Question écrite n° 20708 :
énergie nucléaire

14e Législature
Question signalée le 10 décembre 2013

Question de : Mme Michèle Bonneton
Isère (9e circonscription) - Écologiste

Mme Michèle Bonneton interroge Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la question de la prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires dont la sécurité est clairement identifiée comme étant déficiente, et l'intérêt de procéder à l'arrêt de celles-ci. La réduction de la part de l'électricité nucléaire promise par le Président Hollande doit être anticipée : elle ne peut passer que par le développement des énergies renouvelables, les économies d'énergies, et par la fermeture de centrales nucléaires les plus vétustes, celles qui exigent le plus d'investissements de sécurité pour permettre une prolongation de vie dans de bonnes conditions. La Communauté européenne a annoncé que pas une seule des centrales françaises n'avait passé positivement les « crash test » consécutifs à l'accident de Fukushima. La Cour des comptes évalue de son côté à 55 milliards d'euros l'investissement nécessaire d'ici 2025 pour se conformer aux préconisations de l'Autorité de sûreté nucléaire : c'est presque l'équivalent du tiers de l'investissement initial dans le programme nucléaire. Or la France ne peut se permettre de dépenser une telle somme dans les quinze ans à venir et elle ne peut pas non plus prendre le risque d'un accident nucléaire majeur, dont le coût est évalué à 400 milliards euros, sans compter les pollutions irréversibles infligées aux hommes et à l'environnement . La centrale de Saint-Alban, en Rhône-Alpes, a été classée dernière des centrales françaises en matière de sécurité par l'Autorité de sûreté nucléaire, faisant de fait courir à la population de Rhône-Alpes un risque inacceptable. Le directeur de cette centrale vient pourtant d'annoncer un programme lourd de rénovation de la centrale destiné à prolonger sa durée de vie de 35 ans. L'État français est actionnaire à hauteur de 85 % d'EDF. Aussi elle lui demande si EDF a effectivement pris la décision de prolonger la vie de cette centrale. Elle demande aussi de façon générale quelles vont être les exigences de l'État actionnaire envers EDF pour ce qui est de la prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires, et si l'État actionnaire entend imposer une limitation de la prolongation de la durée de vie des centrales nucléaires.

