14ème législature

Question N° 24031
de M. Éric Alauzet (Écologiste - Doubs )
Question écrite
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > énergie et carburants

Tête d'analyse > énergies renouvelables

Analyse > déchets agricoles. méthanisation. perspectives.

Question publiée au JO le : 16/04/2013 page : 4045
Réponse publiée au JO le : 21/01/2014 page : 683
Date de changement d'attribution: 03/07/2013

Texte de la question

M. Éric Alauzet alerte Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la mise en oeuvre de la directive nitrates et du plan biogaz par le Gouvernement et le soutien à la méthanisation agricole. La méthanisation consiste à produire du gaz par fermentation de matières organiques. Le processus de méthanisation est possible à partir d'effluents agricoles (lisier, fumier) et nécessite l'apport de matières sèches (paille, déchets verts, graisses...) pour favoriser la fermentation. Ce biogaz est transformé en électricité ce qui permet une production énergétique conséquente et intéressante car sans émission supplémentaire de CO2. Les projets de méthanisation sont donc positifs en termes énergétique. Cependant après cette méthanisation on obtient un produit : le digestat. Ce résidu n'est en rien appauvri en matières organiques, chaque unité d'azote ou de phosphore méthanisée se retrouvant dans le digestat. Ce digestat est alors l'équivalent, en charge de nutriments, d'un lisier de porc. Il est donc nécessaire d'être vigilant sur l'utilisation de ce digestat, car l'épandage, comme engrais, des résidus d'azote issu de la méthanisation sur les terres avoisinantes des unités de méthanisation représente une menace environnementale envers la qualité de l'eau et des prairies. L'azote du digestat se présente sous forme minérale à 80 % contrairement au fumier de bovin à 80 % sous forme organique. Cette différence est très importante : si l'azote organique est assez bien retenu par le sol et assimilé par les plantes de façon progressive, il n'en est pas de même pour l'azote minéral. Très soluble, il est directement disponible pour les plantes, mais tout excès percole irrémédiablement en profondeur du fait de l'absence de fixation dans le sol. Il rejoint ainsi les eaux souterraines ou superficielles. Les conséquences de cette absorption dans les eaux souterraines ou superficielles d'une quantité supérieure d'azote sont doubles : une pollution des eaux aggravées et un appauvrissement de la richesse floristique des prairies. Des solutions alternatives existent : il est possible d'exporter les excédents d'azote après déssèchage vers des zones déficitaires et hors du bassin versant et il est également possible de développer des projets de méthanisation respectant les impératifs énergétiques et la gestion des effluents d'élevage et de la fertilisation. En effet, il est possible de privilégier les projets associant méthanisation, compostage et préservation de l'élevage sur paille pour une fertilisation mixte moins lessivable et lus durable. Dans tous les cas il est impératif de bien prendre en compte la taille de l'unité de méthanisation en fonction de la capacité du territoire à accepter les rejets, et le cas échéant de prévoir l'exportation de ces rejets Au regard de l'intérêt énergétique de la méthanisation, ainsi que du nécessaire encadrement de ces activités, il souhaiterait donc savoir quelles mesures le Gouvernement prendra pour soutenir la méthanisation agricole et les conditions de ces aides afin de permettre le développement d'une méthanisation associant efficacité énergétique, gestion des effluents d'élevage et protection des territoires.

Texte de la réponse

La réglementation sur les installations de traitement de déchets a été révisée en 2009 et 2010, avec notamment la création de rubriques de la nomenclature des installations classées spécifiques à la méthanisation et à la combustion du biogaz. Les installations de petite taille traitant des matières agricoles ou agroalimentaires peuvent ainsi relever du régime des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) de la déclaration, et les installations de taille intermédiaire, traitant entre 30 et 50 tonnes par jour, peuvent bénéficier du régime de l'enregistrement, qui correspond à une autorisation simplifiée. Trois textes concernant la valorisation mixte ou double valorisation du biogaz ont été publiés le 28 février 2013 au Journal officiel : le décret n° 2013-177 du 27 février 2013 modifiant le décret n° 2011-1597 du 21 novembre 2011 relatif aux conditions de contractualisation entre producteurs de biométhane et fournisseurs de gaz naturel ainsi que deux arrêtés, l'arrêté du 27 février 2013 modifiant l'arrêté du 23 novembre 2011 fixant les conditions d'achat du biométhane injecté dans les réseaux de gaz naturel et l'arrêté du 27 février 2013 modifiant l'arrêté du 19 mai 2011 fixant les conditions d'achat de l'électricité produite par les installations qui valorisent le biogaz. Les installations de méthanisation peuvent désormais choisir, suivant leur situation particulière (possibilité de valorisation de la chaleur, éloignement des réseaux, etc.), entre deux modes de valorisation du biogaz produit : cogénération (électricité et chaleur) ou injection après épuration. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) aide financièrement les investissements de méthanisation. Sur la période 2009-2012, l'ADEME a soutenu 204 méthaniseurs pour un montant d'aides financières de 78 millions d'euros. Pour 2013, l'ADEME devrait dépenser 35 millions d'euros en soutien à environ 130 projets de méthanisation. Le plan « énergie méthanisation autonomie azote » (EMAA) présenté le 29 mars dernier a pour objectif de permettre un meilleur traitement et une meilleure gestion de l'azote et d'accélérer le développement de la méthanisation à la ferme. Ce plan doit permettre de développer en France à l'horizon 2020, 1 000 méthaniseurs à la ferme, contre 90 à fin 2012, tout en optimisant le cycle de l'azote au niveau local. Une énergie renouvelable sera produite à partir d'effluents d'élevage, permettant leur valorisation énergétique, agronomique et économique, tout en contribuant à l'autonomie énergétique des exploitations agricoles. Cela aura pour conséquences d'améliorer le bilan gaz à effet de serre des exploitations, directement par la réduction des émissions de méthane liées aux élevages, et indirectement par la substitution de chaleur, de carburants et d'engrais d'origine fossile, par de la chaleur, du biogaz et des fertilisants d'origine naturelle et locale. Des dispositions sur l'épandage des digestats sont également prévues dans ce plan. Le ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt notamment travaille à leur homologation collective afin de faciliter leur utilisation en tant que matière fertilisante, ayant vocation, précisément en raison des caractéristiques que vous mentionnez, à se substituer à de l'azote minéral, en respectant les conditions d'emploi de ce type de fertilisant. Afin d'atteindre ces objectifs, les freins au développement des projets seront levés. En particulier, un guichet unique sera créé pour les porteurs de projets pour toutes les démarches administratives. De plus, le seuil du régime d'autorisation d'intrants sera porté de 50 à 60 tonnes par jour dans le cadre de la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement. Toujours dans un esprit de simplification, le Gouvernement a décidé que soit menée dans plusieurs régions une expérimentation destinée à unifier les procédures et fusionner les autorisations nécessaires pour la réalisation d'un même projet. Ainsi, le projet de loi d'habilitation à prendre par ordonnances diverses mesures de simplification et de sécurisation de la vie des entreprises, en cours de discussion au Parlement, permet l'expérimentation d'une autorisation unique pour les installations de méthanisation (comprenant permis de construire, autorisation ICPE, défrichement, dérogation à la préservation des espèces protégées, autorisation au titre du code de l'énergie et liaisons électriques internes). Enfin, le tarif de rachat de l'électricité produite sera optimisé. Dans le cadre du plan EMAA, environ 130 nouveaux projets de méthaniseurs seront accompagnés entre 2013 et 2020, soit une augmentation d'environ 80 % par rapport au rythme d'émergence antérieur des installations.