la propriété privée, avec les besoins des populations qui y sont installées. De fait, l'évacuation des terrains illégalement occupés dépend de l'urgence de la situation, du régime juridique applicable aux occupants et la multiplicité des procédures qui en découlent constitue autant de sources d'insécurité pour les élus qui doivent y faire face. Ainsi, lorsque les occupants illicites appartiennent à la communauté des gens du voyage (caractérisée par un mode de vie non sédentaire et donc un habitat mobile), la procédure d'évacuation forcée intervient conformément aux dispositions des articles 9 et 9-1 de la loi du 5 juillet 2000 modifiée relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage et est mise en oeuvre par le préfet, représentant de l'Etat dans le département. C'est donc à cette autorité que les élus locaux, confrontés à une occupation illicite sur le territoire de leur commune, doivent s'adresser dès lors que cette occupation est source de troubles à l'ordre public et que les collectivités concernées respectent leurs obligations au regard du schéma départemental d'accueil des gens du voyage. En effet, dès lors que les conditions fixées par la loi sont réunies, le préfet peut mettre en demeure les occupants de quitter les lieux et procéder à leur évacuation s'ils ne respectent pas l'injonction administrative. Lorsque l'une des conditions sus-énoncées n'est pas remplie ou que les occupants illicites n'entrent pas dans le champ d'application de la loi du 5 juillet 2000 précitée (c'est-à-dire s'ils ne sont pas des gens du voyage), les voies de recours juridictionnels de droit commun peuvent permettre au propriétaire ou au gestionnaire du terrain occupé d'obtenir un jugement autorisant l'expulsion des occupants illicites du terrain. La juridiction compétente dépendra de la domanialité du terrain : - le juge des référés au tribunal administratif si l'occupation concerne le domaine public (article L.521-3 du code de justice administrative) dès lors que l'expulsion présente un caractère d'urgence, notamment en cas de troubles à l'ordre public ou d'atteinte à la continuité du service public, sans qu'il puisse y avoir de contestation sérieuse quant à l'illicéité de l'occupation ; ou - le président du tribunal de grande instance en référé si l'occupation concerne un terrain appartenant au domaine privé d'une personne publique, le domaine public routier ou ses dépendances ou un terrain appartenant à une personne privée. En cas d'occupation du domaine public communal, c'est donc en principe au maire de saisir le juge puis, en cas de carence de ce dernier et après mise en demeure infructueuse, au préfet en vertu de son pouvoir de substitution fondé sur l'article L. 2215-1 du CGCT, si l'occupation illicite emporte des troubles à l'ordre public. L'inaction du maire est susceptible d'engager la responsabilité de la commune devant les tribunaux. Qu'il s'agisse du juge administratif ou judiciaire, seule la décision du juge des référés ordonnant l'expulsion permettra au préfet d'accorder le concours de la force publique dans les conditions fixées par le juge qui peut prescrire un délai ou subordonner la mesure d'évacuation à une solution d'hébergement, lorsque le public concerné est vulnérable. Enfin, en cas d'extrême urgence et de troubles particulièrement graves à l'ordre public, le maire, en sa qualité d'autorité de police générale, peut agir d'office pour rétablir l'ordre public menacé, souvent pour assurer la sécurité même des occupants sans droit ni titre, sans attendre l'intervention du juge (cf. conclusions M. Romieu sous TC, 2 décembre 1902, Société Immobilière Saint Just, n° 00543, publié au recueil Lebon). Dans ce cadre strictement défini par la jurisprudence, sous sa responsabilité et un contrôle étroit du juge administratif, il pourra faire procéder à l'évacuation des occupants d'un campement dangereux si aucune autre option n'est possible. En effet la mesure de police administrative que constitue l'évacuation doit être strictement nécessaire et proportionnée. Enfin, l'article 322-4-1 du code pénal sanctionne le fait de s'installer en réunion, en vue d'y établir une habitation, même temporaire, sur un terrain appartenant à autrui sans être en mesure de justifier de l'autorisation du propriétaire ou du titulaire du droit d'usage du terrain. Lorsque l'installation s'est faite au moyen de véhicules automobiles, il peut être procédé à leur saisie, à l'exception des véhicules destinés à l'habitation, en vue de leur confiscation par la juridiction pénale. Afin de renforcer et d'appuyer le dispositif territorial permettant la mise en oeuvre des orientations de la circulaire du 26 août 2012, relative à l'anticipation et à l'accompagnement des opérations d'évacuation des campements illicites, le Premier ministre a désigné un préfet, délégué interministériel à l'hébergement et à l'accès au logement, pour animer et accompagner un réseau de correspondants locaux désignés par les préfets et assurer un rôle d'interface avec les collectivités territoriales et les associations. C'est ainsi que des réunions fréquentes sont menées par les préfets en collaboration étroite avec les élus. Pour répondre aux nombreuses questions des élus locaux relatives à la mise en oeuvre de ces différentes procédures, les services de l'Etat sont mobilisés : le site intranet du ministère de l'intérieur propose des fiches de procédure opérationnelles, illustrées par une jurisprudence abondante, permettant de sérier les multiples cas de figure et les solutions apportées par les juges. A la disposition des préfectures et sous-préfectures, cette documentation juridique, leur permet de conforter leur action dans la sécurisation juridique des procédures d'évacuation forcée ou d'expulsion de campements illicites ainsi que le traitement des contentieux pouvant en résulter. Rien ne s'oppose à ce que celle-ci soit partagée avec les collectivités territoriales qui en exprimeraient le besoin. Si malgré tous ces dispositifs, les élus étaient demandeurs d'une formation spécifique, celle-ci pourrait être dispensée dans le cadre de leur droit individuel à suivre une formation adaptée à leurs fonctions et dispensée par un organisme agréé par le ministère de l'intérieur, après avis du conseil national de la formation des élus locaux. Une liste de ces organismes, classée par département, est publiée sur le site collectivités-locales. gouv. fr. A la demande des élus et en fonction de leurs domaines de compétence, ces organismes peuvent être amenés à construire et proposer une action de formation adaptée à ces nouveaux besoins. Une formation individuelle est possible.