Question de : M. Jean Glavany
Hautes-Pyrénées (1re circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Jean Glavany interroge M. le ministre de l'éducation nationale sur la formation des enseignants des établissements privés d'enseignement. Le rapport préparatoire au vote des crédits affectés à l'éducation nationale par la loi de finances pour 2013 (deuxième partie : les crédits des programmes; I- l'enseignement privé du premier et du second degrés; A- les moyens budgétaires) ouvre un crédit de 66,48 millions d'euros (60,92 millions en 2012) pour la formation initiale et continue des enseignants, avec ce commentaire : "la formation initiale et continue des enseignants connaît une progression positive conséquente (+ 9,12 %) suite à la réintroduction d'une année de formation initiale par le Gouvernement". Par ailleurs, le code de l'éducation stipule dans son article L. 914-1, 5e alinéa, "les charges afférentes à la formation initiale et continue des maîtres susvisés sont financées par l'État aux mêmes niveaux et dans les mêmes limites que ceux qui sont retenus pour la formation initiale et continue des maîtres de l'enseignement public. Elles font l'objet de conventions conclues avec les personnes physiques ou morales qui assurent cette formation dans le respect du caractère propre de l'établissement visé à l'article L 442-1 et des accords qui régissent l'organisation de l'emploi et celle de la formation professionnelle des personnels de l'enseignement privé sous contrat". Ainsi, le coût de la formation d'un enseignant d'un établissement privé ne peut excéder celui de la formation d'un enseignant de l'éducation nationale. Considérant les mesures qui ont conduit les gouvernements précédents à supprimer pratiquement la formation des enseignants de l'enseignement public, que dans le même temps la "charte de la formation de l'enseignement catholique" décrit l'organisation sur deux ans de la formation initiale de ses enseignants, et que le commentaire cité plus haut du rapport parlementaire fait état de la réintroduction d'une année de formation pour justifier l'augmentation de plus de 9 % des crédits affectés aux établissements privés, ces observations conduisent à poser les questions suivantes : selon quels critères est évalué le coût de la formation initiale d'un enseignant de l'enseignement public ? De la formation continue ? Combien d'enseignants de l'enseignement public d'une part, des établissements privés d'autre part ont bénéficié de ces formations au cours des cinq années écoulées ? Quels crédits leur ont été respectivement alloués annuellement ? D'autre part, depuis 1992, contrairement aux dispositions contenues dans l'article L. 914 rappelé ci-dessus, un accord a été conclu pour l'organisation de la formation des enseignants des établissements privés catholiques entre le Secrétariat général de l'enseignement catholique et l'État par son ministre de l'éducation nationale. Nul ne pouvant stipuler pour autrui, avec quelles instances l'État a-t-il passé un accord similaire pour la formation des maîtres des établissements juifs, protestants, musulmans sous contrat, entre autres ? Sans accord explicite, ces établissements reçoivent-ils des subsides pour la formation de leurs enseignants ? Selon quelle procédure, selon quel coût pour un enseignant de chaque famille d'établissements et pour quel montant au cours des cinq années écoulées ces subsides leur ont-ils été éventuellement versés ? Il souhaiterait donc obtenir des réponses précises sur ces différents points.

Réponse publiée le 29 octobre 2013

Il importe de rappeler en premier lieu, que les candidats aux concours de l'enseignement privé passent le même concours que ceux qui choisissent d'enseigner dans le public ; d'autre part, les établissements privés sous contrat s'engagent à respecter les programmes de l'éducation nationale ce qui les associe pleinement au service public de l'éducation nationale. Il est donc conforme à l'intérêt des élèves et à celui du service public que ces enseignants bénéficient de la même formation initiale et des mêmes droits à la formation continue que leurs homologues de l'enseignement public. C'est pourquoi le principe de parité entre l'enseignement public et les établissements d'enseignement privés est mis en oeuvre pour la formation des maîtres, et que les conditions de cette mise en oeuvre sont précisées par le code de l'éducation, à son article L. 914-1. En pratique, le coût de la formation dans l'enseignement public est toujours pris en compte. Il l'est de manière différente selon qu'il s'agit de formation initiale ou de formation continue. Le coût de la formation initiale dans l'enseignement public est déterminé par l'analyse financière d'une formation de 10 futurs enseignants. Sont d'abord pris en compte la rémunération de l'enseignant qui dispense 6 heures de cours (76 €/heure, inchangé depuis 2010), les charges sociales propres à l'organisme privé qui rémunère cet enseignant (56 %), et les frais de déplacement versés aux 10 futurs enseignants stagiaires (24 €/stagiaire) ; est ainsi déterminé un coût de l'activité de formation auquel sont ajoutés forfaitairement 15 % de frais de fonctionnement. Le coût d'un stagiaire qui suit 4 semaines de formation initiale par an est ainsi évalué à 2 188 € ([76 € x 1,56 x 6 heures] + [24 x 10]) x 1,15) / 10 stagiaires x 5 jours x 4 semaines) ; c'est le prix versé par l'État à l'organisme de formation privé pour chaque futur enseignant d'un établissement d'enseignement privé. Le coût de la formation continue dans l'enseignement public est pris en compte après constat budgétaire afin de prévoir le coût de la formation continue d'un enseignant d'un établissement privé. D'une part, est pris en compte le coût budgétaire de la formation continue dans l'enseignement public ; pour ce faire, sont exclus la rémunération des stagiaires (déjà prise en charge par l'État pour les stagiaires des établissements privés) et le coût des formations pour des fonctions qui ne sont pas rémunérées par l'État dans les établissements d'enseignement privés (psychologue scolaire, directeur d'école, conseiller d'orientation-psychologue et conseiller principal d'éducation). D'autre part, est calculé le ratio entre la masse salariale des enseignants des établissements d'enseignement privés et la masse salariale des enseignants du public, les deux masses salariales étant réduites au même périmètre (hors charges, hors frais liés à la formation, ...). Enfin, le ratio est appliqué au coût budgétaire de la formation continue dans l'enseignement public pour prévoir le montant total à verser annuellement à l'ensemble des organismes de formation au titre des enseignants des établissements privés qu'ils reçoivent. Ce montant total était prévu à 34 420 765 € pour 2013 ; il est prévu à 34 545 515 € pour 2014. Le nombre d'enseignants ayant bénéficié d'une formation et les crédits dépensés sur les cinq dernières années sont détaillés dans le tableau suivant, dont les données figurent aux RAP correspondants.

