14ème législature

Question N° 20375
de M. Jacques Bompard (Non inscrit - Vaucluse )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales et santé
Ministère attributaire > Affaires sociales, santé et droits des femmes

Rubrique > pharmacie et médicaments

Tête d'analyse > pilules contraceptives

Analyse > conséquences. santé.

Question publiée au JO le : 05/03/2013 page : 2368
Réponse publiée au JO le : 07/07/2015 page : 5173
Date de changement d'attribution: 27/08/2014
Date de renouvellement: 11/06/2013
Date de renouvellement: 24/09/2013
Date de renouvellement: 28/01/2014
Date de renouvellement: 20/05/2014

Texte de la question

M. Jacques Bompard attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur les risques des pilules troisième et quatrième générations. L'agence nationale de la sécurité du médicament aurait eu connaissance depuis longtemps des risques graves et des effets indésirables liés à l'usage de ces pilules. Il lui demande donc si une enquête a été diligentée sur les négligences éventuelles commises par l'agence nationale de la sécurité du médicament.

Texte de la réponse

Depuis l'introduction sur le marché en 1961 des contraceptifs oraux combinés (COC) ou pilules estroprogestatives ou encore pilules combinées, le risque de thrombose veineuse est connu. Ce risque a fait l'objet de nombreuses publications dans la littérature. Il est suivi au niveau national, européen et mondial par les autorités de santé. La composition des COC a évolué depuis les années 1960. Une des premières mesures a consisté à diminuer la dose en éthinylestradiol (EE) afin de limiter les risques d'effets indésirables. En parallèle, les progestatifs utilisés se sont diversifiés. Le sur-risque de thrombose veineuse lié aux COC contenant un progestatif dit de troisième génération (désogestrel ou gestodène) par rapport aux COC contenant du lévonorgestrel (2e génération) est connu depuis 1995. Depuis cette date, les pilules estroprogestatives de 3e génération et celles comprenant de la drospirénone (dites de 4e génération) ont été régulièrement évaluées par l'agence européenne du médicament (EMA) et la FDA aux États-Unis. Le sur-risque est identifié mais le rapport entre le bénéfice et le risque pour les femmes sous pilule estroprogestative est resté favorable. Sur ce point, l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) communique régulièrement depuis novembre 2011 afin d'informer tant les professionnels de santé que les patientes sur ce risque de thrombose veineuse avec les COC. Plus récemment, en octobre 2012, elle a ainsi recommandé aux prescripteurs d'utiliser préférentiellement les COC de deuxième génération et a produit, en collaboration avec la Haute autorité de santé (HAS) en novembre 2012, une fiche sur le bon usage des COC, afin de recommander l'utilisation préférentielle des pilules de 1re ou 2e génération, fiche diffusée à l'ensemble des prescripteurs en décembre 2012. Dans le prolongement de cette mise en garde adressée aux médecins généralistes, médecins gynécologues et sages-femmes rappelant les pratiques visant à minimiser le risque de thrombose lié aux COC, l'agence a intensifié l'information des professionnels de santé à travers ses divers canaux d'information, pour rappeler que l'usage des pilules de 3e et 4e génération doit être l'exception et pour les informer des actions en cours et des données nouvelles. Un « Questions / Réponses » à destination des patientes, régulièrement mis à jour, a ainsi été mis en ligne sur le site internet de l'Agence (www. ansm. sante. fr). De même, un dossier d'information « Pilules estroprogestatives et risque thromboembolique veineux » a été mis en ligne en janvier 2013. Il intègre notamment les données de pharmacovigilance disponibles et toutes les informations et communications relatives à ce dossier. Par ailleurs, des échanges ont lieu avec les associations de patients et de victimes. L'ANSM les a tenues informées de ses actions et leur a communiqué, préalablement à leur diffusion, les informations qu'elle met à disposition des patientes. D'autres actions d'information destinées au grand public ont été réalisées en lien avec l'institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES). Enfin, l'ANSM a initié en janvier 2013 une réévaluation européenne du rapport bénéfice/risque des contraceptifs oraux contenant les progestatifs les plus récents. Cette réévaluation, qui s'est achevée en janvier 2014, a confirmé que le rapport bénéfice/risque de chaque contraceptif hormonal combiné (CHC) est favorable. Plus précisément, l'efficacité de tous les CHC est identique du point de vue de la contraception