14ème législature

Question N° 20276
de M. Jacques Bompard (Non inscrit - Vaucluse )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Économie et finances

Rubrique > impôts et taxes

Tête d'analyse > fraude fiscale

Analyse > lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 05/03/2013 page : 2408
Réponse publiée au JO le : 08/10/2013 page : 10614
Date de renouvellement: 11/06/2013
Date de renouvellement: 24/09/2013

Texte de la question

M. Jacques Bompard attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur l'évasion fiscale vers la Belgique pratiquée par les grands groupes financiers qui déménagent leurs fonds grâce à une niche fiscale belge. Pour cela, ils utilisent le concept d'intérêts notionnels mis en application en 2005. Le Conseil d'État aurait validé le dispositif. L'administration fiscale française aurait ainsi perdu 2,2 milliards d'euros en deux ans. Il lui demande de lui indiquer les mesures qu'il compte prendre pour lutter contre cette fraude fiscale de grande ampleur pratiquée par ceux qui sont puissants et organisés, ce qui permettrait de soulager la pression fiscale sur les contribuables petits et moyens.

Texte de la réponse

Il est tout d'abord précisé que la déduction des intérêts notionnels est une mesure à caractère général, dont peut bénéficier toute entreprise redevable de l'impôt sur les sociétés en Belgique. Les autorités de cet Etat évaluent donc cette dépense fiscale à environ 5 milliards d'euros pour 2010. En revanche, l'attractivité de cette mesure et son impact potentiel sur la localisation d'entreprises étrangères n'ont pas été mesurés. En Belgique, la cour des comptes et certains parlementaires estiment qu'elle profiterait essentiellement aux plus grandes entreprises. De façon plus générale, la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales est une priorité du gouvernement français. Dans ce cadre, la France lutte activement contre les schémas abusifs, notamment ceux mis en place par les grandes entreprises. A cet effet, l'administration fait usage d'un arsenal juridique qui comporte le contrôle des prix de transfert, la remise en cause des montages abusifs et la mise en oeuvre de dispositifs anti-abus spécifiques. Par ailleurs, dans les situations transfrontalières, elle met en oeuvre l'assistance administrative pour obtenir les renseignements nécessaires à l'imposition en France. Afin de renforcer les moyens juridiques disponibles, le gouvernement, dès la loi de finances rectificative de l'été 2012, a soumis au Parlement une mesure législative visant à instaurer un renversement de la charge de la preuve en faveur de l'administration pour taxer, sur le fondement de l'article 209 B du code général des impôts, les bénéfices que les entreprises françaises localisent dans des Etats ou territoires situés hors de l'Union européenne où ils bénéficient de régimes fiscaux privilégiés. Par la suite un nouvel ensemble de mesures contre la fraude ont été adoptées en fin d'année 2012. Les différents aspects de la stratégie du gouvernement en la matière ont été présentés par le Premier ministre le 11 février 2013 dans le cadre du plan national de lutte contre la fraude. Au plan européen et international, la France joue également un rôle essentiel. Ainsi, plusieurs Etats du G20 dont la France ont pris l'initiative de demander à l'organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) de présenter des propositions afin de lutter contre l'érosion des assiettes fiscales et les transferts de bénéfices. Un rapport dressant un état des lieux très complet a été soumis aux ministres des finances à l'occasion du sommet de Moscou des 15 et 16 février 2013. A cette occasion, les ministres français, allemands et britanniques ont publiquement rappelé leur détermination pour progresser sur ce dossier. Sur cette base, l'OCDE a présenté le 16 juillet 2013 un plan d'action large et ambitieux endossés par les ministres des finances des finances du G20 lors de leur réunion des 19 et 20 juillet dernier. La France est fortement impliquée dans les groupes d'experts chargés d'assurer la traduction concrète. Elle plaide en priorité pour que des solutions soient trouvées pour résoudre les phénomènes de double exonération, pour renforcer les mesures anti-abus et pour que les règles soient adaptées afin de mieux appréhender les profits réalisés par le secteur numérique, actuellement sous-taxé. De plus, comme les ministres de l'économie et des finances et délégué au budget l'ont indiqué dans la lettre qu'ils ont adressée le 21 novembre 2012 aux commissaires en charge de la fiscalité et du marché intérieur, la France considère que l'Union européenne doit également s'attacher à progresser dans ce domaine, ce qui suppose que la Commission, comme l'y a invitée le Conseil Ecofin du 14 mai 2013, amende le droit applicable ou propose de nouvelles actions, notamment dans le secteur du numérique. La France agit enfin pour renforcer les obligations de transparence et promeut activement une plus forte exigence concernant les activités conduites à l'étranger par les filiales des banques et des grandes entreprises. Pour les établissements financiers, ceci se traduira au plan national par de nouvelles obligations dans le cadre du projet de loi bancaire récemment adopté, lesquelles viendront compléter et renforcer l'accord obtenu avec le soutien de la France pour la révision de la directive CRD IV adoptée le 20 juin. Le gouvernement porte dans les instances internationales (G8, G20) et au Conseil européen la nécessité d'étendre cette approche de transparence aux entreprises multinationales. Ces explications sont de nature à répondre aux préoccupations de l'auteur de la question, qui constituent des priorités pour le gouvernement.