14ème législature

Question N° 26912
de M. Claude Goasguen (Union pour un Mouvement Populaire - Paris )
Question écrite
Ministère interrogé > Outre-mer
Ministère attributaire > Outre-mer

Rubrique > outre-mer

Tête d'analyse > DOM-ROM : La Réunion

Analyse > énergie et carburants. énergies renouvelables. électricité produite. rachat par EDF. tarif.

Question publiée au JO le : 21/05/2013 page : 5245
Réponse publiée au JO le : 04/02/2014 page : 1107

Texte de la question

M. Claude Goasguen attire l'attention de M. le ministre des outre-mer sur le non-respect des engagements de l'état eu égard au tarif de rachat de l'électricité solaire, sur l'île de La Réunion. Pour faire de ce département le modèle mondial d'autosuffisance énergétique, l'État a renouvelé en 2010 sa garantie d'un tarif de rachat spécifique aux DOM (effectif depuis 2006) pour l'électricité d'origine photovoltaïque, à 40 centimes le kilowattheure (kWh). C'est uniquement dans ce contexte d'engagements publics et d'une garantie de rachat sur 20 ans au tarif fixé à l'avance, qu'ont investi à La Réunion un certain nombre de sociétés de production d'électricité photovoltaïque ou encore des sociétés de portage fiscal, propriétaires de centrales photovoltaïques (loi Girardin industrielle). Cependant, contre toute attente, alors que les centrales étaient déjà achetées (et payées) et que les demandes de raccordement déjà déposées auprès d'EDF, un décret du 9 décembre 2010 a inopinément suspendu l'obligation de rachat d'EDF, sans préavis et avec effet rétroactif. Tandis que ce décret empêchait momentanément le raccordement des centrales (et donc la perception des revenus EDF), les investisseurs ont néanmoins espéré qu'une reprise de l'obligation de rachat au tarif d'origine interviendrait dans un délai financièrement supportable. En février 2011, le Gouvernement annonçait ainsi comme objectif la mise en place d'un nouveau tarif fixé à environ 20 % en dessous du tarif en vigueur avant moratoire. L'arrêté du 4 mars 2011 respectait cet objectif pour la plupart des tarifs excepté pour l'outre-mer dont le tarif spécifique a été tout simplement supprimé. Les annonces successives du Gouvernement, notamment les engagements pris en mars 2011 (commission Baroin) puis par la ministre de l'écologie annonçant depuis La Réunion qu'un tarif de rachat particulier pour l'outre-mer serait adopté avant fin janvier 2012, ont incité à poursuivre l'activité des sociétés d'exploitation, comptant sur la mise en place de mesures de transition sur les centrales photovoltaïques déjà financées et mises en oeuvre depuis 2010. Aujourd'hui, plus de deux ans après le décret du 9 décembre 2010, le tarif spécifique outre-mer n'a toujours pas été rétabli : La Réunion a purement et simplement été oubliée des dispositifs, y compris lors du dernier plan filière de Delphine Batho du 7 janvier 2013, visant pourtant à relancer notre industrie photovoltaïque. Quant au tarif métropolitain applicable par défaut à La Réunion (8,40 centimes contre 40 garantis à l'origine), il ne permet financièrement pas la poursuite de l'activité des sociétés exploitantes, ni de s'approcher de l'objectif de développement durable tant annoncé. La décision subite de l'État de ne pas tenir ses engagements porte un message d'instabilité juridique aux entrepreneurs, autant qu'un préjudice important et une atteinte au droit. Il sollicite de l'État qu'il maintienne ses engagements et revienne, pour les sociétés engagées, au tarif de rachat formellement convenu.

