14ème législature

Question N° 19400
de M. Denis Baupin (Écologiste - Paris )
Question écrite
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > énergie et carburants

Tête d'analyse > lignes à haute tension

Analyse > suspension des travaux. décision judiciaire. application.

Question publiée au JO le : 26/02/2013 page : 2043
Réponse publiée au JO le : 19/11/2013 page : 12046
Date de changement d'attribution: 03/07/2013

Texte de la question

M. Denis Baupin attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur les incidents survenus dans la commune du Chefresne le 19 février au matin sur un terrain privé. Ces incidents ont opposé les propriétaires accompagnés de quelques militants et les forces de l'ordre, mais ne semblent fort heureusement pas avoir entraîné de blessures importantes de part et d'autre. À l'origine de l'incident se trouve la volonté de RTE, filiale à 100 % d'EDF, d'intervenir sur ces terres pour reprendre les travaux de déboisement et de déroulage de câbles afin de finaliser le raccordement au réseau de l'hypothétique EPR de Flamanville. Or cette volonté de reprise du chantier va à l'encontre d'une décision de justice du 13 septembre 2012 du tribunal de grande instance de Coutances, donnant raison aux plaignants et ordonnant la suspension des travaux. RTE ayant relevé appel de l'ordonnance, la procédure judiciaire est toujours en cours, et la décision finale de la justice concernant cette installation ne devrait être connue qu'en juin 2013. Il s'agit donc d'un véritable passage en force de la part de RTE, qui tente d'installer illégalement ce pylône sur une propriété privée. Connaissant les antécédents d'affrontements entre opposants à la ligne THT et RTE, qui a par le passé occasionné plusieurs blessés, cette tentative de passage en force apparaît non seulement injustifiée, au regard du calendrier judiciaire et de l'avancement du chantier de l'EPR, mais également inutilement provocatrice. Mais le plus grave dans cette affaire, c'est l'ingérence de l'exécutif dans la sphère judiciaire. En effet, en envoyant les gendarmes au Chefresne pour permettre à RTE d'intervenir, le préfet de la Manche déclare que son arrêté préfectoral d'occupation temporaire pris le 7 décembre 2012 « annule » la décision de justice de septembre. Or seule une décision de justice en appel pourrait l'annuler. Il lui demande d'intervenir auprès de RTE et du préfet afin de faire cesser les travaux dans l'attente d'une décision de justice définitive et rétablir ainsi la séparation des pouvoirs exécutifs et judiciaires dans la Manche.

Texte de la réponse

Le 13 septembre 2012, le juge des référés du tribunal de grande instance de Coutances a condamné RTE, au motif d'une voie de fait, à évacuer le chantier sur une propriété de la commune du Chefresnes dans un délai de 8 jours. Les plaignants avaient contesté le droit pour RTE d'intervenir sur leurs propriétés sur le fondement des seules servitudes d'utilité publique instaurées en application du décret 70-492 du 11 juin 1970. Ils estimaient que RTE aurait dû disposer d'une autorisation d'occupation temporaire prévue par l'article 3 de la loi du 29 décembre 1892 relative aux dommages causés à la propriété privée par l'exécution des travaux publics, et que sans cette autorisation, l'intervention de RTE constituait une voie de fait. RTE a contesté cette décision en interjetant appel devant la Cour d'appel de Caen. Afin de poursuivre les travaux, il a également demandé et obtenu une autorisation d'occupation temporaire. Ayant satisfait les exigences des propriétaires, il a donc repris les travaux sur la commune du Chefresnes en toute légalité. Le tribunal des conflits a jugé depuis, le 18 mars 2013, qu'en pénétrant sur des parcelles privées afin d'y établir un pylône faisant partie des ouvrages nécessaires à la réalisation de la ligne électrique à très haute tension dite « Cotentin-Maine » et de procéder à l'abattage d'arbres permettant le passage de cette ligne électrique, les agents de la société RTE ont mis en oeuvre les pouvoirs conférés à cette société en application des articles L. 323-3 et suivants du code de l'énergie, par l'effet de l'arrêté ministériel du 25 juin 2010 déclarant d'utilité publique la réalisation de cette ligne et des arrêtés préfectoraux désignant les parcelles mises en servitude. Il en a déduit que ces agissements ne pouvaient donc constituer une voie de fait mais se rattachaient à la mise en oeuvre des prérogatives de puissance publique dont cette société est investie pour l'accomplissement de la mission de service public qui lui est confiée par la loi.