14ème législature

Question N° 23655
de M. Jacques Bompard (Non inscrit - Vaucluse )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > produits dangereux

Tête d'analyse > amiante

Analyse > utilisation. poursuites pénales. perspectives.

Question publiée au JO le : 09/04/2013 page : 3744
Réponse publiée au JO le : 18/06/2013 page : 6461

Texte de la question

M. Jacques Bompard attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'instruction judiciaire relative aux problèmes de santé publique provoqués par l'amiante. En charge de l'instruction des dossiers de l'amiante, la juge a été déchargée de ses fonctions, au prétexte de la limite de dix ans pour l'exercice de la fonction de juge d'instruction au sein d'une même juridiction, fixée par la loi organique du 25 juin 2001. Or cette loi n'est pas rétroactive et, dès lors, elle ne saurait s'appliquer à la magistrate, puisque, sur le fond, ni son affectation ni sa mission n'ont changé. Elle a été saisie par de nombreuses associations des victimes de l'amiante, tels l'association nationale de défense des victimes de l'amiante et le syndicat CGT-Isover d'Orange. Les associations de victimes ont exprimé de fortes inquiétudes concernant l'opportunité d'une telle décharge, alors qu'elle risque d'influer sur le cours d'affaires dont les retombées politiques sont considérables. Il lui demande ce qu'elle compte faire pour assurer l'exercice de la justice dans ce dossier et rassurer les victimes et familles de victimes qui craignent une manoeuvre purement politique.

Texte de la réponse

Madame Bertella-Geffroy, le magistrat, en charge des dossiers d'instruction relatifs à l'amiante, a été nommée vice-présidente chargé de l'instruction au tribunal de grande instance de Paris par décret du 26 février 2003 et installé le 3 mars 2003. L'article 28-3 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature modifié par la loi organique n° 2001-539 du 25 juin 2001 limite l'exercice des fonctions de juge d'instruction au sein d'une même juridiction à une durée de 10 ans pour les nominations intervenues à compter du 1er janvier 2002. Compte tenu du débat juridique et statutaire initié par Madame Bertella-Geffroy, la garde des sceaux, ministre de la Justice, a pris la décision le 22 février dernier de saisir sur le fondement de l'article 65 de la Constitution, la formation plénière du Conseil supérieur de la magistrature afin qu'elle donne son avis sur la manière dont on peut interpréter les règles statutaires applicables à sa situation. La garde des sceaux avait déjà demandé l'avis du secrétaire général du gouvernement. Après avoir pris acte de l'avis du Conseil supérieur de la magistrature du 13 mars 2013, la garde des sceaux n'a pu que constater que les conclusions émises rejoignaient celles formulées par le secrétaire général du gouvernement le 24 décembre 2012. En effet, dans son avis rendu le 13 mars 2013 le Conseil supérieur de la magistrature a considéré que les magistrats du premier grade qui occupaient au 1er janvier 2002 la fonction de premier juge spécialisé et qui, postérieurement à cette date, ont été nommés dans la même fonction spécialisée sur un autre poste dans le même tribunal, doivent se voir appliquer les dispositions de l'article 28-3 de l'ordonnance du 22 décembre 1958. En conséquence, ils sont, du fait de la loi, déchargés automatiquement de leurs fonctions spécialisées à l'échéance des 10 ans. Le président de la République a ainsi constaté la décharge d'activités de Madame Bertella-Geffroy par décret en date du 27 mars 2013 publié au Journal Officiel de la République Française le 29 mars 2013. Il n'existe pas d'exception à l'application de cette règle du statut de la magistrature et il ne s'agit pas d'une mutation mais d'une décharge des fonctions de juge d'instruction. Comme la garde des sceaux s'y était engagée, Madame Bertella-Geffroy a été immédiatement remplacée afin d'assurer un suivi dans la conduite de ses dossiers. Par ailleurs, des cosaisines ont été mises en place pour chacun des dossiers concernés. Enfin, la ministre de la Justice a fait savoir au premier président de la Cour d'Appel de Paris son souhait d'être informée de toute difficulté en termes d'effectifs ou demoyens qui empêcheraient le déroulement normal de la procédure afin d'y répondre dans les plus brefs délais. La bonne administration de la justice sera ainsi assurée de même que la continuité du service public de la Justice. Ainsi qu'elle y veillera, l'instruction des dossiers relatifs à l'amiante ne devrait dans ce cas pas connaître de retard.