Réponse publiée le 7 janvier 2014

Le projet de loi de programmation de la transition énergétique, qui fait suite au débat national achevé en juillet 2013 et dont les recommandations ont étés remises au Gouvernement en septembre 2013, définira la stratégie et les moyens que se donne l'État pour répondre à l'objectif de diversification du mix énergétique de la France fixé par le Président de la République à l'horizon 2025, soit la baisse de la part d'électricité d'origine nucléaire de 75 % à 50 %, parallèlement à la montée en puissance des énergies renouvelables. Dans ce cadre, l'industrie nucléaire sera à plusieurs titres sollicitée. Elle aura tout d'abord, à exploiter le parc actuel tout en garantissant la sécurité absolue de chaque site de production, à être exemplaire en matière de démantèlement et à poursuivre les recherches sur les solutions de demain. Pour le quinquennat, le Président de la République a pris quatre engagements en cohérence avec cette perspective : la plus ancienne de nos centrales - Fessenheim - sera arrêtée ; le chantier de Flamanville - avec le nouveau réacteur EPR - sera conduit à son terme ; le système de retraitement des déchets et la filière qui l'accompagne seront préservés ; aucune autre centrale ne sera lancée durant ce mandat mais la filière nucléaire continuera d'offrir les mêmes services avec toujours plus d'exigences de sureté. La fermeture puis le démantèlement de la centrale de Fessenheim sera, a cet égard, un chantier exemplaire, afin de faire de l'industrie nucléaire française une filière d'excellence du démantèlement, en France et dans le monde. À la suite de l'accident nucléaire de Fukushima, l'ASN a réalisé des évaluations complémentaires de sûreté, qui sont un exercice sans précédent, impliquant une mobilisation intense de tous les acteurs (exploitants, ASN, IRSN, gouvernement, HCTISN, CLI...), destiné à évaluer leur robustesse vis-à-vis de situations extrêmes. Le Conseil européen a aussi pris la décision de procéder à des stress tests, une procédure exemplaire et transparente, à laquelle la France a pris une part active. Le 3 janvier 2012, l'ASN a remis son rapport des évaluations complémentaires de sûreté, qui, s'il ne recommande la fermeture d'aucune des installations nucléaires examinées, émet toutefois un certain nombre de préconisations, traduites en prescriptions imposées aux exploitants nucléaires. Elles aboutissent à des renforcements significatifs des installations contre les situations exceptionnelles : - les « noyaux durs » par exemple doivent permettre la bunkérisation des matériels assurant les fonctions les plus fondamentales de sûreté en cas de situation extrême : alimentations en électricité et en eau, locaux de crise... - des premières mesures, comme la mise en place d'une force d'action rapide nucléaire par EDF, sont déjà en partie concrétisées. Au niveau européen, la démarche a conduit à des rapports d'évaluation des autorités de sûreté nationales, des rapports par pays après revue par les pairs, et à un rapport final de l'ENSREG. Ces documents constituent la seule base technique pertinente sur laquelle les décisions des autorités de sûreté nationales peuvent être prises. Ils ont été rendus publics dans leur intégralité. Le 28 mai 2013, l'ENSREG et la Commission européenne ont adopté un rapport sur les actions engagées à la suite de l'accident de Fukushima : pour la France, ce rapport souligne en particulier le caractère complet du plan d'action présenté, l'importance que l'ASN a attaché à la transparence du processus des évaluations complémentaires de sûreté, le caractère ambitieux du contenu et des délais de mise en oeuvre des mesures d'amélioration de la sûreté des centrales nucléaires décidées après l'accident de Fukushima, ainsi que la prise en compte dans le cadre des ECS des facteurs organisationnels et humains, y compris les conditions de recours à la sous-traitance. Le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie est attentif à la poursuite des démarches d'amélioration engagées ainsi qu'à la complète mise en application des règlementations en vigueur. L'ASN procède en permanence à des inspections et des contrôles des installations nucléaires. Elle n'effectue pas de classement des centrales nucléaires par des critères de sûreté. Dans son rapport annuel 2012 sur l'état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France l'ASN écrit : « Après trois années en retrait par rapport à l'appréciation générale des performances que l'ASN porte sur EDF, l'ASN considère que les performances du site de Saint-Alban en matière de sûreté nucléaire ont rejoint globalement en 2012 l'appréciation générale des performances que l'ASN porte sur EDF. » L'ASN a en outre les pouvoirs d'arrêter immédiatement une installation nucléaire si elle l'estimait nécessaire. Par ailleurs, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) procède tous les dix ans à des examens approfondis de la sûreté des installations nucléaires lors des visites décennales. Ce réexamen permet d'apprécier la situation de l'installation au regard des règles qui lui sont applicables et d'actualiser l'appréciation des risques ou inconvénients que l'installation présente, en tenant compte notamment de l'état de l'installation, de l'expérience acquise au cours de l'exploitation, de l'évolution des connaissances et des règles applicables aux installations similaires, dans le but d'une amélioration continue de la sûreté de nos installations. A cette occasion, l'ASN a la responsabilité de faire part de sa position sur l'aptitude du réacteur à la poursuite d'exploitation, et elle émet des prescriptions encadrant la poursuite de fonctionnement. La troisième visite décennale de la centrale de Saint-Alban est prévue pour 2017. Les travaux engagés par EDF, et notamment le programme de maintenance démarré en août 2013 sur le second réacteur de la centrale, se placent dans cette perspective, sachant que l'exploitant est contraint par la loi de se ranger à l'avis de l'autorité de sûreté si celle-ci exigeait la fermeture de la centrale pour des raisons de sûreté. La stratégie de maintenance d'EDF ne préjuge donc en rien de la durée de vie effective de cette centrale. La loi de programmation sur la transition énergétique qui sera présentée au Parlement en 2014 comportera un important volet sur le renforcement de la sûreté nucléaire, prenant particulièrement en compte le facteur humain dans la sûreté, avec également un renforcement des pouvoirs de l'ASN en matière de contrôle.

Données clés

Auteur : Mme Michèle Bonneton

Type de question : Question écrite

Rubrique : Énergie et carburants

Ministère interrogé : Écologie, développement durable et énergie

Ministère répondant : Écologie, développement durable et énergie

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 10 décembre 2013

Dates :
Question publiée le 12 mars 2013
Réponse publiée le 7 janvier 2014

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