Question de : M. Jean-Pierre Le Roch
Morbihan (3e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Jean-Pierre Le Roch attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur l'inquiétude de nombreux scieurs face à l'accélération des exportations de grumes résineuses vers la Chine. Alors que les deux premiers fournisseurs de la Chine, États-unis et Russie y exportent de plus en plus majoritairement des sciages, la France, troisième fournisseur en bois de feuillus tempérés exporte très majoritairement des grumes. En 2010, elle a exporté directement vers la Chine, en équivalent bois ronds, cinq fois plus de grumes de chêne (100 000 mètres cubes) que de sciages. Cette année se profile une situation dans laquelle le nombre de grumes exportés serait plus important que le nombre de grumes sciés par les scieries de Bretagne. Provenant essentiellement des boisements effectués avec l'aide de l'État dans les années 1970, ces grumes sont exportées sans transformation donc sans valeur ajoutée locale. Si les coupes sanitaires liées à la présence de dendroctone ont généré des volumes supplémentaires, un paradoxe subsiste en la matière. En effet, la législation impose un traitement NIMP15 coûteux ainsi que l'absence totale d'écorces pour toute exportation directe ou indirecte (par des industriels utilisant palettes ou caisse) de ces emballages. Bien au contraire, l'exportation de matière première non transformée sous forme de grumes ne requiert qu'une simple pulvérisation de la marchandise alors que ces dernières ne sont pas écorcées. Le coût de l'approvisionnement des scieries en matière première est l'un des facteurs à considérer pour gagner en compétitivité et être en mesure de créer des emplois en France. Les investissements importants effectués par de nombreuses scieries bretonnes pour moderniser et augmenter leur capacité de production, en particulier ces deux dernières années, se voient menacés dans la mesure où une raréfaction de la matière première est prévisible dans les cinq prochaines années. C'est pourquoi, conformément à la démarche double de soutenabilité environnementale et de redressement économique pérenne engagée par le Gouvernement, il lui demande d'indiquer quelles sont les mesures envisagées pour assurer l'équité entre les mesures applicables aux grumes résineuses exportées et celles relatives aux emballages des produits transformés. De plus, il lui demande d'étudier l'opportunité d'effectuer un bilan des coupes sanitaires et de leur degré d'urgence.

Réponse publiée le 9 juillet 2013

Pour approvisionner son industrie, la Chine importe de plus en plus de bois. Alors que les premiers fournisseurs de la Chine, États-Unis et Russie, y exportent de plus en plus de sciages, la France, troisième fournisseur de feuillus tempérés, exporte très majoritairement des grumes. Sous l'effet du ralentissement général des échanges, les exportations françaises de bois ronds ont globalement diminué en 2012 (23 % en valeur), s'établissant à 252 millions d'euros. Les exportations de bois ronds vers la Chine ont également baissé en 2012. Toutefois, cette diminution s'explique surtout par la baisse des exportations de feuillus (- 30 %) alors que les exportations de grumes de résineux sont restées stables. Seules les exportations vers la Chine de sapins et d'épicéas, qui se sont substitués aux pins maritimes, ont augmenté significativement passant de 6,2 à 13 millions d'euros. Ce flux croissant de grumes de sapins et d'épicéas vers la Chine a été alimenté en partie par la récolte de bois réalisée en Bretagne. Les épicéas de Sitka, plantés dans les années 70 à l'époque du fonds forestiers national (FFN) et arrivant en grande partie à maturité pour l'exploitation, ont contribué à répondre aux besoins chinois de grumes de résineux. Les volumes d'épicéas de Sitka exportés ont ainsi représenté, en 2011, un quart du volume récolté en Bretagne (200 000 m3). Les scieries qui ont investi en Bretagne pour la transformation de ces épicéas sont confrontées à des difficultés d'approvisionnement malgré l'augmentation de la récolte. La hausse des prix provoquée par la demande chinoise a incité les propriétaires et les gestionnaires forestiers à mettre en vente les bois. L'accroissement des prélèvements d'épiceas de Sitka est également lié à la présence de dendroctone, insecte parasite, qui rend nécessaires des coupes sanitaires, les autorisations de coupes étant limitées aux situations d'urgence sanitaire. Le prolongement de cette tendance serait susceptible de mettre en péril la pérennité de la ressource. On constate cependant une amélioration du renouvellement des peuplements puisqu'il a été vendu 600 000 plants d'épicéa de Sitka pendant la campagne 2011/12 soit 34 % de plus que pendant la campagne précédente. S'agissant de la régulation des exportations de grumes, une redevance spécifique pour le traitement des grumes destinées à l'exportation ne serait pas de nature à rééquilibrer les niveaux de concurrence auxquels sont soumis les professionnels français de la transformation du bois. Cela relèverait de dispositions de nature sanitaire qui ne sauraient être confondues avec des questions de compétitivité. Le ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt engage une réflexion de fond sur les termes du commerce international et sur les déséquilibres engendrés par les niveaux de taxation mais aussi par des exigences environnementales et sociales différentes. D'éventuelles mesures visant à rééquilibrer les régimes de taxes pour l'importation de produits transformés ou l'exportation de produits bruts relèvent des compétences exclusives de l'Union européenne et ne peuvent s'ouvrir que dans ce cadre. L'enjeu majeur pour la filière bois française réside avant tout dans sa capacité à promouvoir des solutions industrielles compétitives sur les marchés domestiques et à l'exportation, et à créer des emplois en France en dynamisant la gestion forestière et en développant, notamment dans la construction, l'utilisation du bois, matériau renouvelable aux qualités exceptionnelles. A cet égard, la préférence pour des produits finis entièrement fabriqués en France passera par de meilleures finitions, qualités et adaptations aux besoins du marché. Elle peut aussi s'appuyer sur une meilleure communication auprès du consommateur sur l'origine des produits. Cet enjeu est bien identifié et fait l'objet de débats dans le cadre de la préparation du projet de loi d'avenir pour l'agriculture, l'agroalimentaire et la forêt, sur la base notamment des conclusions de la mission confiée par le Premier ministre à M. Jean-Yves Caullet, député de l'Yonne, sur la forêt française et la filière bois et des recommandations de la mission interministérielle placée sous l'égide des ministres en charge du redressement productif, de l'écologie et de l'agriculture. Enfin, les propositions formulées par les acteurs de la filière bois dans le cadre des rencontres régionales alimentent le plan national d'action pour la filière bois élaboré par le ministère du redressement productif et le ministère en charge de la forêt, en partenariat avec l'association des régions de France.

Données clés

Auteur : M. Jean-Pierre Le Roch

Type de question : Question écrite

Rubrique : Relations internationales

Ministère interrogé : Agriculture, agroalimentaire et forêt

Ministère répondant : Agriculture, agroalimentaire et forêt

Dates :
Question publiée le 30 avril 2013
Réponse publiée le 9 juillet 2013

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