14ème législature

Question N° 1823
de M. Philippe Plisson (Socialiste, républicain et citoyen - Gironde )
Question écrite
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > agriculture

Tête d'analyse > traitements

Analyse > pesticides. épandage aérien. réglementation.

Question publiée au JO le : 31/07/2012 page : 4549
Réponse publiée au JO le : 13/11/2012 page : 6467

Texte de la question

M. Philippe Plisson alerte Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la pratique de l'épandage de pesticides par voie aérienne. Depuis un an, dans de nombreux départements (Ardennes, Ariège, Cher, Guadeloupe, Gard, Gers, Haute-Garonne, Indre, Lot, Martinique, Nièvre...), des préfets autorisent l'épandage aérien de pesticides. À la demande des agriculteurs, ils délivrent des dérogations pour toute une série de fongicides, herbicides, insecticides pour traiter le maïs, le riz, la vigne et les bananiers. Une directive européenne existe pourtant depuis 2009 qui dispose l'interdiction totale d'épandage de pesticides par voie aérienne, interdiction reprise par le Grenelle de l'environnement (article 103), signé entre autres par la précédente ministre de l'écologie, Nathalie Kosciuszko-Morizet. Ces traitements dérogatoires ont été rendus possibles par une circulaire du ministère de l'agriculture datée du 05 mars 2012. Ces dérogations se font courantes, pour laisser place à une pratique de dérogations organisée : elles étaient plus de 800 en 2011, selon plusieurs associations de défense de l'environnement. Il est possible de déroger, nous dit-on, mais sous une condition : que les produits épandus subissent des tests, effectués par l'Anses (ancienne AFSSA), visant à s'assurer de leur inoffensivité. Sept produits ont ainsi déjà été validés par l'Anses, seize autres étaient encore en cours de validation au 31 mars 2012, ce qui fait qu'ils ont été autorisés. Mais là où le bât blesse, c'est que ces évaluations, qui conditionnent l'épandage aérien de pesticides, sont remises en cause par l'agence de santé EFSA, équivalent européen de l'Anses, qui dénonce des méthodes d'évaluations biaisées, dévoile des financements par des fabricants de pesticides eux-mêmes. Des voix se lèvent donc qui s'inquiètent légitimement des risques encourus : premièrement chez les abeilles, le « rucher départemental » : dont le taux de mortalité s'accroîtrait (il serait ainsi de 60 % en Haute-Garonne contre 35 % pour la moyenne nationale), et le comportement serait affecté ; mais également sur la santé publique : quand des corrélations ont été établies entre l'utilisation de pesticides et l'apparition de maladies (cancer, Alzheimer), l'épandage à 50 mètres d'habitations ne peut qu'inquiéter. C'est d'autant plus préoccupant qu'en dépit de l'obligation légale, il n'y a généralement pas de publication-d'annonciation de l'opération 48 heures à l'avance. Les riverains n'ont donc pas la possibilité de se protéger en prévision de l'épandage de produits toxiques. Ils sont en outre totalement exclus du processus de décision d'épandage, seule la possibilité de « déposer leurs observations » dans un registre aux bureaux des directions départementales des territoires leur est laissée. C'est pour toutes ces raisons qu'un concert de protestations, pétition, lettre ouverte, intervention de représentants politiques (élus locaux, mais aussi députés, comme Mme Grèze, députée européenne de la circonscription sud-ouest, et M. Gérard Bapt, député national de Haute-Garonne), a lieu. C'est d'ailleurs dans le corps d'une lettre ouverte, postée sur internet, adressée à Mme Batho, qu'il a trouvé cette question, très juste, qu'il reformule aujourd'hui afin qu'elle puisse y apporter une réponse : il demande pourquoi, alors que l'Europe l'interdit, et qu'elle pourrait risquer des sanctions de la CJUE, la France continue de cautionner l'épandage de pesticides par voie aérienne, quand ce ne sont que quelques agriculteurs et surtout groupes d'agrochimie qui semblent en bénéficier, au détriment du reste de la population, alors que des alternatives sont possibles.

Texte de la réponse

La pulvérisation aérienne de pesticides est interdite en vertu de l'article L.253-1 du code rural conformément à la directive européenne n° 2009/128/CE du 21 octobre 2009. Cependant des dérogations ont été autorisées par arrêté des ministres de l'agriculture et de l'écologie du 31 mars 2011 relatif aux conditions d'épandage des produits mentionnés à l'article L.253-1 du code rural et de la pêche maritime par voie aérienne, pour des motifs exceptionnels et pour une durée limitée, et à condition que cette méthode présente des avantages manifestes pour la santé et l'environnement par rapport à la méthode d'épandage terrestre. Le Gouvernement s'est engagé, dans la feuille de route issue de la Conférence environnementale qui s'est tenue les 14 et 15 septembre dernier, à revenir au principe ferme d'interdiction d'épandage aérien de produits phytosanitaires. Pour ce faire, un bilan des dérogations à l'interdiction d'épandage aérien sera établi d'ici la fin de l'année 2012 par les ministres chargés de l'agriculture et de l'écologie. L'arrêté du 31 mars 2011 encadrant les conditions de dérogations sera révisé en conséquence. Un plan déterminant les conditions dans lesquelles cette pratique devra cesser sera défini par filière d'ici le printemps 2013.