Question de : M. Laurent Grandguillaume
Côte-d'Or (1re circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Laurent Grandguillaume attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la question de l'évaluation du coût global engendré par le surendettement. Le surendettement se définit comme l'impossibilité manifeste pour le débiteur de bonne foi de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir. Dans un contexte de crise économique, sociale et financière, de nombreuses familles sont touchées par ce fléau. Si des améliorations ont été apportées par la loi Lagarde de 2010 concernant le traitement des dossiers, près de 221 000 ménages français ont déposé des dossiers auprès des commissions de surendettement en 2012 ce qui témoigne de l'importance de ce défi dans notre pays. Dans son rapport public annuel 2013, la Cour des comptes souligne que «quelques avancées dans le chiffrage du coût du traitement des dossiers ont été réalisées. En revanche, elles n'ont toutefois pas conduit l'État à tenter de mesurer le coût global engendré par le surendettement. En 2010, la Cour avait ainsi constaté que les administrations publiques étaient incapables de déterminer le coût qu'elles supportaient au titre du suivi de la procédure de surendettement. Elle regrettait également que les établissements financiers ne soient pas mis à contribution pour le financer. Si la seconde recommandation n'a pas été suivie d'effet, la première a trouvé une réponse très partielle». En effet, par exemple le coût pour la collectivité des situations de surendettement (dépenses sociales, dépenses de santé liées à des situations de fragilité psychologique des personnes surendettées, ...) ne fait aujourd'hui l'objet d'aucune évaluation. Compte tenu de la nécessité de mobiliser tous les acteurs dans la lutte contre le surendettement, il est essentiel de mieux en évaluer les conséquences financières pour les pouvoirs publics. Il souhaiterait donc connaître quelles actions il entend mettre en œuvre pour évaluer précisément le coût global engendré par le surendettement.

Réponse publiée le 3 décembre 2013

Même si le rythme des dépôts de dossiers de surendettement reste élevé, il connait toutefois depuis un an une relative stabilisation selon les données de la Banque de France. La loi du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation comportait déjà un important volet destiné à prévenir le surendettement en favorisant une distribution plus responsable du crédit à la consommation et en encadrant plus spécifiquement les crédits renouvelables, souvent cités comme source de surendettement. Cette réforme n'est entrée en vigueur que depuis deux ans pour certaines dispositions : encadrement de la publicité et des pratiques promotionnelles portant sur les crédits à la consommation, réforme du taux d'usure pour le crédit à la consommation, encadrement du crédit renouvelable, paiement au comptant par défaut lors de l'utilisation des cartes de fidélité. Toutes les conséquences de cette réforme ne se sont pas encore traduites dans le nombre et les caractéristiques des dossiers de surendettement, les dossiers actuellement déposés et examinés par les commissions de surendettement comportant très largement des crédits octroyés avant la mise en oeuvre de la réforme. Néanmoins, conscient des difficultés non seulement financières mais également psychologiques et sociales auxquelles les personnes surendettées doivent faire face, le Gouvernement a décidé d'aller plus loin et en sus de nouvelles mesures améliorant le traitement du surendettement lui-même, de mettre en place une véritable politique de prévention du surendettement en agissant avant qu'il ne soit trop tard. Le Gouvernement est en effet fermement résolu à tout mettre en oeuvre pour inverser la tendance à la progression du nombre de situations de surendettement ou de « mal endettement ». Ainsi, lors du comité interministériel de lutte contre les exclusions du 21 janvier 2013, le Gouvernement a annoncé la mise en oeuvre d'un « Plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale » qui fait suite à la conférence nationale contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale des 10 et 11 décembre 2012. Ce plan pluriannuel comporte un volet « inclusion bancaire et lutte contre le surendettement » qui prévoit un certain nombre de mesures pour accompagner les personnes et les familles en situation de fragilité financière. Une grande partie de ces mesures préventives ont d'ores et déjà été adoptées dans le cadre de la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires : - la mise en place par les banques de mécanismes de détection, en amont, des difficultés de leurs clients pour leur proposer un traitement plus adéquat et le cas échéant, un accompagnement adapté ; - la réforme de la procédure de traitement du surendettement visant en particulier, à favoriser le maintien des personnes surendettées dans leur logement, à faciliter l'accompagnement social des personnes surendettées qui en ont besoin, à simplifier et accélérer la procédure et à étendre les protections dont bénéficient les personnes surendettées au cours de cette procédure ; - la lutte contre l'accumulation des frais bancaires avec un plafonnement de ces frais par opération et par mois, un plafond spécifique étant en outre prévu pour les personnes en situation de fragilité financière. Dans le cadre de la loi relative à la consommation qui a déjà été adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale et le Sénat, le Gouvernement a décidé la création d'un registre national des crédits aux particuliers qui permettra de renforcer le contrôle préalable de la solvabilité des clients avant l'octroi d'un crédit, permettant de mieux prévenir les situations de surendettement liées à un excès de crédits ou à des crédits mal adaptés. Le plan pluriannuel prévoit par ailleurs la réalisation d'une étude, sous l'égide de la Banque de France, destinée à mieux connaitre les processus menant au surendettement des ménages, afin d'adapter et renforcer les mesures préventives. Les travaux sont actuellement en cours et l'étude devrait être disponible début 2014. Plus généralement, le plan pluriannuel prévoit la mise en place en 2014 de « Points conseils budget », sous forme de réseaux qui associeraient les banques, les associations et d'autres acteurs sociaux, pour conseiller, orienter et accompagner les personnes qui rencontrent des difficultés financières. Un groupe de travail chargé de préfigurer ces Points conseils budget devrait remettre ses conclusions d'ici à la fin de l'année. Enfin, il est à envisager de promouvoir à l'échelle nationale une éducation budgétaire et un apprentissage des outils bancaires pour que chaque personne sache, a minima, utiliser un compte bancaire, des moyens de paiement et des crédits. Un groupe de travail sous l'égide du comité consultatif du secteur financier a été mis en place sur le sujet. Ces nouvelles dispositions devraient permettre l'accompagnement des personnes les plus fragiles et prévenir les risques de surendettement et en conséquence, de réduire le coût global du surendettement. Une évaluation précise de ce coût reste toutefois particulièrement délicate à établir compte tenu du très grand nombre d'acteurs concernés, y compris tout simplement parmi les acteurs directement impactés que sont les créanciers, mais beaucoup plus encore si les impacts indirects au regard de l'emploi, les prestations sociales, la famille, la santé voire la situation psychologique sont pris en compte, alors même que ces impacts indirects seraient particulièrement complexes à évaluer de façon claire, objective et exhaustive.

Données clés

Auteur : M. Laurent Grandguillaume

Type de question : Question écrite

Rubrique : Consommation

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie et finances

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 5 novembre 2013

Dates :
Question publiée le 5 mars 2013
Réponse publiée le 3 décembre 2013

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