Question de : M. Yannick Moreau
Vendée (3e circonscription) - Les Républicains

M. Yannick Moreau alerte M. le ministre de l'intérieur sur la disproportion des effectifs et des moyens mis en oeuvre par les forces de l'ordre, en totale inadéquation par rapport au caractère pacifique des manifestations du collectif La Manif Pour Tous s'opposant au projet de loi ouvrant le mariage et l'adoption aux couples de personnes de même sexe. Nombre de nos compatriotes ont été profondément choqués de constater la mobilisation d'effectifs de police, de compagnies républicaines de sécurité (CRS) et de gendarmerie, lourdement équipés, casqués, bottés comme s'ils avaient à faire face à des émeutiers violents là où il n'y avait que des familles, des étudiants et des personnes âgées. Les Français ne comprennent pas la mise en garde à vue, pendant plus de 17 heures, de 67 jeunes âgés de 18 à 25 ans selon la presse, qui s'étaient assis lundi 15 avril 2013 place Édouard-Herriot en silence et sans provocation. Les Français ne comprennent pas les scènes de violences policières contre les jeunes veilleurs assis sur l'esplanade des Invalides, à écouter en silence des textes de poésie et de philosophie, les soirs des mardi 16 avril 2013, mercredi 17 avril 2013 et jeudi 18 avril 2013. Ces scènes, où l'usage de la force publique a été en nette disproportion par rapport à la nature de ces rassemblements, choquent nos compatriotes qui y assistent en direct à travers les réseaux sociaux et les chaînes de télévision en continu. Les Français ne comprennent pas l'usage répété de gaz lacrymogène, en particulier dans la station de métro Invalides le mardi 16 avril 2013 au soir. Ces aérosols sont, pour les particuliers, considérés comme des armes de 6e catégorie. Leur possession non autorisée pour un particulier est constitutive d'un délit pénal réprimé par un maximum de trois ans d'emprisonnement et d'une amende pouvant aller jusqu'à 4 000 €. Aussi, l'utilisation de ces bombes lacrymogène en milieu clos constitue un emploi qui ne peut être considéré comme anodin au regard des critères d'emploi et des effets immédiats sur les citoyens. L'utilisation de gaz lacrymogène dans une station du métropolitain met en danger immédiat la santé et la sécurité des manifestants ainsi que des passants ainsi affectés par la volatilité de ces gaz. Ces gaz sont nocifs et les personnes allergiques ou asthmatiques risquent de graves complications. Enfin, nos compatriotes ne comprennent pas que des bandes d'émeutiers aient pu parcourir en toute impunité la ville de Paris le dimanche 12 et le lundi 13 mai 2013. Les débordements étaient manifestement prévisibles et la préfecture de police a failli dans son devoir d'assurance de la sécurité publique. Le montant des dégradations serait compris entre 750 000 et un million d'euros mais ces violences urbaines et ces détériorations des biens publics et privés n'ont entraîné la mise en garde à vue que de 47 personnes. Il lui demande de comprendre le désarroi des Français qui voient, d'une part, des émeutes urbaines extrêmement violentes, des blessés, 32 au total, des vitrines brisées et moins d'une cinquantaine de casseurs mis en cause et, d'autre part, des jeunes pacifiques malmenés par les forces de l'ordre et emmenés en garde à vue pour des motifs futiles et injustifiables. Il lui demande donc des précisions quant aux consignes données pour la gestion des manifestations citées ci-dessus.

