14ème législature

Question N° 19494
de M. Gérald Darmanin (Union pour un Mouvement Populaire - Nord )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > PME, innovation et économie numérique

Rubrique > entreprises

Tête d'analyse > délais de paiement

Analyse > réduction. calendrier.

Question publiée au JO le : 26/02/2013 page : 2055
Réponse publiée au JO le : 03/09/2013 page : 9301
Date de changement d'attribution: 05/03/2013
Date de renouvellement: 04/06/2013

Texte de la question

M. Gérald Darmanin interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur les délais de paiement aux entreprises. À l'occasion du 20e salon des entrepreneurs, le ministre de l'économie a rappelé que plus d'un tiers des entreprises voient leurs factures réglées au-delà de 60 jours. Ces délais étant jugés trop longs, le ministre a annoncé la mise en place de plusieurs mesures afin de lutter contre les délais excessifs. Ainsi, il lui demande de bien vouloir lui préciser le contenu exact de ces mesures ainsi que leurs modalités d'application et leur calendrier éventuel.

Texte de la réponse

La loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (LME) a modifié l'article L. 441-6 du code de commerce, en lui ajoutant un alinéa précisant que le délai convenu entre les parties pour régler les sommes dues ne peut dépasser 45 jours fin de mois ou 60 jours à compter de la date d'émission de la facture. La directive n° 2011/7/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2011 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les relations commerciales, issue de la refonte de la directive n° 2000/35/CE de même objet, n'impose pas de modifications de ces délais. En effet, l'article 3.5 de la directive prévoit un délai de paiement de 60 jours, sauf stipulation contractuelle prévoyant un délai supérieur à condition qu'il n'en résulte aucun abus. Toutefois, l'article 12.3 de ce même texte énonce que « Les États membres peuvent maintenir ou adopter des dispositions plus favorables au créancier que celles nécessaires pour se conformer à la présente directive ». Le législateur a donc opté pour une lecture combinée de ces deux articles, afin de ne pas remettre en cause l'acquis de la LME en ce qui concerne la fixation de plafonds stricts aux délais de paiement, par principe favorables au créancier. En 2011, le crédit interentreprises (les délais de paiement que les entreprises s'accordent entre elles dans le cadre de leurs relations commerciales d'achats et de ventes) a représenté 605 milliards d'euros, soit cinq fois le montant des crédits bancaires de court terme. Les entreprises débitrices sont souvent tentées de recourir prioritairement à cette source de financement gratuite et de différer, parfois à l'excès, le paiement de leur dette. Ces retards de paiement sont préjudiciables à la compétitivité et à la rentabilité des entreprises créancières parce qu'ils leur imposent d'obtenir des financements de court terme auprès de leur banque. Or à l'été 2012, les crédits bancaires de trésorerie ont régressé de 3,5 % en variation annuelle. Les délais de paiement constituent donc un enjeu important pour le financement des entreprises. La Cour des comptes, dans son rapport public thématique sur l'État et le financement de l'économie, publié en juillet 2012, estime que la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (LME) a permis une amélioration conjoncturelle des délais de paiement et une certaine convergence des pratiques. Cependant, cet effet positif n'aurait été que temporaire et partiel. En effet, en 2012, selon l'enquête annuelle menée par les services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et le rapport de l'observatoire des délais de paiement, un tiers des entreprises continuaient d'être payées avec retard. Le Gouvernement a publié, le 6 novembre 2012, un « pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi ». La troisième décision du second levier d'action de ce pacte établit un plan d'actions pour lutter contre l'allongement des délais de paiement. Les mesures présentées ont pour objet d'une part, de doter l'administration d'un pouvoir de sanction efficace pour obtenir le respect des délais de paiement légaux et, d'autre part, de réduire les délais de paiement de l'État sur le quinquennat, afin de parvenir à un délai de paiement de 20 jours en 2017. Le 6 février 2013, le ministre de l'économie et des finances a présenté un plan pour le renforcement de la trésorerie des entreprises. Le quatrième levier de ce plan