La Poste
Question de :
M. André Chassaigne
Puy-de-Dôme (5e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
M. André Chassaigne attire l'attention de M. le ministre du redressement productif sur le mal-être des agents de La Poste. Le nombre de suicides et de tentatives de suicide continue de s'amplifier au sein du groupe La Poste : plus de soixante-dix en 2010 et le constat d'une recrudescence en ce début d'année. Dans son rapport annuel de 2011, le syndicat professionnel des médecins de prévention de La poste avait alerté Monsieur Jean-Paul Bailly, Président du groupe : « L'intensification du travail et le resserrement continu des organisations, qui réduisent les marges de manœuvres individuelles et collectives et les stratégies d'adaptation et l'évolution organisationnelle qui modifient les collectifs de travail et les repères professionnels des agents dans tous les métiers engendrent une présence plus prégnante de troubles psychiques et de manifestations d'origine psychosomatique ». Des suicides ou des tentatives de suicide, dont on peut penser qu'ils sont exclusivement liés à des situations de vie professionnelle, surviennent dans toutes les régions, dans tous les métiers et aux différents niveaux de l'entreprise ; le taux d'absentéisme pour maladie atteint des seuils sans précédent ; les accidents de travail et les maladies professionnelles sont en très forte augmentation ; le mal-être au travail touche tous les niveaux opérationnels de l'entreprise. Les agents et les encadrants traversent des réorganisations rapides et successives, sont confrontés à des injonctions contradictoires sans avoir de perspectives d'amélioration. Les agents de distribution sont confrontés à des situations d'épuisement physique et psychique. Cela est lié aux nouvelles organisations de travail, dont la mise en place est très variable d'un établissement à l'autre. Ainsi La Poste crée des « inaptes » physiques et psychologiques. Depuis la privatisation de La Poste, les réorganisations, fermetures de sites, délocalisation et suppressions d'emploi se succèdent en effet à un rythme effréné. Il en résulte un mal-être de plus en plus visible chez les postiers et postières, quelle que soit leur fonction. Certes, La Poste a mis en place une commission sur la qualité de vie au travail mais les travaux de cette dernière n'ont pas endigué les suicides au sein du groupe. Même si les motivations de passage à l'acte sont toujours difficiles à définir exhaustivement, il apparaît de manière répétée que le lien avec le milieu professionnel est un facteur soit déclenchant, soit aggravant. Les postiers n'ont plus le sentiment d'avoir les moyens d'assurer un service public de qualité, le rapport financier prévalant sur le rapport humain. Actionnaire de La Poste, l'État ne peut se dédouaner de la responsabilité qui lui incombe. Il lui demande si des mesures concrètes seront mises en œuvre, et dans quels délais, pour mettre un terme à ces restructurations incessantes où le facteur financier prime sur le rapport humain avec les conséquences que l'on connaît.
Réponse publiée le 10 décembre 2013
La Poste a décidé, dès le printemps 2012, de conduire un important dialogue avec tous les postiers, en se fixant pour objectif d'identifier des axes d'amélioration durable de la qualité de vie au travail. Cette démarche de débat avec les postiers a été conduite dans le cadre d'une commission du Grand Dialogue indépendante, présidée par M. Jean Kaspar. Plus de 125 000 postiers se sont exprimés et ont formulé des propositions au cours de 12 000 réunions. Dans le même temps, le Président directeur-général de La Poste a nommé une médiatrice de la vie au travail qui peut être saisie de toute situation personnelle, par chaque postier, les organisations syndicales, la médecine de prévention ou les assistantes sociales. La médiation vise à mettre en oeuvre un principe collaboratif pour apporter des réponses concrètes et concertées aux demandes formulées. Les décisions de la médiation font par ailleurs l'objet d'un suivi et d'une évaluation de leur mise en oeuvre sur le terrain pour la personne concernée. Depuis la date de sa création en avril 2012, la médiation a eu à traiter plus de 900 dossiers. Le rapport Kaspar, remis le 11 septembre 2012, a préconisé de renforcer le pilotage de l'entreprise sur les sujets les plus sensibles comme la politique de santé au travail, de desserrer les contraintes sur les effectifs et de s'appuyer largement sur le dialogue social pour conduire les changements. Dès sa parution, la direction de La Poste a annoncé la mise en oeuvre de l'ensemble des préconisations du rapport, et notamment le recrutement de 5 000 agents supplémentaires pour les années 2012-2014. Depuis, l'accord-cadre signé le 22 janvier 2013 entre La Poste et quatre organisations syndicales reprend et complète les recommandations du rapport Kaspar avec des mesures immédiates comme le temps partiel aménagé pour les seniors et un dispositif d'alerte sur le respect des règles du dialogue social. L'accord prévoit également un programme de négociations qui doit porter notamment sur les points suivants : organisation du travail et amélioration des conditions de travail, poursuite de la mise en place des responsables de ressources humaines de proximité, formation des responsables de ressources humaines, mise en place du télétravail, santé et sécurité au travail, développement professionnel. Par ailleurs, La Poste, qui doit affronter le défi de l'érosion du courrier et de la concurrence du numérique, mène actuellement des chantiers structurants pour son avenir : elle a signé avec l'Etat, le 1er juillet 2013, le contrat d'entreprise 2013-2017. Ce dernier définit les engagements respectifs de l'Etat et de La Poste concernant les modalités d'exercice et de financement des quatre missions de service public confiées au groupe. De plus, La Poste a lancé, au printemps 2013, les travaux d'élaboration de son nouveau plan stratégique. Dans ce contexte, l'Etat est particulièrement attentif d'une part, à garantir la qualité de la mise en oeuvre des missions de service public qu'il a confiées au groupe La Poste, et d'autre part, à la préservation de la qualité de vie au travail au sein de l'entreprise. Ainsi, le ministre du redressement productif et la ministre déléguée ont demandé conjointement - dès le début de l'année 2013 - au Président directeur-général du groupe La Poste que l'ensemble de ces démarches soient conduites dans le cadre d'un modèle social exemplaire. Ainsi, ils ont souhaité que les représentants du personnel soient associés à l'élaboration du contrat d'entreprise et ont invité La Poste à faire de même dans le cadre de l'élaboration du plan stratégique. De plus, à la demande des ministres, le nouveau contrat d'entreprise comprend un volet portant sur les engagements citoyens de l'entreprise. Ces engagements portent en particulier sur les actions menées dans le domaine de la responsabilité sociale de l'entreprise ainsi qu'en réponse à l'évolution des attentes des salariés à l'égard de leur entreprise. Enfin, dans le but de renforcer la gouvernance et le suivi des missions de service public confiées au groupe La Poste, le contrat d'entreprise 2013-2017 prévoit désormais la mise en place d'un comité de suivi de haut niveau qui se réunira annuellement et sera présidé par le ministre chargé des postes.
Auteur : M. André Chassaigne
Type de question : Question écrite
Rubrique : Postes
Ministère interrogé : Redressement productif
Ministère répondant : Redressement productif
Dates :
Question publiée le 2 avril 2013
Réponse publiée le 10 décembre 2013