et les données disponibles n'apportent pas la preuve d'une différence en terme de tolérance entre les différents CHC. A ce titre, concernant le profil de risque, il a été considéré que le risque thromboebolique, bien que faible, est supérieur chez les femmes utilisatrices de CHC par rapport à celles qui n'en prennent pas ; il est maximum lors de la première année d'utilisation et augmenté lors de la reprise de la contraception après une interruption de plus de 4 semaines. Par ailleurs, le sur-risque généré par les CHC contenant les progestatifs les plus récents (désogestrel, diénogest, gestodène, drospirénone, chlormadinone, nomégestrol, étonogestrel et norelgestromine) en termes d'événements thromboemboliques veineux et de décès a été reconnu au niveau européen. A cet égard, il peut être précisé que ce risque diffère selon les CHC en fonction du progestatif qu'ils contiennent. En ce sens, le risque de thrombose veineuse est le plus faible avec les CHC contenant du levonorgestrel, du norgestimate ou de la noréthistérone. Le risque de thrombose veineuse est plus élevé avec les CHC contenant du gestodène, du désogestrel ou de la drospirénone par rapport aux CHC contenant du lévonorgestrel. Enfin, les CHC contenant de l'étonogestrel (anneau vaginal) ou de la norelgestromine (patch transdermique) présentent un risque de thrombose veineuse au moins égal aux CHC contenant du lévonorgestrel et pouvant être jusqu'à deux fois supérieur. Par ailleurs, le risque de thrombose artérielle est supérieur chez les femmes utilisatrices de CHC par rapport à celles qui n'en prennent pas et il est identique entre les différents CHC. Aussi, par décision de la Commission européenne du 16 janvier 2014, les autorisations de mise sur le marché (AMM) des CHC concernés par cette réévaluation ont-elles été modifiées afin de mettre à jour les informations relatives à l'indication thérapeutique, aux contre-indications et aux précautions d'emploi au regard des incidences de thrombose veineuse en fonction des données épidémiologiques les plus récentes. Ces modifications des AMM ont été assorties de documents éducationnels et d'information à destination des femmes et des professionnels de santé. En ce sens, une carte patiente présente dans le conditionnement secondaire (c'est-à-dire dans la boîte, souvent à la suite de la notice) des contraceptifs décrivant les principaux signes et symptômes de TEV et de TEA a été élaboré afin de sensibiliser les patientes et de les inciter à consulter leur professionnel de santé, de même qu'un document d'aide à la prescription pour les professionnels de santé-gynécologues, généralistes, sages-femmes etc.. . ), listant les points à vérifier (antécédents, facteurs de risque...) avec les patientes afin de s'assurer de la pertinence de la prescription d'un CHC a été diffusé à l'ensemble des prescripteurs. Parallèlement, une lettre aux professionnels de santé a été diffusée expliquant les conclusions de l'arbitrage européen et insistant notamment sur les facteurs de risque individuels à prendre en compte lors de la prescription d'un CHC et recommandent de porter une attention particulière sur le type de progestatif choisi. Enfin, des études complémentaires ont été demandées dans le cadre de l'arbitrage (études PASS) pour les CHC pour lesquels il n'existe pas ou peu de données concernant leur risque thromboembolique, et sont en cours. En février 2014, l'ANSM en collaboration avec la HAS les professionnels de santé et les associations de patients a publié sur son site internet un document destiné aux femmes :« Vous et...vos contraceptifs oestroprogestatifs » venant compléter la carte patiente et destiné à aider les femmes à mieux connaître les effets indésirables, les signes évocateurs d'une survenue d'accident thrombotique qui sont rares mais graves, ainsi que les précautions d'emploi pour minimiser les risques liés aux pilules, à l'anneau et au patch contraceptifs oestroprogestatifs. Globalement, la répartition des ventes de COC a évolué entre 2012 et 2014 : une augmentation de 32 % des ventes de COC de 1re et 2e générations et une diminution de 48 % des ventes de COC de 3e et 4e générations ont été observées. En 2014, les parts de marché respectives des COC de 1re/2e générations et 3e /4e générations sont égales à 78 % / 22%. En novembre 2014 ont été publiés les résultats d'une étude épidémiologique conduite par l'ANSM et visant à évaluer l'impact de ces changements sur la survenue d'embolies pulmonaires chez les femmes en âge de procréer. Les résultats de cette étude suggèrent qu'environ 341 hospitalisations pour embolies pulmonaires ont été évitées en 2013.