Réponse publiée le 25 février 2014

Le Ministère de l'intérieur rappelle tout d'abord l'attachement qui est le sien à ce que le droit de manifester, garanti par la Constitution, s'exerce pleinement, dans le respect des conditions prévues par le législateur. Depuis le début des rassemblements d'opposants au projet de loi ouvrant le mariage aux personnes de même sexe au mois de mars 2013, les manifestations organisées se sont déroulées sans incident majeur après de nombreux échanges entre la préfecture de police et les organisateurs. Au mois d'avril, la préfecture de police a eu à gérer un certain nombre de rassemblements inopinés, non déclarés préalablement à ses services, à proximité immédiate des institutions de la République. De même, les forces de l'ordre ont également été confrontées tous les soirs à l'attitude de quelques récalcitrants qui refusaient de quitter les abords de l'Assemblée nationale malgré l'appel à la dispersion lancé pourtant par les organisateurs eux-mêmes, et malgré les sommations effectuées par les autorités civiles présentes sur place. Le ministère de l'intérieur tient à rappeler que le refus de se disperser après les sommations d'usage est constitutif du délit d'attroupement et justifie l'interpellation des personnes concernées. Dans la gestion de ces événements de voie publique, la préfecture de police a poursuivi deux objectifs, d'abord celui de permettre à toutes les opinions de s'exprimer librement (les manifestations du collectif de la Manif pour Tous ont été par moments, quotidiennes), mais aussi de veiller à ce que la protection des institutions de la République soit en permanence garantie. Enfin, la mission de la préfecture de police était également d'assurer la protection des manifestants eux-mêmes. S'agissant de l'utilisation des gaz lacrymogènes par les forces de l'ordre, qui s'inscrit dans un cadre légal bien défini qui est celui de la légitime défense, leur usage n'avait pour seul objectif que de repousser les individus les plus déterminés qui venaient au contact des forces de police et de gendarmerie en utilisant parfois des projectiles. L'utilisation de ces aérosols a eu pour effet d'incommoder, par la même occasion, les manifestants qui se trouvaient au plus près des auteurs de violences. Concernant les événements survenus en mai, la cérémonie de remise du trophée de champion de France sur la place du Trocadéro avait fait l'objet d'une préparation minutieuse ponctuée par des échanges entre la préfecture de police, les services de sécurité du club parisien et la ligue de football professionnel. Dans ce cadre, le club de football avait déployé un service d'ordre composé de stadiers dont la mission était de protéger le cheminement des bus des joueurs et l'accès au podium. Le dispositif policier, renforcé dès la veille au soir puis tout au long de la journée du 13 mai, était calibré à la hauteur des prévisions de participation et de risques. Les débordements constatés sont le résultat d'individus violents, venus pour perturber la cérémonie et pour se livrer à des actes de vandalisme. Toutefois, la réactivité des services de police a permis de contenir les dégâts dans un périmètre restreint, en particulier s'agissant de l'avenue des Champs Elysées, et dans un laps de temps limité, en raison d'un déploiement rapide d'un dispositif qui en a bloqué l'accès mais aussi grâce à l'intervention d'effectifs en tenue et en civil massivement présents sur cet axe. Le calme est alors rapidement revenu dans la capitale, la situation étant apaisée dès 21 heures et totalement normale à 22 h30. Sans nier le sérieux de ces incidents, il paraît important de rappeler que d'autres évènements ces dernières années se sont traduits par des dégradations supérieures et des atteintes physiques beaucoup plus graves sans donner lieu à une visibilité médiatique comparable ni à la mise en cause personnelle de responsables policiers. Le ministère de l'intérieur tient à souligner que la gestion de l'ordre public n'a pour seul objectif que de garantir la sécurité des personnes et des biens à l'occasion de grands rassemblements ou de manifestations. En aucune façon, elle n'est guidée par les intérêts partisans, et laisser entendre le contraire serait méconnaître le professionnalisme et la loyauté des cadres de la préfecture de police vis-à-vis des institutions républicaines. Les seules consignes qui vaillent en cette matière, dont chacun s'accordera à relever le caractère éminemment sensible, sont celles visant au maintien de l'ordre public en fonction de l'évolution de la situation sur le terrain.

Données clés

Auteur : M. Yannick Moreau

Type de question : Question écrite

Rubrique : Ordre public

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 28 mai 2013
Réponse publiée le 25 février 2014

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