Rubrique > banques et établissements financiers
Tête d'analyse > carte bancaire
Analyse > coûts. tarifs. politiques communautaires.
M. Éric Straumann attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur le projet de réforme des moyens de paiements que la Commission européenne est en train d'élaborer et dont les conséquences pourraient pénaliser le pouvoir d'achat des consommateurs français, et remettre en cause les bénéfices apportés par les cartes aux commerçants et à l'économie dans son ensemble. La Commission européenne veut en effet harmoniser le marché européen des paiements par cartes bancaires. Elle a présenté ses intentions l'an dernier dans son livre vert sur les moyens de paiement et annoncé qu'elle allait légiférer sur le sujet dans les prochains mois. Pour harmoniser ce marché, elle propose notamment d'intervenir pour réduire l'interchange de façon arbitraire partout en Europe, sans vraiment tenir compte des conditions propres à chaque marché national. L'interchange permet aujourd'hui aux commerçants et aux consommateurs de partager équitablement les coûts et les investissements liés au fonctionnement des services de paiement par cartes (garanties de paiements ; remboursements en cas de fraude ; innovation ; investissements dans la sécurité des transactions traditionnelles et des transactions sur des supports évolutifs tels qu'Internet ou les téléphones ; etc.). Et si l'objectif de réduire la contribution de l'une ou l'autre partie est tout à fait compréhensible, cela n'implique pas pour autant que l'on réduit les coûts et les investissements qui y sont liés. Par conséquent, réduire la contribution de l'un revient à augmenter la contribution de l'autre. En proposant de réduire l'interchange de façon arbitraire, la Commission risque en réalité de menacer tout l'équilibre des paiements par cartes. En effet, si l'interchange n'est plus payé par les commerçants, les consommateurs devront mécaniquement payer à leur place. Et si les cartes sont plus chères, les consommateurs, dont le pouvoir d'achat est déjà largement contraint, utiliseront davantage les espèces (ou les chèques) et réduiront le nombre de cartes en leur possession. C'est ce qui s'est produit sur trois continents différents : en Australie, aux États-unis, et en Espagne. Avec une augmentation du coût des cartes pour les consommateurs et un recours accru aux espèces, c'est tout le processus de dématérialisation des paiements qui sera remis en cause, alors même qu'elle apporte de nombreux avantages à tous les acteurs. Cette question majeure est discutée à Bruxelles dans une indifférence presque générale. Aussi souhaiterait-il savoir comment le Gouvernement français entend agir à Bruxelles pour défendre l'intérêt des consommateurs français ainsi que protéger un système qui fonctionne parfaitement jusque-là et apporte de nombreux avantages à tous les acteurs économiques.