a pour objectif d'accroître l'efficacité de la loi pour réduire les délais de paiement. D'une part, le ministre de l'économie et des finances a fait du contrôle des délais de paiement la mission prioritaire de la DGCCRF. Dans le cadre de son plan annuel de contrôle pour l'année 2013, 2 000 établissements seront contrôlés par les agents de l'État, avec un ciblage particulier sur les grandes entreprises, soit une augmentation des contrôles de plus de 10 %. De plus, la neuvième action de ce plan tend à mieux sanctionner les retards de paiement par la mise en oeuvre par l'administration, en l'occurrence la DGCCRF, de sanctions administratives. A ce titre, un projet de réforme du code de commerce a fait l'objet d'une consultation de l'ensemble des organisations professionnelles au début de l'année 2013. Au terme de cette consultation, le dispositif a été intégré dans le projet de loi sur la consommation, qui sera examiné à l'Assemblée nationale au mois de juin 2013. Ce dispositif permettra à l'autorité chargée de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, après constat, par procès-verbal des agents habilités de la DGCCRF, d'un manquement aux règles relatives aux délais de paiement, de prononcer une amende administrative, dont le montant maximum sera par infraction de 75 000 € pour une personne physique et de 375 000 € pour une personne morale. L'entreprise victime demeure actuellement le plus souvent réticente à demander l'application des dispositions légales par crainte de mesures de représailles de la part de son partenaire commercial. Le nouveau dispositif permettra de sanctionner non-seulement les retards de paiement, mais également les pratiques de contournement de la loi ayant pour objet de retarder le point de départ des délais de paiement (« délais cachés »). La réponse de l'administration sera dès lors plus rapide et donc plus dissuasive, face à ces pratiques. D'autre part, un des objectifs assigné par ce plan était d'adapter la législation à la situation spécifique du secteur du bâtiment. La mesure n° 7 du plan d'investissement pour le logement, annoncé par le ministère de l'égalité des territoires et du logement le 21 mars 2013, a pour finalité de faciliter la gestion de la trésorerie des entreprises du bâtiment. Pour les marchés de travaux privés, il s'agit d'une part, d'inclure dans les délais de paiement des acomptes mensuels le délai d'intervention du maître d'oeuvre ou d'un autre prestataire dont l'intervention conditionne le paiement des sommes dues et, d'autre part, d'assurer que les maîtres d'ouvrage paieront les travaux exécutés par les entrepreneurs sur la base des demandes de paiement mensuelles qu'ils présentent. Un groupe de travail a été spécialement constitué avec l'ensemble des professionnels concernés, afin d'examiner les pistes de réformes qui permettront d'assainir la situation globale de ce secteur. Les services du ministère de l'économie et des finances analysent actuellement les dernières propositions formulées par la fédération française du bâtiment. Le ministre de l'économie et des finances, en lien avec la Garde des Sceaux, ministre de la justice, a saisi la compagnie nationale des commissaires aux comptes afin de lui faire des propositions pour harmoniser la publication des informations relatives aux délais de paiement pour application effective aux comptes 2013. En effet, l'absence de standard de publication des informations relatives aux délais de paiement d'une entreprise dont les comptes sont certifiés par des commissaires aux comptes, limite la possibilité d'une lecture et d'un contrôle homogène des retards éventuellement constatés. Le Gouvernement a chargé le sénateur, M. Martial Bourquin, de lui transmettre un rapport contenant des recommandations en ce sens. Enfin, le projet de loi consommation actuellement examiné au Parlement prévoit, conformément à l'objectif de réduction globale des délais de paiement, un délai de paiement spécifique au cas d'utilisation de factures récapitulatives. En effet, la facture récapitulative (utilisée lorsqu'au cours d'un même mois un professionnel effectue de nombreuses livraisons au profit d'un même client) est une dérogation au principe de facturation immédiate et décale, pour les secteurs concernés, le point de départ des délais de paiement. Aussi, en remplacement du plafond légal fixé actuellement à 45 jours fin de mois ou 60 jours nets, le projet de loi fixe le délai à 45 jours nets, à compter de l'émission de la facture récapitulative.