pesticides
Question de :
M. Hervé Féron
Meurthe-et-Moselle (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
M. Hervé Féron attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur l'étude récente de l'Institut de veille sanitaire concernant l'exposition de la population française aux pesticides. Des analyses de sang et d'urine ont été réalisées sur environ 400 adultes âgés de 18 à 74 ans. Trois grandes familles de pesticides étaient recherchées, les organochlorés, pour la plupart interdits, les organophosphorés, toujours utilisés, et les pyréthrinoïdes, qui sont désormais les insecticides les plus employés. L'interdiction des organochlorés a montré son efficacité puisque les concentrations observées sont relativement basses. En revanche, les niveaux d'exposition de la population aux organophosphorés et, plus encore, aux pyréthrinoïdes se révèlent préoccupants. Selon l'InVs, « les niveaux français semblent être parmi les plus élevés en référence à des pays comparables ». Aussi et compte tenu de ce constat, il lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures qu'elle compte prendre afin de remédier à cette situation.
Réponse publiée le 14 janvier 2014
Le rapport publié en 2013 par l'institut de veille sanitaire relatif à l'imprégnation des pesticides dans la population française exploite les résultats d'analyses réalisées sur des échantillons biologiques (sang ou urine) prélevés en 2007 chez environ 400 participants à l'étude nationale nutrition santé (ENNS). Les produits dosés sont soit les molécules pesticides d'origine, soit leurs produits de transformation dans l'organisme (métabolites). Cette étude de biosurveillance permet pour la première fois d'évaluer l'exposition de la population française aux pesticides et de la comparer aux études faites dans les autres pays. Le terme de pesticides recouvre un ensemble de produits destinés à lutter contre les organismes nuisibles. Il comprend les produits phytopharmaceutiques, utilisés pour la protection des cultures (agriculture, jardins publics et privés, plantes d'intérieur) et le stockage des récoltes, les produits biocides, utilisés pour lutter contre les parasites du bois, des matériaux de construction ou des fibres et textiles, contre les insectes et acariens des locaux et pour la lutte antivectorielle, certains médicaments ou produits à usage vétérinaire (colliers ou lotions pour la prévention ou le traitement des tiques ou des puces) et enfin certains médicaments à usage antiparasitaire utilisés chez l'homme dans le traitement des poux ou de la gale. Une même substance peut entrer dans la composition de plusieurs de ces catégories. S'agissant des pesticides organochlorés, les mesures d'interdiction et de restriction d'usage semblent avoir montré leur efficacité : dans l'ensemble, à l'exception de certains chlorophénols (notamment utilisés comme antimite ou désodorisant), les concentrations observées sont relativement basses, ce qui traduit l'effet positif d'une interdiction déjà ancienne pour la plupart des composés, comme par exemple l'insecticide DDT. Les niveaux d'imprégnation en pesticides organophosphorés sont inférieurs à ceux de la population allemande, similaires à ceux de la population israélienne, mais supérieurs à ceux des Américains ou des Canadiens. Les facteurs physiologiques tels que l'âge et la corpulence semblent les influencer de façon importante, et dans une moindre mesure, le lieu de résidence, et notamment la présence de certaines activités agricoles, l'alimentation et l'usage d'insecticides dans le logement. Aujourd'hui, les pesticides organophosphorés sont beaucoup moins utilisés qu'en 2007, lors de l'étude ENNS. Concernant les pyréthrinoïdes, famille d'insecticides la plus utilisée dans le traitement des cultures et dans les applications domestiques, les concentrations sont plus élevées que celles observées en Allemagne, au Canada ou aux Etats-Unis. La consommation de certains aliments et l'utilisation domestique de pesticides (traitement antipuces des animaux domestiques ou traitement d'un potager) influencent de façon importante les niveaux d'imprégnation. De nombreuses actions ont été mises en place pour évaluer et réduire les risques pour la santé liés à l'utilisation des pesticides. Concernant les biocides, la directive communautaire n° 98/8/CE relative à la mise sur le marché des produits biocides, transposée en droit français aux articles L.522-1 et suivants du code de l'environnement, vise à assurer un niveau de protection élevé de l'homme, des animaux et de l'environnement en limitant la mise sur le marché aux seuls produits biocides efficaces présentant des risques acceptables et encourageant la mise sur le marché de substances actives présentant de moins en moins de risque pour l'homme et l'environnement. Les mesures visent notamment à prévenir les effets à long terme : effets cancérogènes ou toxiques pour la reproduction, effets des substances toxiques, persistantes et bioaccumulables. En France, ces autorisations sont délivrées par le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, sur la base d'un avis et d'un rapport d'évaluation de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES). Le 1er septembre 2013, cette directive a été remplacée par le règlement n° 528/2012 qui renforce l'encadrement des produits biocides notamment en excluant a priori les substances actives les plus dangereuses et en élargissant le champ de la réglementation aux articles traités (par exemple les matelas traités anti-acariens). Concernant les produits phytopharmaceutiques, le Plan Ecophyto 2018 vise à réduire progressivement l'utilisation des pesticides en France tout en maintenant une agriculture économiquement performante. C'est une initiative lancée en 2008 à la suite du Grenelle de l'environnement avec de nombreux acteurs mobilisés : agriculteurs, chercheurs, techniciens des chambres d'agriculture ou des instituts techniques. Le principal objectif d'Ecophyto est de diminuer le recours aux produits phytosanitaires, tout en continuant à assurer un niveau de production élevé tant en quantité qu'en qualité. Pour cela il utilise une batterie d'outils : formation des agriculteurs à une utilisation responsable des pesticides, le Certiphyto, création d'un vaste réseau de fermes pilotes pour mutualiser les bonnes pratiques, mise en ligne dans chaque région, de bulletins de santé du végétal qui alertent les producteurs sur l'arrivée des parasites, programme de contrôle de tous les pulvérisateurs qui sont utilisés pour l'application des produits phytosanitaires. Une large campagne de communication « Jardiner autrement » a été conduite avec succès dans le cadre de ce plan, sur le thème : « Les pesticides, apprenons à nous en passer ». L'usage des produits phytopharmaceutiques ayant un classement toxicologique a été interdit dans les aires de jeux pour enfants et les cours de récréation et dans le périmètre de 50 mètres des bâtiments d'accueil ou d'hébergement des personnes vulnérables. Il a été restreint dans les parcs, espaces verts et terrain de sports ouverts au public. Par ailleurs, suite aux engagements du Grenelle de l'environnement, 39 molécules classées comme les plus dangereuses ont été retirées du marché. Le programme de révision des pesticides mis en place par la réglementation européenne, entrée en vigueur en 1994 et renforcée par le règlement n° 1107/2009 a abouti à l'élimination des substances les plus préoccupantes, notamment avec la mise en place de critères d'exclusion et de substitution en juin 2011. Pour le grand public, seuls les produits répondant à des critères stricts de classement sont accessibles aux jardiniers amateurs.
Auteur : M. Hervé Féron
Type de question : Question écrite
Rubrique : Produits dangereux
Ministère interrogé : Affaires sociales et santé
Ministère répondant : Affaires sociales et santé
Dates :
Question publiée le 4 juin 2013
Réponse publiée le 14 janvier 2014