2008 2009 2010 2011 2012
Nombre de bénéficiaires pour la formation initiale 6 568 5 962 3 556 1 393 1 650
Crédits pour la formation initiale 20 M€ 19,6 M€ 19,4 M€ 7,9 M€ 5,2 M€
Nombre de bénéficiaires pour la formation continue 142 836 142 383 140 493 139 443 139 393
Crédits pour la formation continue 32,6 M€ 30,5 M€ 32,1 M€ 33,2 M€ 31,8 M€
L'absence de corrélation parfaite entre l'évolution des effectifs et celle des crédits s'explique par plusieurs motifs. D'abord, les bénéficiaires sont décomptés au titre de l'année civile de la rentrée scolaire alors que les crédits sont gérés sur l'année scolaire, donc sur deux années civiles. Ensuite, s'agissant de la formation initiale, les données sont soumises à de fortes ruptures statistiques puisque en 2008 et en 2009, les stagiaires ressortissaient des IUFM et qu'en septembre 2010 la réforme dite de la « masterisation » a commencé à remplacer ce système. Enfin, s'agissant de la formation continue, le montant prévu au PAP pour l'année n+1 est calculé en fonction de données connues pour l'année n-1. Il est important de préciser que, au titre de la formation des maîtres des établissements d'enseignement privés, l'État ne verse aucune subvention aux établissements d'enseignement privés ou à leurs maîtres ; ces subventions sont versées aux organismes de formation qui dispensent effectivement une formation aux maîtres. C'est donc dans le strict respect de l'article L. 914-1 du code de l'éducation que l'État s'est engagé par convention à verser à divers centres de formation une subvention dont le montant est calculé, au titre de chaque année scolaire, en fonction du nombre d'enseignants que chaque centre reçoit : ce nombre d'enseignants est multiplié par le coût de la formation par enseignant. Le centre de formation dont le caractère propre est lié à l'enseignement catholique, c'est-à-dire FORMIRIS, perçoit donc une subvention pour les seuls (futurs) enseignants qui y suivent une formation, et pour un montant par bénéficiaire de formation identique à celui que perçoivent les autres centres de formation, quelle que soit la « famille d'établissements » dont relèvent les (futurs) enseignants concernés. Pour la formation initiale, outre FORMIRIS, trois autres organismes perçoivent une subvention : « le centre André Neher », dans le respect du caractère propre des établissements qui se réclament de la confession juive ; l'« ISRLF » (Institut supérieur des langues de la République française), pour les futurs maîtres des établissements promouvant l'enseignement immersif dans une langue régionale ; « Eurécole », pour les futurs maîtres de l'enseignement laïc. Les autres réseaux de l'enseignement privé n'ont pas proposé, à ce stade, de passer une convention pour subventionner l'éventuel centre de formation de leurs futurs maîtres dans le respect de leur caractère propre. Pour la formation continue, outre les 4 organismes ci-dessus, 9 autres perçoivent une subvention ; par exemple, la « Fondation Saint-Thomas », pour les enseignants des établissements qui se réclament d'une confession protestante ou l'« Association de formation et de perfectionnement pédagogique » (AFPP) pour les futurs maîtres spécialisés dans l'enseignement aux enfants handicapés.

Données clés

Auteur : M. Jean Glavany

Type de question : Question écrite

Rubrique : Enseignement privé

Ministère interrogé : Éducation nationale

Ministère répondant : Éducation nationale

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 8 octobre 2013

Dates :
Question publiée le 19 février 2013
Réponse publiée le 29 octobre 2013

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