Texte de la réponse

La Réunion est le territoire le plus avancé des outre-mer en matière de capacités de production d'énergie photovoltaïque, avec 153 mégawatts (MW) de puissance installée (environ 19,3 % de son mix énergétique). La très forte progression de la production d'énergie d'origine solaire, pour ce territoire qui souhaite être un modèle en matière de développement durable et d'énergies renouvelables, a en effet été stoppée suite au moratoire introduit par le décret n° 2010-1510 suspendant pour trois mois au 2 décembre 2010 l'obligation d'achat d'énergie d'origine solaire. Ce moratoire a été institué suite au constat de l'existence d'une « bulle » photovoltaïque, due à un écart important et persistant entre le coût effectif des équipements, et des éléments économiques tels que des tarifs d'achat non ajustables, accompagné d'un phénomène de démarchage commercial massif. Néanmoins, le décret en question prévoyait des dispositions transitoires visant à ne pas impacter les projets les plus avancés, c'est-à-dire ceux pour lesquels le producteur avait notifié l'acceptation de la proposition technique et financière avant le 2 décembre 2010. En revanche, le bénéfice de cette obligation d'achat aux conditions des tarifs précédents était conditionné à la mise en service des installations dans un délai de 18 mois à compter de la date de notification de l'acceptation de la proposition technique et financière ; le délai pouvant être allongé pour tenir compte de la durée des travaux de raccordement. Le soutien à la filière photovoltaïque s'est par la suite adapté aux contraintes posées par l'exploitation de l'énergie solaire. En janvier 2013, des mesures nationales d'urgence pour la relance de la filière photovoltaïque ont été présentées, conformément aux décisions prises dans le cadre de la conférence environnementale des 14 et 15 septembre 2012. Ces mesures, entrées en vigueur au 1er février 2013, visent à atteindre le développement annuel d'au moins 1000 MW de projets solaires. Cet objectif constitue un doublement des volumes cibles, ainsi qu'une réorientation des dispositifs de soutien vers la structuration d'une filière industrielle photovoltaïque créatrice de valeur ajoutée sur le territoire. Ce plan d'urgence a également permis en partie de faire face aux impacts du moratoire de décembre 2010, notamment via le lancement d'appels d'offres pour les installations sur bâtiments de plus de 100 kilowatts crêtes et les centrales au sol. Il faut par ailleurs souligner qu'avec 168 MW d'énergies renouvelables intermittentes (éolienne et photovoltaïque cumulées) raccordées au réseau réunionnais, la limite de 30 % d'énergies instables sur le réseau électrique, seuil introduit par l'arrêté ministériel du 23 avril 2008 au-delà duquel la sûreté de l'approvisionnement électrique n'est plus garantie, est désormais atteinte sur ce territoire. L'impact de cette énergie sur le réseau constitue donc un frein technique, compte-tenu de son taux de pénétration actuel. Ainsi, la progression de l'utilisation de l'énergie d'origine solaire s'est poursuivie à la Réunion à travers le soutien à différentes solutions de stockage (quatre projets retenus à l'appel d'offres solaire avec stockage lancé par la Commission de régulation de l'énergie pour une puissance totale de 19 MW), indispensables pour pallier le profil de production non garanti, fluctuant et parfois peu prévisible de cette énergie. Ces variations qui peuvent être brutales et de forte amplitude doivent être compensées en temps réel par des moyens de production dispatchables, car elles peuvent mettre en péril l'équilibre offre-demande des systèmes non-interconnectés. C'est pourquoi, pour permettre au réseau électrique de l'île de la Réunion d'accueillir des nouveaux projets d'exploitation de l'énergie solaire, le ministère des outre-mer défend l'intérêt de poursuivre les dispositifs de soutien à l'expérimentation et au développement de solutions de stockage innovantes. De plus, sur la base des propositions de la commission Baroin relative à la défiscalisation des investissements photovoltaïques outre-mer, le ministère des outre-mer a soutenu plusieurs orientations, dont l'intégration des projets sur les toitures des bâtiments dans les appels d'offres trimestriels lancés au niveau national, ainsi que la réalisation par le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) d'une mission d'étude sur l'adaptation à l'outre-mer des panneaux photovoltaïques intégrés aux toitures. Les travaux de réflexion menés à l'heure actuelle dans le cadre du projet de loi de programmation de la transition énergétique ont pour objectif de lever les freins technologiques, techniques, financiers et réglementaires à l'autoproduction de l'électricité d'origine photovoltaïque avec stockage, pour les ménages ainsi que le secteur tertiaire, tout en prenant en compte les questions spécifiques posées par l'accès à l'énergie dans les sites isolés.