14ème législature

Question N° 28493
de M. Jacques Bompard (Non inscrit - Vaucluse )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > ordre public

Tête d'analyse > manifestations

Analyse > personnes interpellées. ministère public. attitude.

Question publiée au JO le : 04/06/2013 page : 5728
Réponse publiée au JO le : 03/09/2013 page : 9297

Texte de la question

M. Jacques Bompard appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les atteintes aux droits individuels, l'usage de la garde à vue, et la proportionnalité des peines requises à l'encontre des personnes arrêtées dans le cadre de la mobilisation populaire contre la réforme du mariage. Beaucoup de personnes, victimes, de témoins ou d'avocats se sont émus du non-respect des droits individuels par les forces de police et de justice. Il est notable, d'une part, que de nombreuses personnes ont subi une interpellation arbitraire, en particulier lors d'une manifestation spontanée qui a eu lieu à proximité du lycée Buffon à Paris, le 27 mai 2013. Plusieurs personnes, dont une femme enceinte, quinze mineurs, une personne aveugle, ont été privés de leur liberté et conduits dans un commissariat du XVIIIe arrondissement pour y effectuer un contrôle d'identité qui aurait pu avoir lieu sur place. Il s'agit d'une claire entrave à la liberté de circulation et d'expression dans l'espace public. Il est clair qu'une personne aveugle ou qu'une femme enceinte peut difficilement constituer un trouble à l'ordre public. D'autre part, la plupart des gardes à vue qui ont a été décidée à l'issue des interpellations qui ont eu lieu au soir du 26 mai 2013 s'est achevée dans l'après-midi ou la soirée du lundi 29 mai 2013. Durant plus d'une quinzaine d'heure, et parfois jusqu'à vingt-trois ou vingt-quatre heures, il apparaît clairement que la durée de ces gardes à vue est abusive, particulièrement pour des affaires qui se sont terminées le plus souvent par de simples rappels à la loi. Il est pour le moins surprenant d'encombrer les commissariats en gardant aussi longtemps des personnes dont il est manifeste qu'elles ne sont pas dangereuses, voire innocentes si l'on en croit l'absence de poursuites, alors que la violence croît sur le territoire. Enfin, le procureur de la République a requis, lors d'une audience du 28 mai 2013, onze mois de prison dont quatre mois fermes contre un jeune étudiant interpellé le 25 mai 2013, pour un étudiant accusé de participation à manifestation après sommation, d'entrave à la circulation et mensonge sur son identité à un agent de police. Il avait, de fait, donné le nom de sa mère. Cette réquisition n'est ni mesurée, ni proportionnée eu égard à la gravité du fait reproché et au passif, nul, de cet étudiant. De façon très claire, l'ensemble de ces cas démontre que les personnes qui manifestent leur opposition à la réforme du mariage et de la filiation ne sont pas traitées équitablement par les services de l'État, et particulièrement les services judiciaires. Il lui demande ce qu'elle entend mettre en oeuvre pour assurer l'égalité de traitement aux personnes interpellées dans le cadre des manifestations d'opposition à la réforme du mariage et de la filiation, et éviter que les services de l'État ne soient utilisés à des fins de répression politique.

Texte de la réponse

La garde à vue est une mesure de contrainte décidée par un officier de police judiciaire : toute personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement peut ainsi être maintenue à la disposition des enquêteurs. Cette mesure s'exécute sous l'autorité et le contrôle du procureur de la République qui, dès le début, est informé de la mesure de garde à vue, des motifs justifiant le placement en garde à vue et de la qualification des faits reprochés à la personne. En application de l'article 63 du code de procédure pénale, une mesure de garde à vue de droit commun peut durer pendant une durée de 24 heures. Elle peut être prolongée pour un nouveau délai de 24 heures au plus s'il est reproché à la personne un crime ou une infraction punie d'au moins un an d'emprisonnement. En conséquence, les mesures de garde à vue du 26 mai 2013 évoquées - qui ont duré moins de 24 heures - prises par les services de police à l'encontre de personnes suspectées d'avoir commis des infractions à la loi pénale l'ont été dans le strict respect des prérogatives dont ils disposent, et sont conformes aux exigences constitutionnelles et conventionnelles relatives aux droits de la défense. Par ailleurs, les contrôles d'identité réalisées le 27 mai 2013 à proximité du Lycée Buffon à Paris ne constituent en aucune façon des interpellations arbitraires. En effet, en application de l'article 78-1 du code de procédure pénale, « toute personne se trouvant sur le territoire national doit accepter de se prêter à un contrôle d'identité » réalisé par les autorités de police. Si une personne contrôlée refuse ou se trouve dans l'impossibilité de justifier de son identité, elle peut être, en application de l'article 78-3 du code de procédure pénale, conduite dans un local de police aux fins de vérification de son identité. Elle est immédiatement présentée à un officier de police judiciaire qui la met en mesure de fournir par tout moyen les éléments permettant d'établir son identité et qui procède, s'il y a lieu, aux opérations de vérification nécessaires. La personne qui fait l'objet de cette vérification ne peut être retenue que pendant le temps strictement exigé par l'établissement de son identité. En tout état de cause, elle ne peut excéder une durée de quatre heures. La personne retenue est informée de son droit de faire aviser le procureur de la République - qui peut mettre fin à tout moment à la mesure - de la vérification dont elle fait l'objet et de prévenir à tout moment sa famille ou toute personne de son choix. Lorsqu'il s'agit d'un mineur, le procureur de la République est informé dès le début de la rétention. Sauf impossibilité, le mineur est par ailleurs assisté de son représentant légal. Enfin, conformément à la circulaire de politique pénale du 19 septembre 2012, il convient de rappeler que les réquisitions du ministère public à l'audience tiennent compte des circonstances de commission des faits, de leur contexte ainsi que de la personnalité du mis en cause.