14ème législature

Question N° 25231
de M. Jean-Frédéric Poisson (Union pour un Mouvement Populaire - Yvelines )
Question écrite
Ministère interrogé > Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social
Ministère attributaire > Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

Rubrique > travail

Tête d'analyse > médecine du travail

Analyse > réforme. mise en oeuvre.

Question publiée au JO le : 23/04/2013 page : 4386
Réponse publiée au JO le : 24/09/2013 page : 10191

Texte de la question

M. Jean-Frédéric Poisson attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur la situation des Services de santé travail interentreprises (SSTI) dans les suites de la réforme de ce secteur, intervenue suivant la loi n° 2011-867 du 20 juillet 2011 et les décrets n° 2012-135 et 2012-137 du 30 janvier 2012, et sur leurs difficultés pratiques quant au recrutement et aux modalités d'exercice des collaborateurs médecins. Le statut de collaborateur médecin est une création réglementaire consacrée par l'article nouveau R. 4623-25 du code du travail, qui permet auxdits services d'employer des médecins qui s'engagent à suivre une formation en vue de l'obtention de la qualification en médecine du travail auprès de l'ordre des médecins, et prévoit leur encadrement par un médecin qualifié en médecine du travail que ces médecins collaborateurs ont pour mission d'assister. Par une circulaire DGT n° 13 du 9 novembre 2012 relative à la mise en œuvre de la réforme de la médecine du travail et des services de santé au travail, laquelle fait écho à un modèle de contrat d'embauche de cette catégorie de praticiens proposé en ligne par le Conseil national de l'ordre des médecins, l'administration indique qu'un médecin collaborateur ne saurait dispenser les mêmes actes « médico-légaux » qu'un médecin du travail (comme les avis d'aptitude) prévus par le code du travail. Or une telle limitation de la compétence de ces médecins collaborateurs d'une part, n'est nullement envisagée par les textes en vigueur (bien au contraire, l'article R. 4623-15 du code du travail dispose expressément qu'un collaborateur médecin peut remplacer un médecin du travail) et d'autre part, est contraire à la nouvelle approche de la réforme en cours qui prévoit que les médecins du travail, en tant qu'animateurs et coordinateurs des équipes pluridisciplinaires de santé au travail, comprenant notamment des infirmiers et des collaborateurs médecins, disposent de la latitude nécessaire pour mettre en œuvre les compétences disponibles en son sein, sans qu'une circulaire de l'administration ne vienne la limiter au préjudice de l'intérêt général. À l'heure où l'ensemble du territoire souffre d'une pénurie médicale chronique qui pénalise la prévention des risques professionnels dans les TPE-PME et expose juridiquement leurs dirigeants, et alors que la mission des services en charge de la prévention de l'altération de la santé de millions de travailleurs est en pleine mutation, de tels freins à une prise en charge de qualité des salariés ainsi qu'à l'attractivité dont devrait bénéficier cette spécialité médicale sont préjudiciables. Il lui demande donc quelles mesures sont envisagées pour aider à la réussite de cette réforme nécessaire, notamment s'agissant du déploiement efficient des collaborateurs médecins.

Texte de la réponse

Confrontés au problème de la démographie en médecine du travail et des difficultés de recrutement des services de santé au travail, les pouvoirs publics (le Gouvernement alors en place) ont souhaité y apporter une réponse par les dispositions réglementaires d'application de la loi n° 2011-867 du 20 juillet 2011 relative à l'organisation de la médecine du travail. Ainsi, outre un certain nombre de dispositions visant à libérer du temps pour le médecin du travail, notamment la pluridisciplinarité des équipes des services de santé au travail interentreprises et la possibilité, sous le contrôle de l'Etat, via l'agrément du service de santé au travail, et sous réserve de contreparties effectives en terme d'actions pluridisciplinaires et de mise en place d'entretiens infirmiers, de moduler la périodicité des visites médicales du travail, plusieurs mesures sont de nature à remédier à la pénurie objective de médecins du travail. Il s'agit en effet, en premier lieu, de la possibilité de recruter des collaborateurs médecins, permettant aux médecins qui le souhaitent de se reconvertir dans la spécialité de la médecine du travail. Ces médecins s'engagent à suivre une formation en vue de l'obtention de la qualification en médecine du travail auprès de l'ordre des médecins ; ils sont encadrés par un médecin qualifié en médecine du travail qu'ils assistent dans ses missions. Il est important de souligner que ce statut ouvre une passerelle pérenne vers la spécialité en médecine du travail. Les conditions d'exercice du collaborateur médecin et ses missions ne sont pas définies règlementairement. Légalement, seul un médecin qualifié en médecine du travail peut exercer les missions qui lui sont dévolues par le code de travail. Comme l'indique la circulaire de la direction générale du travail (DGT) du 9 novembre 2012, c'est donc par un protocole de délégation d'actes annexé au contrat de travail que sont précisés les actes et missions pouvant être confiés au collaborateur médecin. Le contenu de ce protocole prend en considération le parcours individuel et professionnel du collaborateur médecin ; il peut évoluer au fur et à mesure du déroulement de sa formation. Ces dispositions résultent de la volonté de définir un positionnement du collaborateur médecin au sein du service de santé au travail qui n'occulte pas les missions pouvant être confiées à l'interne en médecine du travail, afin de préserver la filière de DES de médecine du travail, et respecte le fait que si ce collaborateur est médecin, il n'a pas encore la qualification en médecine du travail exigée par la réglementation. Toutefois, les missions du collaborateur médecin ainsi définies peuvent apparaître restrictives et de nature à freiner non seulement les candidatures de médecins vers cette formation et ce métier, mais aussi les projets de recrutement des services de santé au travail. C'est pourquoi les services de la direction générale du travail, de la direction générale de l'offre de soins et du conseil national de l'ordre des médecins, travaillent conjointement pour faire évoluer les missions du collaborateur médecin et ses conditions d'exercice au sein des services de santé au travail, afin qu'il puisse remplir progressivement l'ensemble des missions du médecin du travail, en particulier la rédaction des avis relatifs à l'aptitude du salarié à son poste de travail. Ces décisions prises par le collaborateur médecin resteront sous la responsabilité du médecin du travail tuteur. Au-delà de la création du statut de collaborateur médecin, l'attractivité de la spécialité en médecine du travail est aussi améliorée par la facilitation des stages dans les services de santé au travail, pour les internes, mais aussi pour les étudiants inscrits en deuxième cycle des études médicales. Enfin, la loi du 20 juillet 2011 offre la possibilité pour les services de santé au travail de recruter, à titre temporaire, un interne de la spécialité qui exercera sous l'autorité d'un médecin du travail expérimenté du service de santé au travail. L'objectif de ces mesures est d'aboutir à une plus grande attractivité de cette spécialité médicale, au coeur des questions de santé au travail et de protection des salariés. Dans ce cadre, une attention toute particulière est accordée à la poursuite des réflexions sur ce sujet avec les ministères chargés de la santé et de l'enseignement supérieur.