SAFER
Question de :
Mme Sylvie Tolmont
Sarthe (4e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
Mme Sylvie Tolmont attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur l'application du droit de préemption sur les biens bâtis. Une des limites actuelles au droit de préemption dont dispose la SAFER concerne sa capacité d'intervention sur les bâtiments. Cette difficulté se manifeste de deux manières : le problème de l'usage non agricole d'un bien bâti d'une part ; l'impossibilité de dissocier le bâti du foncier d'autre part. S'agissant du premier problème énoncé, conformément à l'article L 143-1 du code rural, les SAFER ne peuvent exercer leur droit de préemption que sur les bâtiments qui font partie, au moment de la vente, d'une exploitation agricole. Ce cadre légal s'avère restrictif et accentue les difficultés rencontrées par les SAFER pour lutter contre le mitage du foncier agricole. En effet, plusieurs exemples témoignent de cette dérive : des bâtiments situés en zone réservée agricole mais dont la vocation n'était plus agricole au moment de la vente ont ainsi échappé au droit de préemption de la SAFER ; des maisons d'habitation localisées en plein cœur d'exploitations agricoles mais ne présentant pas de destination agricole peuvent être mises à la vente, indépendamment de l'action de la SAFER et de la vente des hectares alentours, ne permettant pas à des agriculteurs d'acquérir l'ensemble, favorisant le départ de terres pour l'agrandissement et non l'installation de jeunes agriculteurs. Face à ce constat, il serait opportun de réviser la législation pour préserver le droit de préemption des Safer sur des bâtiments situés en zone agricole, dès lors que ceux-ci ont conservé une vocation agricole et même s'ils ne font plus partie d'une exploitation agricole au moment de la vente. Concernant la deuxième difficulté exposée en introduction, à l'inverse, il arrive parfois que la Safer soit informée d'unités importantes comprenant du foncier et du bâti d'habitation utilisé par des non agriculteurs. Dans ce cadre, les SAFER ne peuvent exercer un droit de préemption que sur la totalité de la vente et l'appliquer à des fins exclusivement agricoles. Cette restriction ne permet pas de dissocier le bâti du foncier lorsque le bâti ne présente plus d'intérêt agricole, limitant les possibilités d'intervention. Il arrive que des terres sans leurs bâtiments, dont la configuration n'est plus adaptée à l'activité agricole, intéressent des agriculteurs locaux. L'absence de visée agricole sur les bâtiments oblige les SAFER à renoncer à des demandes de préemption, alors même que les terres présentaient un intérêt majeur pour des exploitations du secteur. Pour accompagner le rôle des SAFER au service de l'aménagement des exploitations, une adaptation législative tenant compte de ces éléments serait efficiente. Par conséquent, elle lui demande quelles sont ses intentions sur les deux situations exposées.
Réponse publiée le 11 juin 2013
Le champ d'application du droit de préemption des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER), tel qu'aujourd'hui défini par l'article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime, est limité en cas d'aliénation à titre onéreux de biens bâtis à utilisation agricole. A défaut de faire encore partie d'une exploitation agricole s'agissant des bâtiments d'habitation, ou d'avoir conservé une utilisation agricole pour les bâtiments d'exploitation, ces biens bâtis échappent au droit de préemption des SAFER. Celles-ci peuvent néanmoins acquérir à l'amiable des bâtiments ruraux ne répondant pas à de tels critères. La question de la dissociation du foncier agricole et du bâti d'habitation, relève d'une autre problématique. La réorientation de biens agricoles au bénéfice de non-agriculteurs, et notamment de bâtiments agricoles pouvant être disjoints sans inconvénient lors de la cession des terres d'une exploitation, peut être opérée par les SAFER depuis 1990, aux termes de l'article L. 141-3 dès lors que ces biens sont exclusivement acquis par voie amiable. Ces dispositions qui sont largement mobilisées permettent d'ores et déjà aux SAFER de céder le cas échéant, en vue de favoriser le développement rural et la protection de l'environnement, des bâtiments, chalet ou grange dont la valeur vénale, non agricole, peut excéder celle du foncier seul. Notamment dans les zones à forte pression touristique, de tels bâtiments sont ainsi susceptibles de porter la valeur totale d'un bien au-delà de l'investissement susceptible d'être consenti par un exploitant. En revanche, les conditions d'exercice du droit de préemption interdisent la cession de tout ou partie de biens préemptés à des non-agriculteurs (exception faite du cas des apporteurs de capitaux donnant à bail à des exploitants). Au surplus, le 6° objectif défini à l'article L. 143-2 vise justement « la conservation d'exploitations viables existantes lorsqu'elle est compromise par la cession séparée des terres et des bâtiments d'habitation ou d'exploitation ». La justification même de ce droit de préemption est donc bien de voir réalisées certaines opérations présentant un intérêt agricole plus marqué, par rapport aux acquisitions amiables initiales. Il est logique en conséquence que la latitude soit moindre lors de la cession des biens préemptés. Dans le cadre de l'élaboration du projet de loi d'avenir de l'agriculture, de l'alimentation et de la forêt, des réflexions sont en cours afin de clarifier l'assiette et le périmètre du droit de préemption des SAFER en adéquation avec les objectifs qui lui sont fixés et qui sont prioritairement le soutien à l'installation.
Auteur : Mme Sylvie Tolmont
Type de question : Question écrite
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère répondant : Agriculture, agroalimentaire et forêt
Dates :
Question publiée le 12 février 2013
Réponse publiée le 11 juin 2013