14ème législature

Question N° 28774
de M. Jacques Pélissard (Union pour un Mouvement Populaire - Jura )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales et santé
Ministère attributaire > Affaires sociales, santé et droits des femmes

Rubrique > assurance maladie maternité : prestations

Tête d'analyse > frais d'optique

Analyse > remboursement. perspectives.

Question publiée au JO le : 11/06/2013 page : 5957
Réponse publiée au JO le : 23/09/2014 page : 8034
Date de changement d'attribution: 27/08/2014

Texte de la question

M. Jacques Pélissard appelle l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la proposition de loi Le Roux n° 296 visant à permettre aux mutuelles de mettre en place des réseaux de soins, à pratiquer le remboursement différencié dans ces réseaux, et sur les effets néfastes qu'elle induirait sur la filière optique en France. Le remboursement différencié dans ces réseaux est contraire aux principes de base de notre système de santé et est porteur d'évolutions particulièrement dangereuses. Les réseaux qui annoncent une baisse de prix, c'est en réalité une baisse de la valeur relative de la qualité du produit. La filière de la santé oculaire en France est très performante et remplit parfaitement son rôle en fournissant tous les types d'équipements visuels, à tous les prix. Avec les réseaux de soins et les remboursements différenciés qui les accompagnent, apparaît un vrai risque de désorganisation de la filière qui entraînerait une chute des équipements en lunettes, point fort de notre pays, et une menace pour l'emploi dans une filière qui compte, au sens large, près de 100 000 personnes. L'élargissement de la couverture des soins aux plus démunis est une bonne chose, mais sans diminuer la qualité de la prise en charge des autres Français, contrairement à la pratique des réseaux de remboursements différenciés qui risque de mettre à mal les efforts pour améliorer l'accès aux lunettes. La concurrence entre opticiens (12 000 magasins en France) n'est pas défavorable aux assurés mais permet, au contraire, aux prix de ce secteur d'évoluer nettement moins rapidement que les prix sur d'autres marchés. Sur la période 2005-2009, les prix de l'optique ont connu une progression annuelle de + 0,6 %, pour une inflation de 1,6 % en moyenne. Les opticiens ont proposé, depuis 2000, plus de 500 000 équipements optiques par an aux Français couverts par la CMU-C, pour un prix moyen de 54 euros TTC, montant jamais revalorisé malgré l'inflation. Pour aller encore plus loin, les opticiens proposent également aux plus de 60 ans et aux personnes bénéficiant de l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (ACS), un « pass lunette » leur permettant de consulter un ophtalmologiste en moins de 3 mois et donnant accès à un équipement optique complet de qualité avec un reste à charge nul ou le plus faible possible. Conscients que l'accès aux soins est une problématique d'ampleur et afin de poursuivre et élargir tous ces efforts, les opticiens souhaitent maintenant aller encore plus loin en proposant une « offre optique de base » répondant aux critères de santé, calquée sur l'offre socle CMU-C. Il lui demande sa position sur cette proposition de loi et les mesures qu'elle compte mettre en place pour soutenir, véritablement et durablement, la filière optique en France.

Texte de la réponse

Le Gouvernement a placé l'accès aux soins au coeur de la stratégie nationale de santé. Or l'optique est, selon une enquête de l'institut de recherche et de documentation en économie de la santé (IRDES), le poste de dépenses qui crée le plus de renoncement aux soins, en raison notamment du reste à charge supporté par les ménages. La Cour des comptes a souligné le coût élevé des produits optiques en France. Conscient de ces difficultés et soucieux de favoriser un égal accès aux soins à tous, le Gouvernement a souhaité agir à travers deux leviers : - la loi relative aux réseaux de soins, en permettant aux mutuelles de proposer de meilleurs remboursements lorsque leurs adhérents recourent à un professionnel de santé agréé, soutient les conventionnements entre organismes complémentaires et opticiens et permet ainsi aux organismes complémentaires d'agir sur le niveau des prix pratiqués par ces derniers ; - la réforme des contrats responsables et solidaires, en cohérence avec l'objectif énoncé en octobre 2012 par le Président de la République lors de son discours au congrès de la mutualité d une généralisation « à l'horizon 2017, [de] l'accès à une couverture complémentaire de qualité », vise à la fois à favoriser une meilleure couverture des besoins des assurés par les organismes complémentaires et à mettre fin à la spirale inflationniste entraînée par le développement des prises en charge élevées des frais d'optique par les complémentaires, qui ont nourri la hausse des prix des produits, au détriment du pouvoir d'achat des ménages. Dans cette perspective, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 réformant le dispositif dit des contrats responsables et solidaires a conditionné les avantages sociaux et fiscaux des contrats des complémentaires santé à des exigences renforcées sur les niveaux de garantie. Le Gouvernement a présenté le 30 juin 2014 un projet de décret, élaboré après concertation de l'ensemble des acteurs concernés par la réforme : représentants de l assurance maladie obligatoire, de l'assurance maladie complémentaire, des fabricants de dispositifs médicaux d'optique, des distributeurs de dispositifs médicaux d'optique, ainsi que des partenaires sociaux et des professionnels de santé. En matière d'optique, les contrats devront désormais prendre en charge soit le ticket modérateur, soit si le contrat propose une garantie allant au-delà, un forfait minimal, de 50 euros pour une paire de verres simples et de 200 euros pour une paire de verres complexes. Cela permet de garantir une couverture significative permettant l'acquisitation d'un équipement en limitant les restes à charge. Les prises en charge des contrats responsables sont par ailleurs plafonnées pour limiter la dérive des prix. Des plafonds de prise en charge différents ont été fixés pour tenir compte des différents besoins de santé des patients : 470 euros pour une paire de lunettes à verres simples ; 750 euros pour une paire de lunettes à verres complexes ; 850 euros pour une paire de lunettes à verres très complexes. La prise en charge du coût de certains traitements (comme l amblyopie) se situe hors de ces plafonds. Afin de garantir que l essentiel de ces prises en charge est affecté aux verres, la prise en charge des montures est plafonnée à 150 euros. Ces plafonds couvrent les niveaux de garantie offerts par 90 % des contrats. L'encadrement des prises en charge par le contrat responsable ne doit pas encourager les opticiens à recourir à des produits à très bas prix, de moindre qualité, qui pourraient être fabriqués dans des pays émergents. C'est pourquoi le Gouvernement renforce les exigences de transparence et d'information sur le prix des lunettes et sa décomposition. Les opticiens devront remettre un devis puis une facture, qui présentera les différentes composantes du prix final (verre, monture, intervention de l'opticien). L'arrêté du 23 juillet 1996 relatif à l'information du consommateur sur les produits d'optique médicale sera modifié à cette fin. Le respect de ces dispositions fera l'objet de contrôles. Il s'agit là d'une garantie importante pour les patients comme pour les industriels français de l'optique. Le décret sur les contrats responsables crée un observatoire des prix et de la prise en charge en optique médicale. Cet observatoire analysera l'évolution des prix et de la qualité des équipements d'optique, de leur niveau de prise en charge, et de la filière industrielle du secteur. Il remettra chaque année un rapport sur les pratiques constatées et formulera des préconisations sur l'évolution de l'encadrement du secteur et des contrats complémentaires. Cette réforme entrera graduellement en vigueur, pour les contrats souscrits ou renouvelés à partir du 1er avril 2015, avec toutefois un délai de transition pour les contrats résultant de garanties collectives en vigueur à la date de publication de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014. Pour ces garanties, les nouvelles règles s'appliqueront lors de la révision des accords collectifs ou décisions de l'employeur, au plus tard à partir du 31 décembre 2017.