14ème législature

Question N° 29382
de M. Jacques Krabal (Radical, républicain, démocrate et progressiste - Aisne )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Commerce, artisanat, consommation et économie sociale

Rubrique > consommation

Tête d'analyse > concurrence

Analyse > développement.

Question publiée au JO le : 18/06/2013 page : 6304
Réponse publiée au JO le : 29/07/2014 page : 6445
Date de changement d'attribution: 04/06/2014

Texte de la question

M. Jacques Krabal interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur la place donnée au secteur du commerce alimentaire de détail dans le projet de loi « consommation ». L'autorité de la concurrence s'est autosaisie des restrictions de concurrence sur le marché de la distribution alimentaire, en rendant le 7 décembre 2010 un avis (n° 10-A-26) relatif aux contrats d'affiliation des magasins indépendants et aux modalités d'acquisition de foncier commercial dans le secteur de la distribution alimentaire. Dans cet avis, l'autorité a pointé du doigt le niveau excessivement élevé de concentration de certaines zones de chalandise ainsi que les barrières mises en œuvre pour les groupes en place pour s'opposer à l'entrée sur le marché de nouvelles enseignes. L'autorité a également relevé dans cet avis les dispositifs contractuels et capitalistiques visant à limiter la mobilité des magasins affiliés indépendants entre les réseaux concurrents, alors même que selon 60 % à 75 % des points de vente appartiennent à des entrepreneurs juridiquement indépendants. L'autorité a montré que ces facteurs limitent très fortement la concurrence et dégradent la situation des consommateurs, notamment en matière tarifaire. Il est évident que si les commerçants indépendants affiliés du secteur pouvaient plus facilement changer d'enseigne et de groupe de distribution, ils seraient en situation d'obtenir de meilleures conditions d'approvisionnement, ce qui bénéficierait au consommateur final. L'autorité a clos son avis en émettant certaines recommandations qui n'ont toujours pas été transcrites dans la loi. Le projet de loi « consommation » présenté il y a quelques semaines par le ministre de l'économie et le ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation sera débattu en discussion en séance publique à partir du 25 juin 2013. Les premières pages du dossier de presse dédié indiquent notamment la volonté des acteurs du projet de mettre en place « de nouvelles règles pour équilibrer les relations économiques et commerciales entre les entreprises », tout en luttant contre « la constitution de rentes abusives ». Il est regrettable de constater l'absence dans ce projet de loi des recommandations de l'Autorité de la concurrence. Celles-ci visent précisément à rétablir un équilibre dans la relation entre les affiliés et les groupes de distribution alimentaire en éliminant certaines restrictions à leur indépendance et en leur redonnant la liberté dans le choix de leur enseigne. De plus, les pratiques de certains groupes de distribution alimentaire ayant pour effet ou objet de « verrouiller » l'appartenance des magasins affiliés au sein de leur réseau sont autant de moyens pour eux de bénéficier des rentes abusives, phénomène contre lequel entend lutter le projet de loi « consommation ». Il lui demande de donner une place centrale dans le projet de loi aux recommandations de l'autorité de la concurrence pour les questions liées au secteur de la distribution alimentaire.

Texte de la réponse

Le 7 décembre 2010, l'autorité de la concurrence (ADLC) a rendu un avis « relatif aux contrats d'affiliation de magasins indépendants et les modalités d'acquisition de foncier commercial dans le secteur de la distribution alimentaire ». Cet avis souligne le degré de concentration élevé de certaines zones de chalandise dans le secteur de la grande distribution alimentaire, notamment sur les formats des hypermarchés et du commerce de proximité. L'avis constate l'absence de certains groupes de distribution dans certaines zones ou sur certains formats et, sur le format des hypermarchés, une spécialisation géographique des opérateurs avec dans certaines zones, la possibilité d'accueillir des nouveaux magasins. L'ADLC a alors identifié les barrières à l'entrée sur ce secteur, obstacles qui relèvent d'une part, des pratiques en matière de gestion du foncier commercial et, d'autre part, des pratiques dans les relations d'« affiliation ». Afin d'améliorer la fluidité des réseaux de distribution, l'ADLC recommandait notamment de supprimer les clauses de non-concurrence et les droits de priorité dans les contrats de vente et d'acquisition de foncier commercial, de renforcer l'information précontractuelle fournie au candidat à l'affiliation, de limiter la durée des contrats d'affiliation à 5 ans maximum, d'harmoniser la durée et les modalités de résiliation de l'ensemble des contrats constitutifs d'une même relation, de limiter la durée des clauses de non-affiliation et non-concurrence post-contractuelles dans les contrats d'affiliation, les statuts des sociétés communes et/ou dans les pactes d'associés, etc. Toutefois, un tel dispositif d'encadrement soulève des difficultés pratiques car une telle mesure pourrait remettre en cause certaines règles du fonctionnement des sociétés coopératives (mode de fonctionnement du commerce associé). Il est nécessaire de plus de ne pas affaiblir les commerçants « indépendants » au profit de ceux exerçant sur le modèle « intégré ». C'est ce qui explique que les dispositions n'ont pas été reprises dans la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation. Cette loi comporte toutefois plusieurs mesures pour rééquilibrer le rapport de forces dans le secteur de la distribution alimentaire. Ces dernières visent à améliorer la transparence dans les relations commerciales, à compléter l'énoncé des pratiques commerciales restrictives de concurrence afin d'appréhender certains comportements abusifs - caractérisant actuellement un détournement de la loi - , à obliger les parties à certains contrats dans des secteurs particulièrement impactés par les fluctuations des cours des matières premières à prévoir la renégociation du prix et à renforcer le dispositif de sanctions existant en donnant la possibilité à l'autorité chargée de la concurrence et de la consommation de prononcer des injonctions et des amendes administratives.