14ème législature

Question N° 25481
de M. Yannick Favennec (Union des démocrates et indépendants - Mayenne )
Question écrite
Ministère interrogé > Éducation nationale
Ministère attributaire > Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Rubrique > enseignement

Tête d'analyse > illettrisme

Analyse > lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 30/04/2013 page : 4659
Réponse publiée au JO le : 02/12/2014 page : 10071
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

M. Yannick Favennec attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur l'illettrisme. Encore, aujourd'hui, près de 40 % des élèves sortent du primaire sans savoir ni lire, ni écrire correctement et la France recule dans tous les classements internationaux en lecture Pisa, Pirls. Ainsi, l'inquiétude des parents ne cesse de croître. Par ailleurs, selon le Conseil d'orientation pour l'emploi (COE), près de 1,8 millions de salariés, soit 8 % des salariés, seraient atteints d'illettrisme, pourcentage qui augmente avec l'âge. Près de 15 % des chômeurs se trouveraient également dans cette situation. Enfin, environ 5 % des jeunes ne sauraient ni lire, ni écrire, avec de grandes disparités entre les territoires, les plus défavorisés voyant le taux atteindre le seuil de 10 %. Certaines associations préconisent le recours aux méthodes syllabiques dès le CP et la mise en place d'une évaluation nationale centrée sur la lecture dans le but de faire reculer l'illettrisme à l'école comme par exemple en Angleterre. Ainsi, il lui demande quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet.

Texte de la réponse

Le bon usage de la langue française, tout particulièrement la maîtrise des compétences en lecture et en écriture, sont des facteurs de réussite scolaire pour les enfants. Pour les adultes, c'est un déterminant de l'insertion et de la qualité de vie professionnelle, sociale et familiale. Les statistiques réalisées par la direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP), publiées le 22 octobre 2012 font état d'une proportion de 88,4 % des élèves qui maîtrisent les compétences de base en français en cours moyen seconde année (CM2). Ils ne sont plus que 72 % et 80 %, respectivement en RRS et Eclair (programme Ecoles, collèges, lycées pour l'ambition, l'innovation et la réussite). Les évaluations Cedre, et PISA de 2012, convergent pour montrer un affaissement particulier des compétences liées à la compréhension des écrits : la proportion des élèves peu performants passe de 15,2 % en 2000 à 19,7 % en 2009. La note n° 19 de mai 2014 sur l'évolution des acquis des élèves en début de cours élémentaire seconde année (CE2) entre 1999 et 2013 rapporte une hausse du pourcentage d'élèves les plus faibles (de 10 % en 1999 à 12.7 % en 2013). En lecture, on constate une stabilité dans les tâches de décodage (avec 89 % de réussite, sans variation et un affaissement en compréhension de texte : 43 % de réussite en 1999 pour 40 % en 2013). La langue française est considérée phonégraphiquement opaque mais elle manifeste une régularité moyenne d'environ 85 %. Bien que le français soit une langue alphabétique, du fait de ses évolutions historiques, la difficulté de son apprentissage en cours préparatoire tient d'une part à son asymétrie entre l'oral et l'écrit (26 lettres existent pour formaliser les 130 graphies écrites qui codent les 35 sons de l'oral) et, d'autre part, à la complexité de sa morphologie. Il est plus facile de lire que d'écrire le français. Les enseignants mettent en oeuvre dans les classes de cours préparatoire les programmes en vigueur qui stipulent une entrée dans l'écrit par une méthode synthétique de type phonique (j'entends un son, j'apprends à l'écrire puis je fusionne plusieurs sons et j'apprends leurs graphies) ou syllabique (je vois une graphie, j'apprends à la prononcer dans des contextes syllabiques, puis/et dans des mots). Les résultats des élèves dans ce domaine, à la fin du cycle 2, sont satisfaisants et stables comme le montre la récente enquête comparative 1999/2013 (Note d' information n° 19 - mai 2014) de la direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP). Au Royaume-uni, les résultats progressent lorsque la méthode synthétique est mise en oeuvre. La langue anglaise est également alphabétique, même si elle est moins régulière phonégraphiquement que le français. C est ce que révèlent les inspecteurs de l'Office for Standards in Education, Children's Services and Skills (OFSTED) à partir de certaines expérimentations récentes conduites notamment en Ecosse avec les Programmes of study for reading and writing proposant un travail formel poussé sur l'apprentissage de la langue orale chez les plus petits, puis sur l'écrit, en identification des mots et compréhension, chez les plus grands. Le rapport Reading by six présente ses résultats favorables, mais avec des réserves implicites : 58 % des élèves, anglophones et non anglophones, de six ans réussissent les tests phonémiques. Cela manifeste qu une approche de ce type s'adresse à tous, y compris ceux dont la langue maternelle n'est pas la langue de scolarisation, mais également que 42 % ne réussissent pas le test complètement. Dès 2005, l'étude du Clackmannanshire montrait qu'à n+ 6 ans de l'apprentissage (équivalent d'âge CM1 français) les élèves ayant appris avec une méthode synthétique montraient un écart positif de +10 points sur la lecture et l'épellation de mots, et de +7 points en écriture (Test WOLD), par rapport à l'usage d'une méthode mixte, d'ailleurs assez peu décrite. Ce différentiel est normal, la langue anglaise est plus difficile à écrire qu'à lire. Pour finir, les chercheurs n'ont pas su expliquer les 6 % d'élèves en très grande difficulté. Rapprochés des élèves en difficulté français, on peut extrapoler qu'ils sont en échec pour les mêmes raisons. La maîtrise de la langue est une priorité absolue de l'Ecole : le socle commun de connaissances, de compétences et de culture, en cours de rénovation sur la base des propositions du Conseil supérieur des programmes (CSP) place la connaissance de la langue française, langue de scolarisation, comme compétence majeure de l'apprentissage. De nombreuses actions sont engagées ou poursuivies en primaire pour favoriser l'apprentissage des fondamentaux de la langue, par exemple : - la priorité accordée à l'école primaire, et plus particulièrement à l'école maternelle ; - la mise en oeuvre de la scolarisation des enfants de moins de trois ans, notamment en éducation prioritaire ; - le dispositif « plus de maîtres que de classes » ; - des protocoles de travail sur le vocabulaire, organisés pour des leçons spécifiques, sont mis à disposition des enseignants dès l'école maternelle ; - de nouvelles pistes sont exploitées dans le domaine du numérique, qui peuvent apporter des solutions alternatives à la réconciliation avec l'écrit pour ceux qui s'en sont éloignés. La circulaire de rentrée 2014 (22 mai 2014) insiste sur la maîtrise de la langue et la priorité accordée à son apprentissage. La formation des enseignants est par ailleurs refondée dans les écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE) et doit tenir également compte d'une meilleure connaissance du diagnostic des difficultés et des aides les plus appropriées pour améliorer la réussite des élèves.